Couleuvre sous roche à Verdun
Les travaux sont commencés pour la plage de Verdun, mais aucune machinerie lourde n’est en vue sur le site. Normal, puisque la première étape est effectuée par un seul homme, le biologiste Patrick Galois. Il arpente les lieux à la recherche de couleuvres brunes du Nord afin de les relocaliser, puisque l’espèce est susceptible d’être désignée comme menacée.
Pour les capturer, il fouille sous les débris où elles pourraient se cacher, mais utilise aussi des abris artificiels. Il sait donc où chercher, comme un chasseur faisant la tournée de ses collets.
«C’est un animal qui chauffe par convection et qui aime donc se coller à des objets chauds, pas seulement s’installer au soleil comme d’autres reptiles», fait-il valoir, arpentant le terrain entre les herbes et les morceaux d’asphalte.
«Ça y est! On en a une», annonce-t-il, ajoutant immédiatement qu’il s’agit en fait d’une couleuvre rayée, très commune. Il la plonge tout de même dans un sac de tissu. Elle sera déplacée en même temps que ses lointaines cousines.
Le site choisi pour relocaliser les serpents ne peut toutefois être révélé. «Trop de curieux s’y rendraient et pourraient perturber le milieu. Mais on choisit toujours un endroit où il y a déjà une colonie de couleuvre brune et qui, on l’espère, ne devrait pas être développé avant plusieurs années. On sait donc que le milieu est propice», spécifie M. Galois.
Il faut à la couleuvre brune du Nord un endroit où elle peut trouver des escargots et des limaces en abondance, mais aussi des hibernacles naturels où passer l’hiver.
Menace humaine
«On retrouve la couleuvre brune du Nord seulement sur l’archipel de Montréal. Et son habitat naturel, les terrains vagues et en friche, sont de moins en moins nombreux et souvent visés par les projets et les promoteurs», explique le biologiste d’Amphibia-Nature, qui a travaillé sur des projets comme l’échangeur Turcot, la Gare de l’Est et le boulevard Maurice-Duplessis.
Inoffensive et petite, avec sa quarantaine de centimètres, la couleuvre est tout de même très bien équipée pour se protéger de ses prédateurs naturels comme les chats et les ratons laveurs. Il est très rare qu’on puisse l’observer rampant sur le sol, puisqu’elle reste habituellement cachée.
«Pendant toutes mes années de travail à les chercher, ça ne m’est pratiquement jamais arrivé», soutient-il. Sauf que la petite bête, si elle est surprise par un prédateur, a le réflexe de s’immobiliser pour ne pas se faire remarquer. «Ça fonctionne très bien avec d’autres animaux, mais contre des véhicules, ce n’est pas très payant.»
C’est pour cette raison que les spécimens sont déplacés avant le début des travaux, qui s’amorcent en parallèle, mais seulement dans les parties du chantier qui ne sont pas touchées par la relocalisation.
Pendant encore deux semaines environ, tout dépendant de ses résultats, il continuera à arpenter le terrain tous les jours de beau temps, à la recherche de ces petits animaux. Pour l’instant, il en a capturé une quinzaine.