Les pour et les contre du conseil d’arrondissement virtuel
C’est en mars 2020 que le dernier conseil d’arrondissement a eu lieu à la salle du conseil de la mairie d’Ahuntsic-Cartierville. Depuis, les séances se déroulent en virtuel. Cela nuit-il à une saine démocratie?
De manière générale, on constate qu’en mode virtuel, les résidents n’ont pas déserté les séances du conseil d’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville.
«Pour ces personnes, la technologie est un outil pour élargir la démocratie», évoque une professeure de science politique à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Caroline Patsias.
À Ahuntsic-Cartierville, les élus observent une bonification dans la participation citoyenne, notamment sur la qualité des questions.
«On a eu autant [de questions] qu’avant, assure la mairesse d’Ahuntsic-Cartierville, Émilie Thuillier. Toutefois, un peu plus diversifiées. C’est ce que nous avons noté.»
Lorsque la crise sanitaire a frappé, seules les questions écrites étaient retenues lors des séances virtuelles du conseil. «Lorsqu’on a vu que la pandémie allait durer plus longtemps que prévu, il y a eu une adaptation de certains conseils qui ont permis la présence du citoyen en direct via [des plateformes de vidéoconférence]», souligne Mme Patsias.
Alors que Montréal passait en zone jaune, Émilie Thuillier ne savait toujours pas si le conseil de juillet se tiendrait en salle.
«En fait, la tenue des conseils d’arrondissement n’est pas liée aux couleurs. C’est le décret du gouvernement qui détermine ce qui peut être fait», explique l’élue.
«Ce n’est pas parce qu’on a eu un état d’urgence sanitaire que les citoyens n’ont pas contesté leurs élus au sein du conseil d’arrondissement. On a eu une conversation démocratique limitée, mais on l’a eue.»
Caroline Patsias
Même si la question se pose, Mme Thuiller n’a toujours pas la réponse. Mais elle a rappelé que des dispositions avaient été prises pour permettre des conseils à la salle de la maison de la culture avec la distanciation physique. «Cela n’a jamais pu être fait, puisque ce n’était pas autorisé par le gouvernement. Nous sommes à l’affût des décisions de Québec», indique-t-elle.
Discussion améliorée
Chaque municipalité et arrondissement organisent le conseil à sa manière. «Ce n’est pas standardisé, parce que chaque arrondissement a sa propre culture politique, explique Mme Patsias. Aussi, Montréal est une ville assez décentralisée, c’est-à-dire que les élus sont [choisis] par les citoyens de leur arrondissement. C’est à eux de décider de la norme de participation dans leur [territoire].»
En théorie, lors d’un échange entre le citoyen et le maire en personne, il ne devrait pas y avoir de débats. «Mais dans les faits, surtout à Montréal, il y a de plus en plus de citoyens qui reviennent à la charge. [En présentiel], on peut avoir bien plus qu’une simple reddition de compte», souligne l’experte, ajoutant que le conflit bien géré fait partie d’une saine démocratie.
Dans une salle, les résidents peuvent se rendre compte que d’autres citoyens pensent comme eux. Ils peuvent se soutenir.
Même si elle est liée aux restrictions sanitaires, cette manière de faire ne sera pas complètement abandonnée à Ahuntsic-Cartierville une fois les limitations levées.
«On a adopté un nouveau règlement. Les citoyens auront le droit de poser des questions par courriel pour savoir quand nous allons revenir à la normale», relève la mairesse d’Ahuntsic-Cartierville.
La décision a été prise après avoir constaté que la participation était finalement plus facile pour certains.
«Il y a des gens pour qui c’est beaucoup plus simple d’envoyer leurs questions de cette manière», assure Mme Thuillier.
Toutefois, les vidéoconférences désavantagent ceux qui n’ont pas accès à Internet ou qui sont malhabiles avec la technologie.
«Il y a des gens qui préfèrent venir poser leurs questions au conseil d’arrondissement. Cela permet plus d’interactions, c’est clair», admet l’élue.
Pour l’avenir, la population n’est pas à l’abri d’autres virus. Par exemple, pour la grippe en l’hiver, il serait préférable qu’un résident ait l’option de poser sa question de chez lui. Bref, la technologie est un outil d’élargissement qu’il serait souhaitable de continuer à intégrer dans l’exercice démocratique après la crise.