Des dynamitages à ne pas prendre à la légère
Des travaux de dynamitage de la Société de transport de Montréal (STM) et pour le Réseau express métropolitain (REM) nécessitent la distribution d’avertisseurs de monoxyde de carbone à certains résidants, qui se posent des questions.
Les voisins de la tour de TVA dans le Village ont reçu récemment un drôle de cadeau: un détecteur de monoxyde de carbone accompagné d’un prospectus inquiétant intitulé «Danger explosifs», avec la mention plus bas «le monoxyde de carbone tue!».
«Heureusement que la distribution m’a été faite en main propre par quelqu’un qui a pris le temps de m’expliquer la situation», souligne une résidante de la rue Champlain, juste au-dessus d’un chantier de la STM. Cette dernière y construit un poste de ventilation mécanique qui permettra de quadrupler la capacité d’évacuation de la fumée en cas d’incendie dans le tunnel entre les stations Papineau et Beaudry. Jusqu’à présent, 12 des 80 postes de ventilation de la STM ont été totalement reconstruits.
Les travaux durent généralement plus de trois ans, car il faut creuser en milieu urbain un tunnel d’évacuation jusqu’au réseau souterrain de la STM. Pour le chantier à proximité de l’édifice de TVA, il faudra effectuer trois opérations de dynamitage par jour de semaine, parfois même le samedi à partir de novembre, et ce, pendant 10 mois.
Dans le document d’information fourni aux citoyens, il est indiqué que «les travaux d’excavation à l’explosif produisent généralement du monoxyde de carbone. Ce gaz [invisible et inodore] peut s’infiltrer dans votre résidence par la partie souterraine, de jour comme de nuit, et même plusieurs jours après les travaux.»
Plus loin, il est précisé que «le monoxyde de carbone est très toxique. Il peut vous intoxiquer et même vous tuer rapidement.» Si l’avertisseur fourni aux résidants se déclenche, il est recommandé d’évacuer les lieux et d’appeler le 911 ou le Centre antipoison du Québec.
La porte-parole de la STM, Amélie Régis, précise que, depuis le début de la mise au niveau des postes de ventilation il y a 20 ans, «à notre connaissance, aucun détecteur n’a jamais indiqué la présence de monoxyde de carbone dans les résidences avoisinantes lors des travaux».
Même son de cloche du côté de SNC-Lavalin, qui débute huit mois d’opérations de dynamitage pour relier la station de métro Édouard-Montpetit au futur REM. «Les explosifs sont très sécuritaires et leur utilisation est très règlementée», souligne Pierre Groleau, responsable du dynamitage sur le chantier pour la firme de génie et de construction. Il souligne que dans ce chantier, la qualité du roc permet d’éviter que les fumées se propagent à travers le massif rocheux. En outre, le puits principal d’excavation est entouré de plusieurs trous de grand diamètre rapprochés afin de ceinturer le périmètre à excaver.
À la Direction régionale de santé publique, le Dr Maxime Roy indique qu’un seul incident lié au dynamitage a été enregistré en marge de travaux immobiliers à l’île Bizard en 2011, sans toutefois faire de victime.
Le Dr Roy souligne néanmoins que «le monoxyde de carbone est un poison sans odeur et sans couleur et que, sans détecteur, on ne le sentira pas». Les symptômes d’intoxication qui précèdent la perte de conscience, puis la mort, sont le mal de tête ou la nausée. Ils peuvent être attribués par erreur à une migraine ou à une indigestion.
Dans le cas de la STM sur le rue Champlain, le chantier offre un défi supplémentaire: il est positionné juste en face du centre de la petite enfance La Boite à surprise, qui accueille chaque jour une soixantaine de bambins. Lors du passage de Métro, l’inquiétude ne semblait pas être de mise. En outre, les travaux de dynamitage sont a priori programmés hors des heures de sieste et un sismographe a même été installé au sous-sol.
Actuellement, au moins deux postes de ventilation mécanique sont à un stade de construction plus avancé au centre-ville. Les voisins ont aussi reçu des détecteurs de monoxyde de carbone, mais aucun de ceux visitées par Métro n’avaient vu le sien se déclencher. C’est le cas notamment au cabinet d’avocats situé au bout de la rue Towers et du restaurant Ferrari, rue Bishop.
Le restaurateur Elio Shavi souligne néanmoins que les travaux ont tué plusieurs commerces. À mi-chemin des 42 mois de travaux, la moitié des 12 commerces de cette portion de la rue Bishop étaient fermés.