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La filière yéménite

Un jour, il y a longtemps, Oussama ben Laden aurait confié à son garde du corps que, si Al-Qaïda devait abandonner l’Afghanistan, ce serait pour trouver refuge au Yémen. C’est peut-être fait. Avec ses montagnes trouées de grottes, l’«Arabie heureuse», comme on l’appelait dans l’Antiquité, abriterait déjà plusieurs centaines de membres de la nébuleuse islamiste.

Pour Jean-Pierre Filiu, professeur associé à l’Institut d’études politiques de Paris, il n’y a aucun doute là-dessus : Al-Qaïda «s’est repliée au Yémen, d’où elle prétend désormais défier l’Amérique». L’auteur des Neuf vies d’Al-Qaïda croit que l’organisation est à bout de souffle. «Al-Qaïda n’a jamais retrouvé la puissance qu’elle détenait à l’ombre du régime taliban lors du 11 septembre. En fait, l’horreur provoquée dans le monde islamique par les attentats de New York et de Washington a suscité un profond rejet de Ben Laden et de son organi-sation, rejet accentué par les méthodes totalitaires d’Al-Qaïda à l’encontre de tous les musulmans qui ne partagent pas ses orientations.» (échange de courriels)

Sous pression en Afghanistan et au Pakistan, pratiquement éliminé d’Irak, le réseau de ben Laden est au pied du mur. Il a choisi le Yémen, car le plus pauvre des pays arabes est constamment au bord de la guerre civile. Le gouvernement d’Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis plus de 30 ans, en a déjà plein les bras pour s’occuper sérieusement des apprentis terroristes s’entraînant sur son sol. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si près de la moitié des prisonniers de Guantanamo sont Yéménites et que ce soit la branche d’Al-Qaïda au Yémen qui ait revendiqué l’attentat manqué du 25 décembre sur un vol entre Amsterdam et Detroit. Al-Qaïda s’enracine au Yémen, où est né le père de ben Laden. Washington en a pris note en fermant hier son ambassade à Sanaa, la capitale.

Déjà en 2000, les États-Unis avaient perdu 17 hommes dans l’attentat contre le destroyer USS Cole à Aden, le principal port du Yémen. Les Américains se rappellent également que des milliers de djihadistes yéménites sont allés se battre sur le front irakien. Tôt ou tard, il y aura des frappes aériennes américaines sur le Yémen. À chaque fois, cela donne des ailes à Al-Qaïda («base» en arabe) qui se serait également installée sur l’autre rive de la mer Rouge, dans la chaotique Somalie. Décidément, tout État défaillant devient une terre d’accueil pour la nébuleuse islamiste qui, ironiquement, n’a plus de véritable base.

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