Contrer l’effet pont Champlain
Les soirs de match de Canadien, lorsque vous passez sur le pont Champlain, vous ne pensez pas vraiment au fait qu’il ne tient plus debout puisque, ne tenant plus debout lui non plus, le septième défenseur de Canadien se fait contourner comme un cône par le petit nouveau rappelé des mineures du club adverse, et cela occupe votre esprit, qui lui écoute Canadien à la radio.
N’empêche que. Canadien ne joue pas tous les soirs. Lorsque vous passez sur le pont Champlain, que Canadien ne joue pas et que la radio est fermée, souvent, vous et votre esprit ne pensez qu’au pont qui pourrait se tordre et s’effoirer. Vous allez parfois même jusqu’à prier. Généralement, ensuite, vous vous trouvez tata. D’avoir prié. On est d’accord avec vous.
Ce avec quoi nous ne sommes pas d’accord, toutefois, c’est la nouvelle idée du gouvernement fédéral en matière de pont. En fait, si tout va bien et que le pont Champlain ne tombe pas de lui-même d’ici à ce qu’on le démolisse, ils le démoliront pour le recycler et le vendre pour ses pièces. Comme un char.
Une question s’impose: de quoi est-il fait, le pont Champlain? Principalement de béton et d’acier. Mais on s’en sacre, Canadien n’est pas fait en béton, nous dites-vous. C’est vrai; mais en acier, oui. Un peu, en tout cas. Et ça, ça craint.
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Pogner (et péter) le poteau
C’est que les lames qui font que Canadien patine vite en zone neutre sont faites d’acier, tout comme les poteaux sur lesquels atterrissent les slapshots ballounes de Emelin lorsqu’ils se rendent jusqu’au but.
Imaginons maintenant un peu ce qui pourrait arriver. Disons que le pont tienne miraculeusement debout jusqu’à tant qu’on le démolisse. Il sera par la suite débâti et pourra être recyclé, notamment en lames de patin et en poteaux de but. Éventuellement, un soir quelconque au Centre Bell, disons un mardi d’hiver alors que la Floride est en ville, ce sera 22. Plekanec entrera hors l’aile et sentira monter en lui la feinte du siècle. Il fera un pivot, coupera sec au net et sa lame de patin pont Champlain pétera, il se tordra le genou et se blessera pour six mois. Le jeu reprendra, Desharnais remportera la mise au jeu et passera à Subban à la pointe qui décochera un boulet directement sur le poteau, la rondelle déviera dans le but, mais fracassera au passage le poteau pont Champlain en deux. À la reprise, on verra clairement la rondelle pénétrer dans le but, mais seulement après que le poteau droit de celui-ci se fut fendu en deux, avec comme résultat une cage ne correspondant plus à la définition ontologique d’un but de hockey. L’arbitre tranchera: la rondelle est rentrée dans un but qui n’en était plus un.