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Walmart vous veut du bien

Mes hommages. Vous arrive-t-il d’avoir le caquet au troisième sous-sol quand vous faites vos emplettes? Assurément. Le caquet qui se jette par la fenêtre ne choisit pas toujours le confort du salon pour s’exprimer en nos commissures pointées vers le bas. Je vous pose la question (hurlez la réponse, peut-être suis-je assise sur le banc d’autobus juste derrière vous) puisque le Wall Street Journal nous apprenait récemment que Walmart avait déposé une demande de brevet pour une technologie de reconnaissance faciale.

La chose me procure déjà frissons aux paupières mobiles. Mais Walmart ne veut pas seulement vous reconnaître la bette pour vous envoyer des mots doux par la malle; ce qu’elle espère, en fait, c’est être en mesure, par un robot qui sait interpréter le feeling des prunelles et l’expression générale du visage, de détecter les clients malheureux en ses magasins. «Repérer les clients tristes comme un jour sans pain? Mais quelle formidable idée!» Vite de même, peut-être; après tout, QUI ne rêve pas de ce monde où les dames qui poussent des paniers remplis de rouleaux d’essuie-tout jumbo et de côtes de bœuf qualité «je peux pas croire que j’ai trouvé une si belle pièce de viande icitte» vivent des courses noyées dans un bonheur comme on ne les vit que dans les commerciaux de piscines réduites à 50%? L’idée derrière la prétendue bonté du géant mondial, c’est plutôt d’identifier les magasineux insatisfaits de leur expérience chez Walmart pour être en mesure d’alerter les petits vendeurs sur le plancher afin qu’ils filent illico vers lesdits clients en beau calvince pour remédier à la situation sur-le-champ. Pas pour s’assurer que Sylvie n’a pas d’idées noires dans l’allée des cordes et des tabourets. Mais plutôt pour s’assurer que Sylvie, qu’importe son état d’esprit, ne quittera pas les lieux sans avoir acheté des affaires.

Parce que ce qui est ben fatigant pour un magasin, quand un client n’est pas heureux, c’est qu’il n’achète pas de petites affaires et que, pis encore faisant, il ne revient jamais acheter de petites affaires, pétri de son expérience négative. La demande de brevet est bien claire : «C’est plus facile de retenir un client actuel que d’en acquérir un nouveau, mais si le service est inadéquat, on ne le saura pas tant qu’on n’aura pas perdu ce client.»

Au diable la détresse de Jacques qui achète compulsivement des tévés pour remplir les beaux jours de sa dépression. Oh hell! La détresse de Mme Blanchette qui fait son marché sur sa deuxième carte de crédit en se demandant ça prend combien de paquets de fusillis pour tenir le mois. On ne veut pas des clients heureux; on veut des clients QUI NE NOUS QUITTENT JAMAIS. La v’là, la définition du bonheur! Du monde au regard guilleret devant un présentoir de crème de tomates.

Dieu (celui que tu veux) bénisse la technologie et, surtout, la bienveillance des multinationales qui, qu’importe la brise, prennent soin de nous autres, le monde qui feele pas.

La bise.

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