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La pandémie, une occasion de repenser l’industrie du recyclage?

recyclage Lachine
Le nouveau centre de tri de Lachine a une capacité de traitement de 100 000 tonnes de matières par année. Photo: Josie Desmarais/Métro

La crise du coronavirus pose de nouveaux enjeux et de nouvelles réalités dans les centres de tri du Québec, particulièrement à Montréal. À plusieurs endroits, l’augmentation du volume entrant frise les 20%. Pour plusieurs acteurs dans le domaine, la pandémie est une occasion de repenser le système de recyclage. D’autres refusent toutefois cet argument un peu trop «jovialiste», et rappellent que l’industrie doit d’abord sortir de la crise.

«On a une opportunité de bâtir une économie circulaire des matières résiduelles au Québec. Tout le monde parle d’achat local, mais on doit aussi penser à un système de recyclage local efficace», explique à Métro la porte-parole d’Éco Entreprises Québec (EEQ), Yourianne Plante.

Dans un rapport qui doit paraître cette semaine, l’OBNL privé indique que la collective sélective «a démontré une grande résilience au Québec», surtout si on se compare aux États-Unis ou à l’Europe, où plusieurs systèmes de recyclage ont été partiellement, voire totalement interrompus.

«La situation est critique dans certains pays, alors qu’ici, on s’en sort plutôt bien. La cohésion entre les acteurs, c’est du jamais-vu. Ça nous démontre que pour l’avenir, on est sur des bonnes bases pour renforcer le système», avance Mme Plante.

Vers de nouveaux marchés?

Pour le responsable de l’environnement au comité exécutif de la Ville de Montréal, Jean-François Parenteau, la survie de la collecte sélective au Québec devrait permettre de nouvelles possibilités, au sortir de la crise sanitaire. «Le fait qu’on n’ait pas arrêté les activités nous a ouvert des marchés. Ça nous a donné un peu d’oxygène», raisonne-t-il. En novembre dernier, l’administration Plante a injecté 45,2 M$ pour mettre sur pied un nouveau centre de tri à Lachine.

«On s’est fait connaître. J’espère que ce sera une carte de visite, et qu’on aura profité de l’occasion pour faire reconnaître la qualité de notre produit.» -Jean-François Parenteau, du comité exécutif de Montréal

L’élu affirme que l’engouement pour l’achat local au Québec servira bien les centres de tri, surtout quand l’économie redémarra. «On peut penser qu’il y a plein de choses qui vont changer. Les gens réalisent de plus en plus l’importance d’une industrie autonome. Moi, ça me donne espoir», lâche M. Parenteau.

Même son de cloche pour la vice-présidente aux opérations de Recyc-Québec, Sophie Langlois-Blouin. «On a vu apparaître des pratiques nouvelles dans les centres de tri pendant la pandémie. Ce sont des gains qui vont rester, en plus du potentiel de traiter plus de matières localement», dit-elle.

La VP avoue toutefois que des réajustements devront être faits, certains secteurs d’activité ayant été plus affectés que d’autres. «On consomme plus à la maison, donc les centres de tri ont vu augmenter la quantité de matières. Mais au niveau des entreprises, tout a baissé. Il y a même des groupes qui ont fermé temporairement», rappelle-t-elle.

Des défis subsistent, disent des écologistes

Au Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets (FCQGED), le directeur général Karel Ménard émet plusieurs réserves.

«On entend plusieurs personnes dire que la pandémie va régler la crise du recyclage. Or, c’est techniquement impossible. Les centres de tri fonctionnent moins qu’avant avec la distanciation, et les gens mettent plus de choses dans les bacs. Pandémie ou pas, le système est inefficace», tranche-t-il.

«Les cours d’entreposage de plusieurs centres de tri n’ont jamais été aussi vides. Ça prend des mécanismes de traçabilité obligatoires, autres que ceux des gestionnaires. Sinon, on aura jamais l’heure juste.» -Karel, Ménard, du FCQGED

Chez Greenpeace, la chargée de la campagne Océans et Plastique, Agnès Le Rouzic, abonde dans le même sens. «Le lobby des plastiques a fait en sorte de rentrer dans la tête des gens que c’était la matière hygiénique pour se protéger. Cela dit, on sait qu’il y a plusieurs d’entre eux qui sont difficiles à recycler», s’inquiète-t-elle.

L’organisme appelle par ailleurs Ottawa à préciser ses intentions à l’approche de l’interdiction des plastiques à usage unique au Canada, prévue en 2021.

«Il va falloir simplifier au maximum le processus, en faisant en sorte de réduire à la source. Les déchets qu’on n’est pas en mesure de recycler doivent être écartés. C’est ça qui va faire la différence dans les centres de tri», conclut Mme Le Rouzic.

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