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Je t’aime moi non plus

Protesters stand with flags and signs in a show of solidarity with the press in front of The New York Times building, Sunday, Feb. 26, 2017, in New York. The White House banned several major news outlets, including The New York Times and CNN, from an off-camera briefing, known as a "press gaggle," on Friday. (AP Photo/Kathy Willens) Photo: AP

D’aucuns pourront critiquer Justin Trudeau pour un comportement aux antipodes de celui de Harper, celui qui avait, on se souvient, désigné implicitement les médias comme ennemis du bien commun. Dans la manière du moins, se déploie, il est vrai, un style on ne peut plus différent.

Particulièrement en ce qui a trait, justement, aux médias. Ceux-ci adorent le nouveau premier ministre, lequel le leur rend bien. Trop dans l’image, trop dans le paraître, a-t-on souvent entendu. Bien possible. Reste cependant que l’appareil médiatique a quitté, depuis l’arrivée de Trudeau, le banc des accusés. Et il s’agit d’une excellente chose.

Pourquoi? Parce que nommez-moi un seul régime démocratique sérieux exempt de liberté de presse. La relation entre les deux concepts est, quand on y pense, inévitable. Symbiotique, même. Chaque atteinte à la liberté de presse en est une à la démocratie.

Le quatrième pouvoir, bien sûr, n’est pas sans lacune. Une trop fréquente méconnaissance de certains principes de base, par exemple de la présomption d’innocence, l’amène parfois à commettre de solides dérapages. Idem pour une volonté, parfois assumée, de mettre dans le trouble tel ou tel politicien. Me souviens d’un chroniqueur qui détestait, à s’en confesser Stéphane Dion. Au moment de l’accession (improbable) de ce dernier au poste de chef du PLC, le chroniqueur me lança: «Lui, ce c****, on l’attend avec une brique et un fanal!» Profiter d’une tribune pour régler des comptes quasi persos? Pas sûr. En bref, et les illustrations sont multiples, les médias ont souvent contribué à leur mauvaise réputation, surtout face au politique.

Malgré cette relation amour-haine (tous les 
politiciens adorent, voire implorent, les portraits 
dithyrambiques ou complaisants), il ne fait nul doute que les deux doivent et devront, que ça plaise ou non, cohabiter. Ce sera, autrement, la fin de la démocratie. Et le début d’un autre type de régime qu’il fait bien de taire le nom.

Voilà pourquoi les dernières manœuvres trumpistes sont particulièrement inquiétantes. Le président américain d’écrire récemment sur Twitter (autre moyen de contourner les médias traditionnels): «Je n’assisterai pas au dîner de l’Association des correspondants de la Maison-Blanche cette année. Meilleurs vœux à tous et passez une bonne soirée!» On parle ici d’un classique institué en… 1921.

Cela en ajoute une couche aux relations, déjà bordéliques, entre Trump et la presse. Cette dernière, de nous dire monsieur le président, est «malhonnête», et certains de ses représentants doivent être considérés comme des «ennemis du peuple».

Vendredi dernier, le New York Times et CNN, parmi d’autres, se sont vu refuser l’accès au breffage quotidien de la Maison-Blanche.

Un petit mot, pour finir, de Françoise Giroud: «Ainsi commence le fascisme. Il ne dit jamais son nom, il rampe, il flotte. Quand il montre le bout de son nez, on dit: “C’est lui? Vous croyez? Il ne faut rien exagérer!” Et puis, un jour on le prend dans 
la gueule et il est trop tard pour l’expulser.»

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