Protection du patrimoine: le secteur privé appelé à en faire plus
Les fonds publics ne pourront suffire à assurer la protection du patrimoine du Grand Montréal, estime un organisme, qui espère mobiliser davantage le secteur privé à cette fin.
Héritage Montréal, qui se porte à la défense du patrimoine de la région métropolitaine, a présenté mardi une nouvelle plateforme web, baptisée Memento. Celle-ci vise à répertorier les sites patrimoniaux du Grand Montréal dont l’avenir est en péril si des mesures ne sont pas prises pour préserver ceux-ci. L’organisme vient ainsi étendre le champ d’action de cette initiative, limité depuis 2015 à l’île de Montréal.
«Essentiellement, on s’est rendu compte qu’on était centré sur le centre de l’île de Montréal. L’objectif, maintenant, avec Memento, c’est d’élargir les alertes citoyennes à l’ensemble des 82 municipalités de la [Communauté métropolitaine de Montréal]», a expliqué mardi avant-midi le directeur général d’Héritage Montréal, Robert Turgeon, lors d’un événement médiatique.
Par le biais de cette plateforme, les citoyens peuvent signaler divers bâtiments et lieux à valeur patrimoniale menacés par l’usure du temps et le développement des villes. Un résumé de l’histoire de ces endroits accompagne généralement ces «alertes citoyennes», qui visent à inciter la population à se mobiliser pour contribuer à la préservation de ces endroits. Le site rapportait mardi 112 sites patrimoniaux menacés dans le Grand Montréal.
«On veut inciter davantage les citoyens à participer à des projets de requalification [de lieux patrimoniaux]», a ajouté M Turgeon.
Rénovations coûteuses
La rénovation de tels sites dans le respect de leur caractère patrimonial implique toutefois des dépenses importantes. Récemment, la Ville a débloqué, grâce à l’aide de Québec, un montant de 1 M$ qui vise à offrir un soutien financier aux propriétaires de bâtiments à valeur patrimoniale afin qu’ils puissent rénover ceux-ci dans le respect des règlements visant à les protéger.
«Les résidents n’ont pas toujours conscience de la valeur de leur bâtiment et du fait qu’ils doivent en tenir compte quand ils font des travaux», a d’ailleurs évoqué mardi la mairesse de l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville et responsable du patrimoine à la Ville, Émilie Thuillier.
Impliquer le secteur privé
L’aide financière de la Ville et de Québec ne pourra toutefois suffire à assurer la préservation à long terme des nombreux bâtiments patrimoniaux de la région, soulève M. Turgeon. Ce dernier propose donc de miser davantage sur le secteur privé qui, estime-t-il, aurait tout intérêt à s’intéresser au patrimoine, qui occupe souvent une place stratégique au cœur des villes et des villages de la région. Une situation géographique qui peut rendre ceux-ci attrayants, notamment pour les promoteurs immobiliers.
«Et donc, en amenant cette notion-là de valeur économique, qui a souvent été négligée, ça va amener de nouveaux partenaires dans l’équation. Ça va faire en sorte que les gouvernements ne seront plus les seuls à s’occuper du patrimoine», souligne-t-il en entrevue à Métro.
«On souhaite faire intervenir davantage de partenaires privés [dans la protection du patrimoine].» -Robert Turgeon, directeur général d’Héritage Montréal
M. Turgeon donne à titre d’exemple la Maison Notman, un bâtiment patrimonial de Montréal qui accueille désormais de jeunes entreprises en démarrage. Il y a aussi toutes ces églises dans la région et ailleurs au Québec qui font l’objet de projets immobiliers.
«On veut faire en sorte de trouver une nouvelle fonction pour les bâtiments à restaurer», souligne Mme Thuillier, rencontrée en marge de cette annonce. Une façon, en somme, d’assurer la protection de ces bâtiments sans creuser encore davantage le déficit des différents paliers de gouvernement.