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Cinq initiatives pour revitaliser le quartier

Divertissement, environnement, socialisation, sécurité et travail, dans l’ordre ou non, c’est ainsi que se résume la démarche de revitalisation urbaine intégrée du secteur Laurentien-Grenet pour 2012 et 2013. Cinq organismes se sont réunis le 25 avril à la maison des jeunes de Cartierville pour présenter leurs projets. Au-delà des sourires et de la bonne humeurs, la démarche RUI n’en n’est pas moins une véritable opération d’urgence pour réhabilité un pan entier de Bordeaux-Cartierville.

C’est le Conseil local des intervenants communautaires (CLIC) qui pilote la démarche de Revitalisation Urbaine Intégrée (RUI) et gère les cordons de la bourse.

«La demande de financement était de 200 000$», explique Bertrand Pouyet, chargé de projets au CLIC. Mais le budget disponible à accorder aux programmes proposés était de 91000$ uniquement. «Cela entraîne un travail difficile du comité de sélection pour choisir les projets les plus à même de répondre aux objectifs de la démarche», indique-t-il. Il souligne toutefois que : «avec un dollar investi dans cette enveloppe, on arrive à lever trois dollars ailleurs».

La directrice du CLIC, Nathalie Fortin, a souligné l’engagement des organismes dans la démarche qu’ils ont «intégrée dans leur propre action». «On commence à voir les changements dans le quartier», relève-t-elle. «Pour lutter contre la pauvreté, il faut des politiques publiques fortes pour soutenir les individus et des démarches concertées pour donner une qualité de vie à l’ensemble des citoyens», martèle-t-elle.

La fête

Henri Scaboro, du Centre d’action bénévole de Bordeaux-Cartierville, est venu armé d’un bâton de golf pour présenter les actions de «BC en fête».

«Le mini putt est un des jeux qui a beaucoup de succès lors des fêtes de quartier», a-t-il précisé. BC en fête propose «hiver en fête» au mois de mars, «la fête de la famille» en mai et «le marché des saveurs» en automne. «L’objectif est de mobiliser des partenaires et des citoyens dans l’organisation», souligne-t-il. Il a annoncé également que : «4000 citoyens ont participé à ces fêtes en 2012».

L’environnement

«Est-ce que vous savez ce que c’est ?» a demandé à l’assistance Greicy Bialikamien de Ville-en-Vert. Elle exhibait un morceau de bois percé de six trous réguliers. «C’est un nichoir pour abeilles solitaires», a-t-elle expliqué devant une assemblée interloquée. Ces nichoirs sont placés par Ville-en-Vert sur tous les sites où l’organisme s’active, notamment les jardins collectifs.

«À l’école Louisbourg nous avons récolté 130 kg de fruits et légumes en 2012», annonce Greicy Bialikamien. Sur un des immeubles les plus insalubres du quartier, l’organisme va installer un toit vert financé à hauteur de 83 000$. «L’immeuble sera réhabilité pour en faire des logements sociaux pour des femmes chefs de familles monoparentales», signale-t-elle. L’organisme a ouvert aussi d’autres jardins communautaires, il a offert des jardinières à des résidents qui possèdent des balcons ensoleillés et il a organisé des chasses aux insectes avec des enfants de jour et de nuit. «L’idée c’est que les gens se familiarisent avec les friches urbaines», explique-t-elle. «Pour la gestion des déchets résiduels, nous avons visité 134 immeubles et rencontré 1549 personnes porte-à-porte», révèle-t-elle. L’organisme prévoit de rencontrer 800 personnes dans 70 immeubles en 2013. L’aménagement du parc Saint-Évariste est également au programme.

La socialisation

Julie Grondin, directrice de «la Maison des parents» est venue avec une corde à danser tout en refusant catégoriquement d’offrir une démonstration.

Son organisme a mis en place «le carrefour des voisins». «Un lieu de référence et de rencontre à l’école Louisbourg», comme elle aime à le définir. Elle lui accorde énormément de vertus aussi. Il favorise «le sentiment d’appartenance, l’inclusion, les projets d’intégration», énumère-t-elle. «Le projet anime plusieurs sources pour se présenter aux familles», indique-t-elle. «Il a permis de démystifier les ressources et expliquer que tout est accessible», dit-elle.

Le projet se termine en juin et reprendra à l’automne. L’absence de ce lieu, apparemment très prisé, sera palliée par d’autres ressources durant la saison estivale. «Un dynamisme qui a été réfléchi pour l’été avec plusieurs autres acteurs», annonce-t-elle.

La sécurité

Léo Fioré de Tandem Ahuntsic-Cartierville est venu avec Hamid Khaldoune, sociologue, présenter le projet «Entre bons voisins». Il consiste à visiter des immeubles problématiques et poser une plaque qui énumère les principales mesures à prendre pour favoriser le bon voisinage et réduire l’insécurité.

«Notre but, c’est visiter 40 immeubles pour avoir entre 15 ou 25 bâtiments intégrés au projet», a annoncé M. Fioré. «Quand des immeubles retrouvent leur gaieté et joie de vivre, je pense que les autres vont marcher. C’est de la contamination positive», a déclaré M. Khaldoun. Dans le cadre de ce projet, les résidents recevront aussi des cartes d’affaires à échanger entre voisins. «L’idée, c’est de toucher des immeubles, peu importe lesquels, pour créer une dynamique dans une quarantaine », a tenu à clarifier Pierre-Luc Lortie, conseiller en concertation du PDQ 10, partenaire incontournable dans les actions qui touchent à la sécurité publique.

Le travail

Les jeunes en décrochage scolaire, non diplômés et tout simplement trop éloignés du marché du travail, pourront travailler de manière occasionnelle. Louise Giguère, de RAP Jeunesse a pris des gants – de travail-, pour illustrer son projet.

Le projet MARC (mouvement vers des alternatives rémunérées et constructives) consiste à offrir l’opportunité de travailler à la journée, pour quelques heures, payées au moment même où le jeune termine ses tâches. «Tu viens sur le plateau de travail, si tu n’es pas intoxiqué et tu as le goût de faire 4h de travail», résume Louise Giguère. «De l’argent vite fait. On travaille pendant 4h, on reçoit de l’argent comptant et on n’est pas obligé de revenir le lendemain», souligne-t-elle. «Les jeunes peuvent viser un maximum de 20h par mois. Concrètement, les personnes appellent le matin à partir de 10h. Ils demandent à s’inscrire pour les plateaux de la journée. Ils se présentent à midi ou à une 1h et à la fin du plateau, ils sont payés», explique-t-elle.

Les jeunes seront recrutés par les travailleurs de rue. «On compte beaucoup sur le bouche-à-oreille», admet-elle.

Les plateaux proposés sont des activités dans le cadre de travaux en horticulture de Ville-en-Vert. «L’OMHM nous a donné aussi un contrat de service avec des plans d’habitations ciblés pour l’entretien ou pour déplacer des meubles sur les espaces extérieurs», précise-t-elle. «Nous visons un bassin de 100 jeunes cette année.»

Les initiatives proposées cette année, aussi diversifiées soient-elles, signalent que le quartier nécessite toujours une prise en charge. Une démarche de revitalisation urbaine dure en moyenne 10 ans. En 2017, le CLIC qui pilote celle-ci espère avoir accompli suffisamment de travaux pour transformer en partie le quartier. Les objectifs visés sont aussi l’amélioration globale du cadre de vie de la population de ce territoire grâce notamment à une offre de service plus diversifiée et la revitalisation des commerces de proximité. Le second défi consiste à inclure les résidents actuels tout en évitant la gentrification.

Les raisons d’une urgence

Ce n’est pas un quartier de Ciudad Juárez, Détroit ou Grozny en Tchétchénie. On peut se promener sur Lachapelle ou traverser la ruelle verte sans risque de se faire agresser. Pourtant, en observant de près la démarche RUI, on semble voir une intervention d’urgence en cours depuis cinq ans. Pour comprendre cette logique d’urgence on peut lire dans un document intitulé Portrait de la criminalité de violence conjugale à Bordeaux-Cartierville>@$p> établi par le PDQ 10, que le secteur ne connaît pas de difficultés particulières et le taux de criminalité «est sensiblement le même que celui du reste du PDQ, hormis pour les crimes contre la personne qui y sont deux fois plus élevés». On comptabilisait en 2009, 180 crimes pour 10000 habitants. «Ce taux est également plus important que la moyenne montréalaise, qui est de 133 crimes contre la personne par 10000 habitants» souligne-t-on dans ce même document.

Une bonne part de ces crimes sont qualifiés de violences conjugales. «En proportion du nombre de personnes qui habitent dans le secteur Laurentien/Grenet , la problématique est à ce point important que le taux de criminalité de violence conjugale est comparable à celui rencontré dans des quartiers comme Montréal-Nord. On parle ici d’un taux de 55 crimes par 10 000 habitants», lit-on dans le texte du SPVM.

Selon des chiffres publiés en 2011, le secteur Laurentien/Grenet c’est près de 11 000 résidents, dont 57% sont issues de l’immigration récente. 58% de ménages vivent sous le seuil de pauvreté. 79% des personnes sont en familles, dont 38% sont monoparentales. 91% sont locataires de petits logements. 45% des personnes n’ont pas de diplômes et le taux de chômage est de 22,2% chez les hommes.

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