Mon employé autiste: une application pour mieux se comprendre en milieu de travail
Une équipe de l’Université de Montréal développe une application pour aider les gestionnaires d’entreprise dans leurs interactions avec leurs employé.e.s autistes, en collaboration avec la Fondation Autiste & majeur.
Le psychoéducateur Marc Lanovaz est à la tête de ce projet, qui a obtenu du financement de la Caisse de dépôt et placement du Québec par le biais de la Fondation Autiste & majeur, lancée par Charles Lafortune et Sophie Prégent. Parents d’un jeune adulte autiste, les deux personnalités publiques savent que l’employabilité des personnes autistes vient avec certaines difficultés, surtout en matière d’habiletés sociales.
«Les gestionnaires qui intègrent des personnes autistes dans les milieux de travail ne savent parfois pas comment réagir ou ne sont même pas au courant de ces difficultés. Ça peut mener à beaucoup d’interprétations erronées», indique à Métro Marc Lanovaz, qui s’est penché avec son équipe sur des solutions.
«On veut sensibiliser les employeurs, tout particulièrement les gestionnaires, à cette différence-là, poursuit le professeur. Ce sont des gens différents, mais qui peuvent faire un excellent travail, même meilleur que d’autres employés.»
Intitulée Mon employé autiste, l’application sera disponible gratuitement pour les appareils Apple et Android dans les mois à venir. Mais dès maintenant, l’équipe est à la recherche d’une centaine de gestionnaires qui voudraient bien la tester, que des personnes autistes fassent partie de leur entreprise ou pas.
Une application en cinq modules
Mon employé autiste se décline en cinq modules. Si le premier consiste en un questionnaire d’une trentaine de questions de type vrai ou faux permettant de situer les gestionnaires dans leurs connaissances de l’autisme, le second est plutôt ludique, explique Marc Lanovaz.
«Ce sont des vidéos animées qu’on a voulues humoristiques pour garder l’attention des gens. On constate dans nos projets de recherches que c’est une chose avec laquelle on a beaucoup de difficulté avec les applications pour mobiles; les gens ont tendance à déconnecter assez rapidement. On essaie donc d’être drôle sans blesser qui que ce soit. On ne veut pas tomber dans la caricature.»
Le second module est ainsi fait de trois vidéos: la première explique ce qu’est l’autisme, la deuxième explique comment accueillir une personne autiste dans un milieu de travail et la troisième donne des trucs. «C’est toujours à travers un employé autiste et son patron… qui est un peu niaiseux!», commente Marc Lanovaz, qui travaille dans le milieu depuis 20 ans.
Le troisième module est composé de témoignages de personnes autistes et de gestionnaires qui ont intégré des personnes autistes. Le suivant fonctionne comme un arbre décisionnel afin d’aiguiller les gestionnaires dans leur façon d’intervenir pour soutenir leur employé.e autiste. Finalement, le dernier module est pensé pour trouver de l’aide en redirigeant l’utilisateur vers différentes ressources.
«Les personnes autistes perdent leur emploi dans des proportions beaucoup plus élevées que la population en général, souligne le psychoéducateur. Avant de les mettre à la porte, on aimerait que les gestionnaires essaient de les comprendre et d’aller chercher des ressources.»
Beaucoup d’outils… pas toujours fiables
Il y a beaucoup, beaucoup d’applications qui existent pour aider les personnes autistes, mais peu sont appuyées par la recherche, et encore moins sont disponibles en français.
Marc Lanovaz, qui a fait des études en génie logiciel afin de mieux répondre aux besoins des personnes autistes, et son équipe à l’Université de Montréal ont déjà lancé deux autres applications qui, elles, sont appuyées par la recherche.
Conseils DTS (pour «dans ton sac»), qui a été développée avec l’Association québécoise pour le loisir des personnes handicapées, est déjà disponible gratuitement pour Apple et Android. Elle a été pensée pour «soutenir les moniteurs dans les camps de jour qui intègrent les enfants en situation de handicap, incluant les personnes autistes».
Une autre application, également gratuite, a été développée plus tôt cette année pour les casques de réalité virtuelle. Dans la peau d’une personne autiste «simule l’autisme en ajoutant des hypersensibilités et en retirant des indices sociaux». Les personnes qui en font l’essai se retrouvent devant des problèmes qui peuvent paraître anodins, comme trouver un bureau de dentiste. Mais l’environnement ayant été manipulé, elles ressentent le stress que peuvent vivre des individus autistes dans de telles situations.
«Les gens qui l’essaient nous disent toujours qu’ils vivent beaucoup d’émotions en le faisant. C’est ça qu’on veut!», s’enthousiasme le professeur à l’École de psychoéducation de l’Université de Montréal.
Les gestionnaires qui voudraient participer aux tests de Mon employé autiste peuvent communiquer avec l’équipe de recherche en suivant ce lien.