Turcot: le chantier de la démesure
Guy Rivard, coordonnateur à la réalisation des travaux au MTQ, nous fait faire le tour du propriétaire. On roule sur un chemin de terre cahoteux au pied de la falaise Saint-Jacques pour se retrouver au cœur des travaux de réaménagement de la cour Turcot. On assiste à un ballet de pelles mécaniques et autres véhicules lourds.
Dans la cour, des montagnes de terre, de pierre et de morceaux de béton s’accumulent. C’est que les voies de circulation du futur complexe autoroutier seront aménagées sur remblai. «Il en faudra de 2 à 3 millions de m3, note Guy Rivard. On en accumule depuis 2010. Il y en a présentement 1,2 million de m3.» Les matériaux proviennent de divers chantiers de la métropole.
Une quinzaine d’entreprises ont la responsabilité des nombreux chantiers. «Tous les lundis après-midi il y a une réunion de coordination», souligne M. Rivard, qui nous conduit près d’une nouvelle bretelle qui fera le lien entre les autoroutes 15 et 20. Il pointe son enveloppe en acier galvanisé. «Ce sera comme ça pour l’ensemble des structures. C’est plus coûteux mais plus durable, indique-t-il. L’objectif du MTQ pour les nouvelles structures est toujours d’une durée de vie de 75 ans.» Inauguré en 1967, l’échangeur a moins de 50 ans. Ses structures en béton sont déjà arrivées au terme de leur vie utile.
Prendre de l’avance
Le projet de 3,67G$ inclut notamment la reconstruction de l’échangeur Turcot par où passent chaque jour 300 000 véhicules.
On reconstruira aussi des tronçons des autoroutes 15, 20 et 720. On déplace des voies ferrées. On détourne sur une distance de 800 mètres le collecteur Saint-Jacques qui dessert 140 000 résidences.
Le consortium KPH Turcot, qui réalisera les infrastructures principales, a pris possession du chantier le 27 mai.
Le MTQ effectue toutefois depuis 2011 plusieurs travaux préparatoires. Et ça se poursuivra jusqu’en 2017. Plus d’une dizaine de structures incluant des ponts d’étagement destinés à accueillir les futures voies autoroutières ont été construites.
Parmi les travaux préparatoires, on construit tout juste à l’est de l’échangeur Turcot trois tunnels ferroviaires dont la longueur varie de 87 à 108 m. Afin qu’ils puissent résister à un séisme, ils sont solidifiés par 1014 pieux enfoncés à plus d’une douzaine de mètres de profondeur, dont 2,5 m dans le roc. Chaque pieu est assez robuste pour supporter le poids de 335 automobiles.
Excavation
Une bande verte d’une largeur de 30 mètres sera aménagée au pied de la falaise Saint-Jacques. Les voies ferrées et les voies de l’autoroute 20 seront déménagées vers le nord. Le MTQ prévoit aussi une emprise pour l’ajout d’une éventuelle navette ferroviaire pour du transport collectif. La nouvelle configuration permettra de récupérer 400 000 m2 de terrains entre l’autoroute et le canal de Lachine pour le développement du «Quartier du Canal».
Le déménagement des voies ferrées se fait sur les sols instables de l’ancien Lac-à-la-Loutre. «On excave à une profondeur de 8 mètres pour atteindre un terrain solide», explique Guy Rivard.
Les travailleurs ont eu droit à une surprise en creusant. «Nous avons découvert les fondations d’une ancienne rotonde pour les trains», un bâtiment qui servait au remisage des locomotives, confie le coordonnateur.
Pendant ce temps, les automobilistes circulent dans l’échangeur au-dessus de ce vaste chantier. À terme, les voies qui ont une hauteur moyenne de 18 mètres avec un sommet à 30 mètres seront démolies quand les nouvelles auront été construites en dessous. Leur démolition constituera une opération délicate. «Ça va être de la chirurgie», anticipe Guy Rivard.
Le chantier Turcot doit être complété en 2020.