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Être un punching bag

Vous avez probablement entendu parler de ce qui est arrivé à l’animatrice de télé Saskia Thuot la semaine dernière. En guise de rappel, voici ce qu’elle a publié sur sa page Facebook jeudi passé:

D’abord, posons-nous la question: qui donc s’est permis de lui envoyer ce message? Vous n’en avez aucune idée? Moi non plus. La principale intéressée ne le sait probablement pas davantage. À l’ère du virtuel et des pleutres qui viennent avec, on présume que le tout était signé d’un pseudonyme.  Dans le genre Gratien52 ou BébéPinotte. N’importe qui, donc. Un nobody dans tous les sens du terme…

Interrogeons-nous alors sur le pourquoi de la chose. À savoir sur ce besoin irrépressible de communiquer à tout prix ce qui vient tout bonnement de nous passer par l’esprit. Mieux encore, de partager son impression avec la personne visée sans la moindre forme de retenue.

On pourra arguer que quiconque choisit de travailler dans la sphère publique accepte, dès le premier jour, de s’exposer à tout. À l’admiration comme au mépris, pour le meilleur et pour le pire. En risquant d’être le king du jour et le punching bag du lendemain. Eh ben, désolé pour ceux qui pensent ainsi, mais mon œil!

Admettons que vous êtes comptable. Seriez-vous tenu de vous faire écœurer à propos d’un détail qui n’a rien à voir avec votre travail en comptabilité? Comment réagiriez-vous si, après avoir consciencieusement accompli votre boulot au bureau, vous receviez un courriel anonyme passant des commentaires sur votre apparence, sur vos vêtements ou à propos de la courbure de votre nez? Laissez-moi deviner… Premièrement, vous en seriez dérangé. «Blessé» serait probablement le mot le plus juste. C’est là que vous commenceriez à vous demander qui peut être assez bête – et méchant – pour prendre la peine de vous écrire des affaires du genre sans aucune forme de ménagement. En suspectant tout votre entourage, vous essaieriez vainement de deviner qui peut bien avoir envie de vous planter un canif dans les côtes pour vérifier votre seuil de tolérance à la douleur. De guerre lasse, vous seriez pris pour encaisser le coup en gardant tout ça «en dedans». Même si… On y revient toujours: oui, des mots peuvent faire mal.

Pour ce qui est de Saskia Thuot (une femme fort compétente dans ce qu’on lui demande de faire et qui est indiscutablement superbe), elle vient de mettre le doigt sur un problème qui accable ou qui est susceptible d’accabler toutes les personnes qui disposent d’une plateforme médiatique. Que celles-ci se fendent en quatre pour faire leur job de manière irréprochable ne suffit plus. Il leur faut aussi faire avec cette hypothèque publique. Celle qui ne s’efface pas. Celle «qui vient avec la job».  Que j’aimerais donc croiser le génie qui a, un jour, osé statuer que ça venait avec la job de se faire écœurer de la sorte…

Ça prend combien d’années d’études pour devenir un punching bag? Toujours trop.

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Vu: deux autres bons spectacles de la saison théâtrale à Montréal. D’un côté, les 30 ans d’Albertine, en cinq temps, de Michel Tremblay  (au TNM jusqu’au 10 avril), et de l’autre, la création de Testament, d’après un texte de Vickie Gendreau (au Quat’Sous jusqu’au 30 mars).  Deux univers on ne peut plus différents, des époques qui n’ont rien à voir et pourtant, une trame de détresse étrangement semblable. Fort émouvant dans les deux cas.

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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