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Livres brûlés: une autrice dénonce un geste de «censure»

Sylvie Brien a été choquée que son livre soit mis à l’index. Photo: Archives/Métro Média

L’autrice Sylvie Brien a été choquée d’apprendre qu’une de ses œuvres figure au nombre des 155 livres jeunesse différents, certains ayant été brûlés, dont se débarrasse le Conseil scolaire catholique (CSC) Providence afin d’entamer une réconciliation avec les Premières Nations.

Radio-Canada a révélé que près de 5000 livres seront retirés des tablettes du Conseil scolaire. Une trentaine de livres ont été détruits ou brûlés en 2019. Le reste a été recyclé ou est en voie de l’être.

L’intention derrière le projet «Redonnons à la Terre» était de faire «un geste d’ouverture et de réconciliation en remplaçant les livres de nos bibliothèques ayant un contenu désuet et véhiculant des stéréotypes néfastes envers les Premières Nations, Métis et Inuits», explique dans un courriel Lyne Cossette, agente de communications au CSC Providence.

Mais pour l’ex-Pointelière Sylvie Brien, dont l’œuvre L’affaire du Collège indien a été mise à l’index, la nouvelle passe mal. «C’est de la censure pure et dure. C’est incompréhensible.»

L’autrice rappelle que son livre, qui dépeint les sévices des pensionnats autochtones dans les années 1920, est utilisé depuis des années comme matériel didactique dans les écoles. Bibliothèques et archives Canada soutient d’ailleurs que le récit aborde «avec justesse le sujet des pensionnats où les jeunes autochtones, arrachés à leur famille, étaient éduqués loin de leurs parents et de leurs traditions.»

Comme le CSC Providence ne l’a pas contactée, Mme Brien ne sait pas quel aspect de son roman justifie son retrait. Elle émet cependant l’hypothèse que c’est l’usage des mots «indiens» et «sauvages» dans son texte qui pose problème.

«C’est pourtant la Loi sur les Indiens qui a fait que les pensionnats indiens ont été mis sur la carte comme ça au Canada. […] On ne peut pas, dans un contexte de 1920, faire parler ses personnages comme en 2021.»

Une occasion ratée

L’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ) dénonce également le retrait des quelque 5000 livres, dont certains écrits par des auteurs membres.

Dans une déclaration écrite, l’Union indique que pour «comprendre le passé, le mettre en contexte, bâtir des ponts entre les différents peuples sont des pistes qui nous paraissent plus constructives», la littérature se doit expliquer l’Histoire, et non l’effacer.

Elle ajoute croire «fermement qu’aucun livre ne devrait être détruit ou brûlé pour des raisons politiques ou culturelles dans un pays comme le Canada.»

«La démarche de brûler des livres […] ça rappelle le principe des autodafés. C’est assez maladroit comme moyen de procéder, et ce n’est peut-être pas une façon particulièrement habile de créer une société plus tolérante et inclusive», renchérit Mathieu Arsenault, professeur au département d’Histoire à l’Université de Montréal, et spécialiste en histoire autochtone.

À son avis, les jeunes doivent au contraire comprendre pourquoi les stéréotypes ont existé et comment ils ont contribué à marginaliser les autochtones.

Le professeur voit par ailleurs dans cet événement une «occasion ratée» du Conseil d’inclure plus de livres écrits par des autochtones.
«La meilleure manière de montrer aux étudiants que ça ne représente pas la réalité, c’est de les mettre en contact avec d’autres ouvrages.»

Le CSC Providence s’excuse

Bien qu’il défende l’idée derrière son choix, le CSC Providence s’est dit par courriel désolé que la cérémonie, «qui se voulait comme un geste de réconciliation», ait pu offenser des membres de la communauté.

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