La guerre civile n’est jamais loin au Nicaragua
Plus de 300 personnes ont été tuées depuis avril dans des combats entre des opposants au président du Nicaragua, Daniel Ortega, et les forces fidèles au gouvernement. Cette révolte populaire pourrait être dangereuse, selon le consultant en droits de l’Homme Uriel Pineda.
Le Nicaragua est en train de s’enfoncer dans une dangereuse spirale de violence et d’impunité», affirmait le Haut-Commissariat de l’ONU pour les droits de l’Homme, plus tôt ce mois-ci. Uriel Pineda a répondu aux questions de Métro, au 100e jour de la révolte populaire.
Comment pourrait-on décrire la situation au Nicaragua?
Le conflit s’enfonce de plus en plus. Les manifestations spontanées, les barricades et l’obstruction des routes par l’opposition ont été violemment réprimées par la police et par des groupes qu’on considère comme paramilitaires. La mobilisation, la coordination et l’acquisition d’armes à feu par ces groupes ont été facilitées par le gouvernement du président Ortega afin d’intimider la population, en collaboration avec la police nationale.
Le gouvernement d’Ortega avait, au début des manifestations, accepté de discuter d’une amélioration du processus démocratique, ainsi que du renforcement institutionnel de la Cour suprême, mais il n’en a maintenant plus l’intention.
Qui soutient d’Ortega?
Les alliés d’Ortega sont concentrés dans l’appareil étatique. Il y a des gens dans la fonction publique qui défendent leur emploi et qui sont obligés de participer à la répression. Je ne considère pas le support du Congrès comme valide car Ortega contrôle la majorité des députés. De plus, les entités qui étaient restées neutres, comme l’Église et la communauté d’affaires, demandent aujourd’hui la démission d’Ortega.
Est-ce qu’on pourrait parler de guerre civile?
Ce qui se passe au Nicaragua est quelque chose d’unique. Daniel Ortega voit les manifestants comme ses ennemis. Des vidéos sont partagées sur les médias, où on voit les paramilitaires parler comme s’ils combattaient dans une guerre. C’est une guerre contre des gens sans armes, qui défendent leur droit de manifester. En mai, l’armée a déclaré sa neutralité, mais cette volonté de rester hors du conflit fait le jeu du régime: l’armée est la seule force capable d’arrêter le massacre.
Comment cette crise pourrait-elle être résolue?
Il y a des étapes importantes à franchir. Daniel Ortega a montré qu’il ne démissionnera pas et ne partagera pas le pouvoir. Les attaques contre le peuple du Nicaragua pourraient mener à une guerre civile, mais une sortie de crise pourrait aussi provenir de la communauté internationale, qui a la possibilité de mettre plus de pression pour qu’Ortega démissionne. De son côté, le président espère une situation comme celle du Venezuela, où le conflit semble s’être calmé, pour l’instant.