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Un doctorat en bandes dessinées

Photo: Metro World News
Dmitry Belyaev - Metro World News

L’expert de Tintin, Benoit Peeters, premier professeur spécialisés en bandes dessinées deviendra responsable d’un nouveau programme de doctorat à l’Université Lancaster.

Les amateurs de BD peuvent maintenant étudier leurs personnages préférés, comme Tintin, et même obtenir un doctorat pour le faire. L’Université Lancaster a recruté Benoit Peeters, auteur de romans graphiques français et expert de Tintin, pour diriger son nouveau programme de doctorat dédié à cette forme de littérature populaire. Durant son mandat initial de trois ans, il sera appelé à analyser l’histoire des BD, à superviser des ateliers d’écriture créative et à être le mentor des étudiants. «La priorité n’est pas de former de futurs bédéistes, mais de les familiariser avec un médium qui est parfois assez dénigré», a affirmé M. Peeters en entrevue avec Métro.

D’abord et avant tout, que fait un professeur spécialiste des bandes dessinées?
Présenter l’art des BD dans toute sa diversité. C’est le bon moment pour une telle nomination, car la bande dessinée évolue de manière fascinante partout dans le monde, notamment avec les romans graphiques. Mon approche sera historique. Je vais parler de différentes traditions : principalement le travail des Franco-Belges, des Anglo-Saxons et des Japonais. Je vais aussi m’intéresser à l’œuvre d’auteurs plus anciens (comme Rodolphe Töpffer, Winsor McCay ou Hergé) et contemporains (Posy Simmonds, Alan Moore, Chris Ware, Otomo). Je vais essayer de mettre en lumière la relation entre BD, dessins animés, littérature, photographie, cinéma et images numériques.

«[Durant mes études universitaires], j’ai étudié [Les bijoux de la Castafiore] avec le même soin et la même passion que s’il avait été question d’un classique de la littérature ou un grand film.» -Benoit Peeters, directeur du doctorat en bandes dessinées de l’Université Lancaster, au Royaume-Uni

Ce n’est donc pas seulement un atelier de dessin?
Mon objectif n’est pas de former des bédéistes, mais bien d’enseigner les fondements de la BD et son langage. Je vais aussi diriger des ateliers d’écriture créative, qui permettront d’apprendre comment écrire pour créer une bande dessinée, créer un scénario-maquette, etc. Ces ateliers permettront aux étudiants d’avoir une vision plus pratique et leur permettront de collaborer avec un bédéiste. Les BD sont un mélange d’art et d’artisanat et requièrent différents talents : savoir raconter, dessiner, colorer, mais aussi des aptitudes en création de costumes, en décoration et en jeu d’acteurs.

En quoi tout cela se rattache-t-il à votre propre expérience scolaire?
Quand j’étais étudiant dans les années 1970, étudier la BD ne faisait pas partie des programmes offerts dans les universités françaises. J’ai été cependant assez chanceux pour travailler avec le [philosophe] Roland Barthes, qui s’intéressait à différents sujets et accueillait des étudiants qui n’arrivaient pas à trouver leur place. C’est ainsi que j’ai terminé mes études avec un essai sur Les bijoux de la Castafiore de Hergé, qui est selon moi la meilleure des aventures de Tintin. J’ai étudié cette BD avec le même soin et la même passion que s’il avait été question d’un classique de la littérature ou un grand film. Je suis vraiment curieux de trouver quelles œuvres vont passionner les étudiants de Lancaster et je serai heureux de les découvrir ou de les redécouvrir.

À votre avis, à quel point est-ce important que les universités se dotent d’un professeur spécialisé en BD?
C’est un changement dans la bonne direction de voir que des universités s’ouvrent à d’autres sphères du savoir. Bien sûr, les bandes dessinées ont un énorme impact sur l’économie de nos jours, grâce par exemple aux adaptations cinématographiques à Hollywood : Superman, Batman, Hellboy, Spider-Man. Leur langage unique donne lieu à toutes sortes d’œuvres – du plus amusant au sérieux, pour les enfants ou les grands. Vous pouvez trouver des romans graphiques autobiographiques, qui traitent d’un fait réel ou des histoires plus intimistes.

Après que les étudiants auront été diplômés, que pourront-ils faire comme travail?
La priorité n’est pas de former de futurs bédéistes, mais de les familiariser avec un médium qui est parfois assez dénigré. Je pense qu’étudier les BD peut être d’intérêt tant pour des étudiants en art, en cinéma ou en littérature et, pourquoi pas, ceux qui étudient en philosophie ou en économie. Si certains d’entre eux décident de créer des bandes dessinées, c’est encore mieux.

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