Le vol de vélos montréalais décortiqué
En 2014, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a enregistré 2001 plaintes pour des vélos subtilisés à leurs propriétaires. Toutes les personnes au courant du dossier s’entendent pour dire qu’il y a probablement 10 fois plus de vélos volés. Et même si les agents du SPVM ont récupéré 156 vélos possiblement volés l’année dernière, aucun n’a pu être retourné à son propriétaire, car ils ne portaient pas de numéro d’identification. État de la question.
Des voleurs organisés
Dominique, qui gère le groupe Facebook Vélo Volé – Montréal, recense 3 types de voleurs de vélos. Il y a les itinérants tel que le fameux, Monsieur Bicycle, qui agissent pour assouvir leurs dépendances. «Après plusieurs séjours en prison et malgré les interdictions, ils continuent leurs dommages», raconte-t-il.
On retrouve aussi ces voleurs occasionnels qui sévissent notamment dans le secteur du centre-ville pour se payer des vacances. «Comme on a un album de photos des vélos volés et qu’on scanne régulièrement les sites de revente comme Kijiji, on a retracé ces jeunes et récupéré certains des vélos. Ils ont tenté d’infiltrer notre groupe Facebook, mais après quelques menaces de dévoiler leur identité, on est arrivé à les neutraliser», raconte Dominique.
Finalement, il y a les professionnels qui utilisent tout un réseau de revendeurs. «Quand vous avez affaire à un entrepôt disposant de centaines de vélos usagés, il faut se poser des questions», affirme-t-il. L’émission de télé Enquête sur le sujet avait démontré qu’une bonne partie des vélos douteux étaient vendus lors d’enchères informelles et partaient par centaines outremer.
Que fait la police?
Dans cette même émission Enquête, le SPVM avait mal paru. À une question, le chef du poste de quartier 44, François Leblanc, avait répondu que la police n’enquêtait pas pour connaître les ramifications de ce réseau.
«C’est une honte pour un service de police. Après un deuxième vol, les risques que les gens abandonnent la pratique du cyclisme sont élevés», clame le modérateur du groupe Facebook Vélo Volé – Montréal, qui compte 3000 membres.
Le SPVM a toutefois, par la suite, tenté de corroborer les informations qu’avaient recueillies les journalistes de l’émission. «On a surveillé les endroits visés, mais malheureusement, il n’y a pas eu d’arrestations, car comme les vélos n’étaient pas burinés, on n’a pas pu les relier à des propriétaires lésés. Cela dit, on a avisé les protagonistes, et il semblerait que ces pratiques aient stoppé», a précisé en entrevue à Métro le commandant Leblanc.
Grâce à son nouveau système informatique, le SPVM est désormais capable de repérer les vols de vélos parmi les autres larcins. Mais pas question pour autant de publier ces données afin que des programmeurs puissent établir une carte des lieux sensibles. «On ne veut pas décourager la pratique du vélo», répond M. Leblanc.
Et les cyclistes?
Selon le site internet vélocalisateur où l’on peut poster le lieu où on s’est fait voler son vélo et une photo de sa bicyclette, c’est dans l’arrondissement du Plateau qu’il s’est volé le plus de vélos depuis 2013, loin devant Ville-Marie.
Selon une étude de l’Université McGill réalisée en 2010 auprès de 1437 cyclistes, seulement 8,5% des vélos volés étaient enregistrés. Le quart des propriétaires de ces vélos enregistrés n’avait toutefois pas conservé le numéro d’enregistrement. Pas étonnant alors que le taux de récupération des vélos volés se situe à 1,5%.
Le groupe Vélo volé poste aussi régulièrement des photos de vélos accrochés uniquement par la roue avant ou le cadre. De son côté, l’élu montréalais Marc-André Gadoury, qui siège au Comité sur le vol de vélo à Montréal, mise sur le burinage et la déclaration des vols afin qu’une masse critique de vélos soient enregistrés.
«Ceux qui hésitent à se rendre aux bureaux de l’organisme Tandem pour faire buriner leur vélo peuvent aussi enregistrer le numéro de série de leur bicyclette auprès du SPVM afin qu’elle figure dans leurs bases de données», souligne-t-il en ajoutant qu’il essaie actuellement de convaincre les gros vendeurs de vélos d’effectuer le burinage automatiquement dès l’achat.