Rosemont, le quartier où bat le cœur des Ukrainiens de Montréal
Quand il veulent se rassembler, les Ukrainiens de Montréal savent où aller: c’est dans Rosemont que la communauté se retrouve pour célébrer sa culture. Kim Pawliw, doctorante à l’Université Laval, s’est penchée sur la question.
Après l’Ukraine et la Russie, c’est au Canada qu’on trouve la plus grande population d’Ukrainiens. En 2011, ils comptaient pour 4% de la population canadienne, selon une étude menée par la Société canadienne d’études ethniques.
Ils seraient par ailleurs plus de 43 000 au Québec, dont 40 000 à Montréal, note le Congrès des Ukrainiens canadiens (CUC). Et c’est dans l’arrondissement de Rosemont que leur cœur bat le plus fort. Au fil du temps, le quartier est en effet devenu le point d’ancrage de la communauté sur l’île.
Des liens rassembleurs
«Il y a beaucoup d’associations ukrainiennes pour la jeunesse où les enfants peuvent aller, confie Ruslana Molostsova, bénévole à la paroisse catholique de l’Assomption-de-la-Vierge-Marie, sur la 10e Avenue. Il y a aussi une épicerie qui vend des produits du pays. On y trouve des produits qu’on aime.»
Rosemont abrite ainsi deux associations pour la jeunesse, SUM et PLAST, le parc de l’Ukraine, deux résidences pour personnes âgées et même une Caisse Desjardins ukrainienne.
«C’est une grande communauté ici. Quand on arrive ici, on essaie de s’en rapprocher», affirme Ruslana.
Alors qu’elle réside à Villeray, la femme de 51 ans explique qu’elle se rend régulièrement dans le quartier afin de «se retrouver».
«On vient ici à l’église le dimanche», ajoute-t-elle.
Car c’est bien autour de la religion que se retrouvent de nombreux Ukrainiens montréalais.
Historiquement, c’est «un peuple très religieux». «Quand ils sont arrivés, la vie locale s’est organisée autour des églises», analyse Kim Pawliw, chargée de cours et étudiante au doctorat à l’Université Laval et dont le projet universitaire s’intitule La reconstruction de la valeur symbolique d’un quartier. Étude de Rosemont en tant que «quartier ukrainien».
«Partout où ils se sont établis, [les Ukrainiens] ont développé certaines de leurs institutions, poursuit la doctorante. Les deux églises orthodoxes ukrainiennes de Rosemont, Saint-Sophie et Sainte-Marie, ont attiré davantage [d’Ukrainiens] dans le quartier.»
Selon le prêtre Ihor Oshchipko, la paroisse catholique de l’arrondissement compte environ 2000 familles à elle seule, sans compter les deux paroisses orthodoxes qui se trouvent à Rosemont.
Un repère pour la communauté
Même si de nos jours, la communauté ukrainienne se retrouve «de plus en plus dispersée» comme le souligne Kim Pawliw, Rosemont reste son repère.
Le samedi matin, c’est là que les enfants peuvent venir apprendre la langue de leur pays d’origine, dans des écoles ukrainiennes.
C’est aussi dans ce même quartier que l’on se retrouve chaque année depuis 1999 pour le Festival ukrainien de Montréal. Cet événement de trois jours célèbre la culture du pays avec des danses traditionnelles, un spectacle de mode, des kiosques divers où l’on peut trouver des spécialités ukrainiennes. Une façon pour les nombreux Ukrainiens de Rosemont – et au-delà – de célébrer leur culture et la faire vivre dans leur pays d’accueil.
Comment les immigrants ukrainiens se sont rassemblés à Rosemont?
La troisième vague d’immigration ukrainienne au Canada, après la Seconde Guerre mondiale, a été la plus urbaine. De plus en plus d’Ukrainiens ont ainsi commencé à délaisser l’ouest au profit de l’Ontario et du Québec.
À Montréal, si les deux premières vagues de la diaspora ukrainienne se sont concentrées à Pointe-Saint-Charles, à Lachine et au centre-ville, l’installation de celle-ci à Rosemont – la banlieue de Montréal à l’époque – est quant à elle arrivée dans les années 1950, en grande partie grâce aux habitations plus abordables.
«Les logements étaient moins dispendieux et de meilleure qualité que dans les quartiers ouvriers. Pour les Ukrainiens, c’est important d’être propriétaire», analyse Kim Pawliw.
L’accès à la propriété a donc été une motivation forte pour les Ukrainiens, soutient Mme Pawliw. Pour certains, qui offraient leur bien immobilier en location, cela représentait une autre source de revenus.