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Filiale 173 de Montréal-Est: deux vétérans honorés de la Médaille du sacrifice

L’adjudant Stéphane Legault a remis la médaille au vétéran Mario Fortin. À droite, Stéphane Charbonneau et son fidèle chien de service, Caporal Blitz. Photo: Amélie Gamache / Métro Média

Le courage de deux vétérans, dont le président de la Filiale de Montréal-Est de la Légion Royale Canadienne a été salué par l’octroi de la Médaille du sacrifice lors d’une cérémonie toute en émotion et en simplicité, mercredi le 10 avril.

Créée en 2008, la Médaille du sacrifice est une distinction décernée à un militaire mort ou blessé « dans des circonstances honorables » suite à un acte hostile.

Les souvenirs douloureux se mêlaient à la fierté lors que Stéphane Charbonneau et le président local Mario Fortin sont montés récupérer leurs médailles sur la petite scène des locaux de la Filiale 173, sur la rue Dorchester à Montréal-Est.

« Ça va fermer une boucle. Quand je vais la regarder, je vais penser à mes chums qui sont morts là-bas. » – Mario Fortin

Après avoir reçu sa médaille des mains de l’adjudant Stéphane Legault, c’est en tant que président régional du regroupement Vétérans NU-OTAN que M. Fortin a remis le même honneur à Stéphane Charbonneau, ancien sergent pour la police militaire.

Un respect à géométrie variable?
Le commentateur sportif Rodger Brulotte était sur place pour rendre hommage aux deux médaillés. La cause des vétérans le touche de près, son père – qui ne voulait jamais en parler, dit-il – a fait la Deuxième Guerre mondiale. Son grand-père était sur le champ de bataille lors de la première.

« On fait des héros avec des joueurs sportifs, s’exclame-t-il.  Ça me frustre d’entendre une équipe professionnelle de sport dire qu’elle s’en va à la guerre. Ils ne savent pas c’est quoi, la guerre. Je trouve que c’est un manque de respect pour nos soldats. »

Selon lui, les militaires ne sont pas reconnus à leur juste valeur au Québec, où on ne connaît pas leur histoire, un constat partagé par M. Fortin.

« À Québec, on a fait un cortège pour emmener un de nos frères d’arme au cimetière, et tout le monde nous coupait, cite-t-il en exemple.  La même affaire, en Ontario, tout le monde se tassent, le monde débarque. Il n’y a aucun respect tant ici que ça ne touche pas leur famille. »

L’Afghanistan a eu peu changé les choses, selon lui, mais beaucoup de travail à faire en ce sens.

Mario Fortin : « L’odeur du bois brûlé me rappelle la Bosnie »
En 2004, Mario Fortin, alors sergent d’armes, escortait un ministre turc dans un convoi en route vers Kandahar, en Afghanistan. Le camp américain où ils se sont arrêtés s’est retrouvé la cible de bombardement.

« Il y avait de la boucane partout, des roches qui revolaient, se souvient-il. On a eu l’ordre de se replier et de quitter les lieux. J’ai vécu plus que ma part de bombardements »

Après avoir reçu un diagnostic de choc post-traumatique avancé, il a malgré tout continué son service pendant plusieurs années.

En plus d’avoir été déployé en Afghanistan, l’ancien adjudant, qui cumule 35 ans de service, a effectué plusieurs missions en Bosnie. Il était entre autres présent lors du massacre de Srebrenica, où 8 000 hommes et adolescents bosniaques ont perdu la vie en juillet 1995 durant la guerre de Bosnie-Herzégovine.

« L’odeur…, commence-t-il, avant de marquer une pause. À Sarejevo, on a dû plusieurs fois déterrer des cadavres. L’autre jour, je me suis vomi le cœur juste à sortir de la viande avariée d’un frigidaire. Le bois brûlé me rappelle la Bosnie. Ils brulaient tout là-bas. »

Un traumatisme quelque peu adouci par la reconnaissance officialisée par l’obtention de la Médaille du sacrifice, mais dont les séquelles le suivront encore « jusqu’aux derniers jours. »

Stéphane Charbonneau : « Je revis ça continuellement. »
Les faits d’armes pour lesquels Stéphane Charbonneau a été honoré remontent à 2007, alors qu’il était responsable de la sécurité sur les aéronefs. Il était seul armé à bord d’un avion venu débarquer du personnel civil près de Mazâr-e Charîf, en Afghanistan, lorsqu’ils ont reçu les premiers tirs.

« Tous ceux qui étaient débarqués ont dû rembarquer d’urgence dans l’avion, raconte-t-il. Je retournais le feu pour couvrir le personnel pour qu’ils puissent fuir. »

L’opération fût réussie. Une fois les civils en sécurité, il est retourné à la course vers l’avion, toujours sous les tirs. Le pilote dû décoller très rapidement, et le jeune sergent, n’ayant pu rejoindre sa place et s’attacher, a « rebondi comme une balle de ping-pong dans l’avion. »

Résultat, deux hernies discales, commotion cérébrale et traumatisme crânien, en plus d’un diagnostic de syndrome de stress post-traumatique.

« Je fais encore des cauchemars tous les soirs, confie-t-il. Les corps des 14 décès en 2017, c’est moi qui les ai ramassés. Je les connaissais. Je revis ça continuellement. »

La Médaille met un baume sur une fin de carrière dont il est très fier, mais qui laisse un goût aigri. « Quand on a vu que je n’étais plus apte à travailler, on m’a vraiment tassé, juge-t-il. Mais je ne m’attendais pas à mieux. »

Les souvenir le hantaient au point de rendre les interactions sociales difficiles. Depuis, son fidèle chien de service, Caporal Blitz, le suit partout, et lui permet de sortir davantage de chez lui.

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