Le Bingo Hochelaga a fermé ses portes après plus de deux décennies d’activité
Ouvert sept jours par semaine depuis 22 ans, le Bingo Hochelaga a vécu sa dernière soirée le 30 décembre dernier. Faute de rentabilité, les deux propriétaires ont dû baisser les bras, tout en gardant la tête haute.
C’est avec le cœur lourd que Raynald Piperno et Jacques Pelletier observent le plancher vide de leur bingo de la rue Hochelaga. Institution de jeux bien connue du quartier, cette salle accueillait en moyenne 3500 personnes par semaine durant ses années fastes, mais la fréquentation avait drastiquement chuté ces dernières années.
«Si on nous avait dit cela en 1995, jamais on n’aurait pensé que le bingo fermerait. On pensait que le jeu de bingo allait durer éternellement», lâche amèrement M. Pelletier.
Ouvert le 1er octobre 1995, le Bingo Hochelaga a prospéré pendant une quinzaine d’années. Comme les autres salles de bingo du Québec, l’enseigne du quartier a contribué au financement du milieu communautaire en reversant 45% de ses revenus. En 22 ans, environ 13 M$ ont été redistribués à dix organismes du territoire et plus de 35 M$ de prix ont été gagnés par des joueurs.
«Ça va me manquer. Je ne sais pas c’est quoi une séparation, car je suis encore avec ma femme, mais vivre des moments comme ça, ça ressemble à une séparation.»
Raynald Piperno, copropriétaire du Bingo Hochelaga.
La loi anti-tabac de 2006, le vieillissement de la population, la concurrence des jeux en ligne ou encore l’augmentation des prix ont toutefois plongé progressivement cette salle dans une lente, mais inéluctable, agonie. Pour Raynald Piperno et Jacques Pelletier, la décision de fermer s’est imposée le 10 décembre dernier.
«On savait que ce serait dur depuis un an. On a essayé de renégocier la location pour couper la salle en deux, mais le propriétaire n’a pas voulu. Celui-ci nous a laissé le choix de payer le mois de décembre et de partir sans pénalité et le soir même on l’a annoncé. C’était familial ici donc ça nous a fait de quoi, il y a des clients qui pleuraient dans la salle», se souvient M. Piperno.
Tristesse et fierté
Après le dernier bingo du 30 décembre, les deux responsables de l’enseigne ont passé la première semaine de janvier à vendre et donner l’ensemble de l’équipement et du mobilier de la salle. Ils ont définitivement rendu les clés le lundi 8 janvier.
Marqués par 22 années d’exercice dans le quartier, Raynald Piperno et Jacques Pelletier sont tristes de laisser derrière eux 26 employés passionnés et des dizaines de clients fidèles, mais malgré cette peine, les deux hommes se disent fiers de partir dignement.
«J’aurais mieux aimé vendre plutôt que de fermer, mais il y en a qui ont fermé brutalement et nous, non. Tout le monde est payé, on sort de là la tête haute. On quitte ici mission accomplie», conclut Raynald Piperno.
Le bingo ne fait plus recette
Initialement lancé dans les salles paroissiales au Québec dans les années 60, le bingo a évolué pour devenir une industrie permettant de financer les organismes communautaires. Très ancré dans une génération, ce jeu a malheureusement perdu en popularité depuis une dizaine d’années et souffre notamment de la concurrence des jeux en ligne. On comptait 176 salles de bingo au Québec en 1997, mais avec la fermeture du Bingo Hochelaga, il n’y en a désormais plus que 42. Sur l’île de Montréal, seules quatre salles sont encore actives, soit à LaSalle, Lachine, Rosemont–La Petite-Patrie et Pointe-aux-Trembles. De plus, entre 2009 et 2014, les revenus du bingo ont chuté de 100 M$ au Québec (de 274 M$ à 174 M$). |