Plus de 200 000 trajets de Lime depuis août, BIXI en santé
Malgré des difficultés de stationnement documentées, l’entreprise Lime prend place à Montréal. La compagnie de trottinettes électriques a comptabilisé «plus de 200 000» trajets individuels sur l’Île depuis l’installation de ses appareils, en août.
Avec 94 jours d’activité à son actif dans la métropole québécoise, Lime a donc enregistré plus de 2100 trajets par jour. «Ça démontre que Montréal est une place avec un gros appétit pour les trottinettes», avance le gérant d’expansion chez Lime, Mathew Lobraico.
La journée la plus achalandée est survenue le 27 septembre, jour de la Grande Marche pour le climat. L’entreprise américaine a compté «plus de 3000 déplacements» ce jour-là.
Arrivée à Montréal grâce à un projet pilote, Lime retirera l’ensemble de ses trottinettes du territoire dès demain. La Ville «est en train de faire un bilan, qui n’est pas terminé», confirme l’attachée de presse du comité exécutif Laurence Houde-Roy.
Quelques accrocs
Lime a vécu des débuts difficiles à Montréal. Avant même d’obtenir son permis de service auprès de la Ville de Montréal, l’exploitant affichait d’importantes pertes financières.
Les trois derniers mois auront permis à Lime de «tirer un certain nombre d’enseignements». Sa gestion du stationnement, entre autres, en aura fait rager plusieurs. La création d’espaces réservés aux trottinettes n’a pas empêché plusieurs usagers de laisser les engins sur les trottoirs ou même… au fond du canal Lachine.
Ces incidents ont poussé Montréal à adopter la ligne dure avec l’entreprise. La ville-centre a entre autres pris la décision d’émettre des amendes auprès des exploitants de trottinettes en cas d’appareil mal garé.
«On travaille à trouver une manière d’encadrer les trottinettes de façon positive à Montréal. Pour Lime, la priorité, c’est la sécurité et l’éducation des utilisateurs», soutient M. Lobraico, qui n’a pas pu fournir à Métro la quantité d’amendes reçues par son entreprise.
Selon le professeur spécialisé en mobilité Paul Lewis, «c’est clair qu’il y a un problème de discipline inculquée aux usagers». «Il y a peut-être à revoir la localisation et le nombre des zones de stationnement. C’est l’idée d’un projet pilote», avance l’expert basé à la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal.
La compagnie Bird, un autre exploitant de trottinettes établi en septembre à Montréal, estime avoir été pénalisé environ vingt fois.
«Je pense que la Ville réalise qu’elle a besoin de plus d’espaces de stationnement, affirme le président-directeur général de Bird Canada, Stewart Lyons. Le problème, c’est que, quand quelqu’un termine un trajet, il lui arrive de laisser sa trottinette au mauvais endroit parce qu’il n’y a pas de place disponible.»
Concurrence
Bird dresse d’ailleurs un portrait positif des derniers mois. «Je suis à peu près sûr que la Ville voudra continuer à travailler avec nous», lance M. Lyons.
Le cousin éloigné de Lime a également enregistré sa meilleure journée le 27 septembre, avec plus de 2000 trajets sur le territoire. Les données totales de l’entreprise depuis le début du projet pilote sont indisponibles.
«Notre chiffre total est moins élevé que Lime. Mais il faut garder en tête que nous sommes arrivés bien après Lime et que nous avions une flotte bien plus petite», dit le PDG de Bird Canada.
Entre 15h et 21h cette année, Bird considère n’avoir rempli que 50% de la demande de trottinettes, ce qui pousse M. Lyons à croire que la flotte pourrait fortement augmenter l’été prochain.
«Pour l’année prochaine, nous avons besoin de beaucoup plus d’appareils. C’est quelque chose que nous promouvons auprès de la Ville», signale-t-il.
Lime souhaite pour sa part qu’il «y ait une trottinette pour n’importe qui qui en a besoin» l’an prochain, avance Mathew Lobraico.
Plus-value?
La présidente-directrice générale de Vélo Québec, Suzanne Lareau, ne voit pas d’un très bon œil l’ajout de trottinettes à la flotte montréalaise.
«Quelle est la plus-value dans toute l’offre de mobilité de ces engins-là? […] Si j’avais à miser sur des modes de transport, j’irais plus avec des moyens de transport plus sécuritaires, comme le vélo, ou qui permettent de faire des grandes distances, comme le transport collectif», propose-t-elle.
«C’est sûr qu’avec un nombre limité qu’on avait comme cette année, ça diminue les désagréments. Mettez-en 3000 dans les rues et vous n’aurez pas la même réaction des citoyens de Montréal» – Suzanne Lareau, PDG de Vélo Québec
BIXI se porte mieux que jamais
La performance de Lime ne semble pas avoir affecté d’autres options du cocktail transports montréalais. Après avoir enregistré des chiffres records cet été, BIXI a confirmé la tendance jeudi, en dévoilant ses chiffres pour la saison 2019.
En tout, l’organisme a enregistré 5,8 millions de déplacements malgré l’arrivée des trottinettes et des vélos JUMP de l’entreprise Uber. C’est 8% de plus que le record déjà établi en 2018.
Les vélos BIXI ont donc été utilisés en moyenne 27 000 fois par jour en 2019. En comparaison, les JUMP comptabilisaient plus de 1700 trajets par jour en septembre. La compagnie n’a toutefois pas pu fournir de chiffres mis à jour à Métro.
Cocktail de mobilité
Alors, d’où viennent les utilisateurs de trottinettes? Lime affirme que 25% de ses déplacements ont coupé directement dans les trajets automobiles à Montréal. Paul Lewis doute de cette statistique, mais favorise une ville «où il y a davantage de choix plutôt que moins de choix».
Suzanne Lareau est elle aussi sceptique. «25% je trouve ça fort, convient-elle. L’enjeu actuel, c’est comment on fait pour diminuer l’usage de l’auto. Sauf que là, on n’a aucune méthodologie. C’est au ministère des Transports de peut-être faire une enquête.»