La rivière des Prairies asséchée
Le 18 juillet dernier, un marcheur a découvert des ossements humains sur les berges de cette rivière près de l’intersection du boulevard Gouin et de la 101e Avenue. Or, cette partie des berges semble normalement recouverte d’eau durant l’été.
Ce phénomène serait attribuable au faible débit d’eau qu’un hiver peu neigeux et un été sec ont provoqué. Sans cette combinaison de facteurs, les ossements n’auraient peut-être jamais été retrouvés.
« C’est sûr qu’il y a possiblement des portions des berges qui se trouvent présentement à l’air libre qu’on n’a jamais vu exondées [asséchée ou émergée] dans le passé », admet sans étonnement Marc Simoneau, biologiste à la direction du suivi de l’état de l’environnement du ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs.
« C’est des conditions vraiment exceptionnelles, on ne se le cache pas. On a connu un hiver qui n’était pas très neigeux, on a connu un printemps qui était hâtif, qui était chaud, qui était sec. L’été a emboité le pas avec également des conditions exemplaires de température de chaleur. »
Les neiges peu abondantes n’ont pas pu, en fondant, alimenter les nappes phréatiques qui à leur tour alimentent les eaux de surface. « Les niveaux très faibles qu’on a actuellement sont amplifiés par le fait qu’il y a beaucoup d’ensoleillement à température très chaude, donc beaucoup d’évaporation de l’eau également. »
Le faible débit d’eau n’était donc pas seulement visible à l’œil nu, alors que le lit de la rivière des Prairies s’était rétréci pour faire place à une terre craquelée rappelant les pires images de sécheresse. En 42 ans d’observation, jamais les scientifiques n’ont fait état d’un aussi faible débit.
« Le débit actuel de la rivière des Prairies est autour de 485 m3/seconde, indique le biologiste, au moment de l’entrevue, le 2 août dernier. Et ça, ça se situe sous les niveaux minimums historiques pour la période. Normalement, à ce temps-ci de l’année, on devrait avoir un débit qui serait de l’ordre de 800 m3/seconde. »
Un record historique absolu a même été enregistré le 31 juillet, alors qu’il était de 458,1 m3/seconde. Du jamais vu.
Les orages n’y changent rien
Même si les nuages se sont fait rares au courant de l’été, des précipitations abondantes ont tout de même déferlé sur la région. Il y aurait donc eu autant d’eau tombée au sol que tous les étés. Cet apport d’eau est toutefois passager et n’aide pas la rivière à recouvrer son débit normal.
L’orage va « causer une réponse du cours d’eau qui va augmenter son débit, mais ça va être de très courte durée, prévient M. Simoneau. 24 ou 48 h après, les précipitations vont redescendre à des niveaux très faibles.
« Pour qu’il y ait une recharge importante, il faudrait qu’il tombe de la pluie pendant au moins une bonne semaine pour pouvoir vraiment permettre au cours d’eau de récupérer. »
En outre, le fait que les sols de Montréal et de Laval soient fortement asphaltés provoque un ruissellement de surface et non pas une recharge des nappes phréatiques nécessaire pour alimenter les cours d’eau.
Des conséquences
Bien que de telles variations soient normales et cycliques, plusieurs conséquences découlent de cette baisse du niveau de la rivière des Prairies.
Ainsi, l’eau fortement réchauffée par le soleil provoque plus de stress sur les organismes aquatiques.
Par ailleurs, les municipalités qui déversent les eaux usées et traitées s’attendent à un débit minimum dans les cours d’eau. De cette façon, les eaux rejetées sont mieux diluées et moins stagnantes.
Certaines bactéries, comme les coliformes fécaux, peuvent alors se retrouver en plus grand nombre dans la rivière. Les baigneurs doivent donc redoubler de prudence pour ne pas être contaminés.
Le biologiste ne s’inquiète cependant pas outre mesure. La situation devrait normalement se rétablir, à tout le moins lorsque le débit de la rivière sera redevenu normal. Selon lui, aucune conséquence durable n’est à prévoir.
Les relevés de la station hydrométrique sont disponibles ici.
