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Le dernier tailleur de Lachine ferme boutique

Photo: Collboration spéciale

Arrivé au Canada avec sa famille en 1961, Joseph Fragapane, originaire de la Sicile, a commencé à travailler presque immédiatement chez Victor le tailleur, rue Provost à Lachine. Aujourd’hui, à 68 ans, il accroche ciseaux, fil et ruban; et il éteint sa machine à coudre. Il est le dernier tailleur à Lachine.

«J’étais le dernier tailleur encore actif à Lachine, les autres ont cessé leurs activités depuis longtemps», affirme M. Fragapane, qui a commencé à coudre à l’âge de 10 ans, dans un atelier de formation dans sa ville natale de Santa Elisabetta. Il n’est pas allé à l’école longtemps. Le jeune apprenti est devenu un autodidacte de son métier qu’il pratique depuis 58 ans.

«J’ai beaucoup de chagrin à fermer mon commerce», confesse sans réserve le propriétaire de Jo-Jo Tailleur, nom de la boutique qu’il a tenue de 1981 à aujourd’hui, tant sur la rue Provost que sur la rue Notre-Dame. Un commerce dont il a hérité de Salvatore Urso, à la mort de ce dernier, assurant ainsi «le relais» d’une boutique qui roulait déjà à plein régime depuis une dizaine d’années.

Pas de relève
«Il n’y a plus de relève dans mon domaine», dit M. Fragapane, appuyé dans ses propos par sa femme, Ginette St-Martin, qui le seconde dans son travail depuis le début des années 2000.

«C’est la raison principale pour laquelle je m’arrête, affirme le tailleur. Ce n’est pas par manque de travail, loin de là. C’est dommage, j’aime toujours mon métier et j’avais encore des clients. Je tiens d’ailleurs à les remercier chaleureusement».

Souvent Jo-Jo devait se cacher dans son arrière-boutique pour terminer ses confections. Ses clients voulaient toujours converser avec lui. Ce qui le ralentissait dans son travail.

«Joseph n’a jamais compté ses heures, raconte son épouse Ginette, mais aujourd’hui, à 68 ans, il faut qu’il s’arrête. C’est une question de santé».

Mme St-Martin ajoute qu’aujourd’hui, «les jeunes qui se dirigent en mode ne veulent plus coudre un bouton ou une fermeture-éclair, ni refaire des retouches sur un pantalon ou un veston. Ils veulent créer comme les grands couturiers».

Savoir s’arrêter
La présidente de l’Association du centre-ville de Lachine (ACVL), Janie St-Pierre, qui salue le nouveau retraité, reconnaît que le métier de tailleur est moins en demande. «Aujourd’hui, dit-elle, il y a des professions qui disparaissent et d’autres qui apparaissent».

Mme St-Pierre ajoute, en pensant à Joseph Fragapane, Jo-Jo Tailleur: «Vient un moment où il faut savoir s’arrêter».

Jo-Jo Tailleur a fermé ses portes le 25 mai. C’est écrit dans la vitrine. Mais le commerce demeure opérationnel jusqu’en juin. Le temps que les derniers clients viennent chercher leurs vêtements.

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