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Des femmes sans papiers réclament leur place dans le programme fédéral de régularisation

Comité Femmes du Centre de travailleuses et travailleurs immigrants (CTTI) situé au quartier de Côte-des-Neiges à Montréal. Sur la photo (de gauche à droite): Loreto Morales, Samira Jasmin, Susana Ponte-Rivera, Benita Martinez, Bénédicte Carole Ze, Marie Boti, Nina Gonzalez et Rita Acosta. Photo: Karla Meza, Métro

Des travailleuses sans statut et des représentantes d’organismes ont uni leur voix le 7 mars pour mettre en lumière les conséquences de l’absence de statut d’immigrant pour les femmes et exiger que le programme fédéral de régularisation de travailleurs sans papiers, actuellement à l’étude, soit inclusif.

«Pour le 8 mars, Journée internationale des femmes, il nous parait crucial de rendre justice aux femmes immigrantes qui vivent dans la double crainte d’être à la fois déportées et abusées», a déclaré le Comité Femmes du Centre des travailleuses et travailleurs immigrants (CTTI) à Montréal, où se tenait le rassemblement.

«Nous saluons nos sœurs qui sont décédées en luttant pour nos droits, victimes d’employeurs abusifs ou de partenaires violents. Nous saluons aussi celles qui continuent à souffrir et à mourir parce que nous vivons dans un système d’oppression qui discrimine les femmes sans statut et à statut précaire», a ajouté Bénédicte Carole Ze.

«Nous sommes ici pour dire que ça suffit !», s’est exclamée la travailleuse de la santé, dont le statut a été régularisé grâce au programme du gouvernement québécois pour les «anges gardiens», mis en place durant la pandémie.

Coférence de presse pour la régularisation des femmes sans statut au CTTI à Montréal le 7 mars. Photo : Karla Meza, Métro

Vulnérabilité des femmes à statut précaire

Le Comité Femmes du CTTI déplore que des milliers des femmes à travers le Canada perdent chaque année leur statut temporaire en raison des violences qu’elles subissent. Ces dernières pouvant se faire retirer le parrainage par leur conjoint violent, se faire congédier illégalement par leur employeur ou encore être obligées de quitter leur emploi pour fuir l’abus ou le harcèlement sexuel en milieu de travail.

«Il doit avoir une prise de conscience par rapport à la situation des femmes à statut précaire et sans statut dans notre société. Nous demandons que justice et réparation soient faites pour tout ce qui a été fait et continue d’être fait à ces femmes», a renchéri Mme Ze.

«Nous sommes choquées et attristées du traitement que ces femmes doivent subir aux mains d’employeurs sans scrupules et de gouvernements complaisants. Cela doit cesser», a indiqué pour sa part Marie Boti, membre fondatrice du Collectif Femmes de diverses origines.

Si elles sont assez bonnes pour travailler, elles sont assez bonnes pour rester ici, avoir les mêmes droits et avoir accès à des services comme tout autre [citoyen]. Ce ne sont pas que des bras que pour travailler, ce sont des êtres humains.

Marie Boti, vice-présidente de l’Alliance internationale des femmes.

Revendications du Comité Femmes CTTI

Dans le cadre de sa campagne de régularisation, le Comité Femmes CTTI exige le droit à un salaire et à des conditions de travail dignes pour les femmes sans statut, leur droit à porter plainte pour harcèlement psychologique ou sexuel en milieu de travail, à travailler en sécurité sans craindre de subir des représailles en raison de leur statut, ainsi que leur accès à des compensations en cas d’accident de travail ou de maladie professionnelle.

«Notre système d’immigration mène systématiquement les [immigrants] à perdre leur statut, soit en rejetant leur demande d’asile ou en raison de l’expiration de leur permis de travail», souligne Nina Gonzalez, membre du comité et de l’Association des travailleuses et travailleurs temporaires d’agences de placement (ATTAP).

La perte du statut migratoire est un problème administratif, c’est pourquoi un programme de régularisation inclusif est nécessaire et urgent.

Nina Gonzalez, membre de l’Alliance internationale des migrants (IMA).
Centre des travailleuses et travailleurs immigrants (CTTI) à Montréal. Photo : Karla Meza, Métro

Soutien au plaidoyer

«Il faut nommer les barrières rencontrées par les femmes sans statut et à statut précaire, notamment le manque d’accès à l’information dans une langue qu’elles puissent comprendre, l’isolement social et l’exploitation», a exprimé Olga Houde, psychologue et juriste, coordonnatrice des Cliniques juridiques de la Mission communautaire de Montréal (MCM).

«Nous soutenons le plaidoyer et les revendications faites aujourd’hui pour permettre à toutes les femmes qui sont dans une situation d’extrême vulnérabilité, en détresse et désemparées, d’obtenir un statut permanent», a-t-elle poursuivi.

Si Mme Houde salue le programme fédéral qui permet aux femmes victimes de violence conjugale ou d’abus d’obtenir un statut temporaire, elle met toutefois l’emphase sur l’urgence d’implanter une solution pérenne pour assurer leur sécurité.

Centre des travailleuses et travailleurs immigrants (CTTI) à Montréal. Photo : Karla Meza, Métro

Le Canada complice

Marie Boti a insisté sur le fait que [la société] ne peut pas ignorer les raisons qui poussent les gens, en particulier les femmes, à quitter leur pays d’origine, dénonçant par le même biais le rôle que joue le Canada dans leur exil.   

«Le Canada est complice de la migration forcée par son implication dans les guerres, la dégradation de l’environnement provoquée par ses multinationales minières et l’inégalité de ses échanges à l’international», a-t-elle soutenu.

«À une logique utilitaire, nous proposons une logique de droits de la personne et nous rappelons notre devoir de solidarité. Nous appelons donc le gouvernement fédéral à créer un programme de régularisation permanent, inclusif et simple au niveau administratif dans le plus bref délai, ainsi que le gouvernement du Québec à y participer», a exprimé pour sa part Susana Ponte-Rivera, responsable de la mobilisation et intervenante communautaire à l’Écho des femmes de la Petite Patrie.

«L’apport des femmes sans statut à notre communauté est indéniable et il doit être reconnu. Ici, elles sont chez elles», a-t-elle lancée.

Ce texte a été produit dans le cadre de L’Initiative de journalisme local.

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