Une première tente érigée le long de la rue Notre-Dame
Une première tente a fait son apparition la semaine dernière le long de la rue Notre-Dame à quelques pas de la rue Frontenac. Métro a discuté ce lundi avec l’occupant des lieux.
Yan a érigé sa tente lorsque la pluie s’est abattue sur la métropole le 15 avril dernier. Camelot au magazine L’Itinéraire, il affirme dormir dans le coin depuis une quinzaine d’années.
Préférant rester seul, Yan n’a pas rejoint le campement Notre-Dame en 2020, installé plus loin au square Dézéry et il n’a plus l’intention de le faire cette année. Ce sont pour des raisons similaires que pendant l’hiver, il a dormi dans les refuges qu’une quinzaine de fois.
Il explique que la cohabitation avec les autres usagers n’est pas toujours facile, certains souffrant de problèmes de santé mentale.
Le député d’Hochelaga-Maisonneuve, Alexandre Leduc, n’est pas surpris qu’une tente soit à nouveau érigée dans le secteur.
«Avec le retour du temps chaud, c’était à prévoir. Ce n’est pas un phénomène 100% nouveau. Il y en a pas mal toujours eu des campements comme ça, mais ils étaient de plus petites ampleurs, dans des endroits moins visibles».
Il se désole qu’on doive encore se battre pour l’enjeu du logement social à Montréal.
«Les annonces dans le dernier budget étaient vraiment insatisfaisantes en matière de développement de nouvelles unités. La crise du logement n’est pas prise au sérieux par le gouvernement.»
Pas pour tout le monde
Le Groupe communautaire L’Itinéraire pourrait permettre à Yan d’avoir accès à un logement social, mais ce dernier préfère s’en passer à cause des restrictions. Il affirme qu’il ne pourrait pas fumer la cigarette ou inviter sa blonde à coucher dans ce genre de logements.
«Yan est une personne excessivement intelligente, mais ce n’est pas quelqu’un que tu enfermes entre quatre murs, raconte le directeur général de L’Itinéraire, Luc Desjardins. Pour lui, la liberté, c’est carrément d’être dehors.»
Selon lui, loger ces personnes ne suffit pas, il faut aussi les accompagner dans ce processus.
«Une personne dans la rue n’est pas toute seule. Il y a les autos, le regard des gens, le monde qui l’envoie promener, lui fait un sourire ou lui donne un 25 cents.»
Une fois en logement, elle peut perdre ces contacts humains, ce qui peut créer un sentiment de solitude et d’insécurité, explique-t-il.
Une cohabitation difficile
Selon Alexandre Leduc, la grande visibilité du campement Notre-Dame a créé des défis d’acceptabilité sociale en 2020.
«Pour le vivre ensemble, la solution passe par un meilleur financement des organismes communautaires et il faut éviter une concentration de tentes comme l’année passée», affirme le député de Québec solidaire.
Pour Luc Desjardins, la solution passe par un encadrement de cette réalité.
«Si le communautaire et les services sont présents de façon structurée, on peut établir un lien de confiance et accompagner ces personnes vers des solutions alternatives, au lieu d’utiliser la répression.»
L’ami de Yan craint d’ailleurs l’intervention de la police, ce qui fait qu’il n’a pas osé encore installer sa tente. Des agents de police leur auraient d’ailleurs rendu visite au cours des derniers jours.
«Ça s’est très mal terminé l’opération l’an passé avec l’anti-émeute et la police montée, se remémore M. Leduc, mais il faut que je souligne l’excellent travail du poste de quartier.»
Il affirme que les policiers du quartier ont fait un travail de proximité extraordinaire l’été dernier, adoptant une bonne approche et en collaborant avec les gens.
Le porte-parole de l’opposition officielle à la Ville de Montréal en matière d’itinérance, Benoit Langevin, reproche à la mairesse de Montréal, Valérie Plante, de manquer de leadership sur cette question dans le cadre de la pandémie, ce qui fait en sorte qu’on se retrouve avec les conditions idéales pour la présence de campement, comme celui sur Notre-Dame l’année dernière ou encore, celui qui a fait récemment son apparition dans le boisé Steinberg.
Interrogé par Métro, la Ville de Montréal a déclaré qu’avec l’arrivée des températures plus clémentes, elle est consciente que «certaines personnes en situation d’itinérance pourraient décider de dormir à la rue ou sous une tente».
La Ville affirme collaborer avec ses partenaires communautaires et institutionnels, afin d’intervenir de façon «graduelle et humaine» auprès de ces personnes en les référant à un programme ou une ressource répondant à leurs besoins.
Cet article a été modifié depuis sa publication afin d’inclure les réponses de la Ville de Montréal et du porte-parole de l’opposition officielle.