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L'Office national de l'énergie doit être remplacé

Natural Resources Minister Jim Carr stands in the House of Commons during question period, in Ottawa on Friday, December 9, 2016. THE CANADIAN PRESS/ Patrick Doyle Photo: Patrick Doyle/La Presse Canadienne
Mylène Crête, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — L’Office national de l’énergie (ONÉ) doit être remplacé pour rétablir la confiance du public envers le processus d’évaluation des projets d’oléoducs.

C’est l’une des principales recommandations du comité d’experts mandaté par le ministre des Ressources naturelles, Jim Carr. Le rapport d’une centaine de pages rendu public lundi contient 26 recommandations.

Le ministre Carr a qualifié le rapport de «songé», sans toutefois préciser quel avenir il réserverait à l’ONÉ.

Le comité d’experts suggère la création d’une Commission canadienne sur le transport de l’énergie pour remplacer la structure actuelle de l’ONÉ. Cette commission, qui réglementerait le secteur de l’énergie, devrait être entièrement indépendante.

Elle participerait à l’évaluation des grands projets énergétiques, comme les projets d’oléoduc, conjointement avec l’Agence canadienne d’évaluation environnementale.

Une réforme en profondeur qui va au-delà du changement de nom et de structure, a résumé la coprésidente du comité d’experts, Hélène Lauzon, en entrevue avec La Presse canadienne.

«Ce que nous recommandons, c’est que le processus quasi judiciaire qui existe en ce moment soit plus humanisé, plus flexible, qu’il permette à tous de s’exprimer.»

Le comité a tenu ces derniers mois des consultations dans dix villes un peu partout au pays. Il a reçu plus de 500 mémoires.

«Les gens nous disaient: comment ça se fait qu’on puisse approuver des pipelines au Canada, alors que nos objectifs pour les changements climatiques iraient peut-être à l’encontre de ça?», a-t-elle relaté.

Le comité recommande donc au gouvernement d’élaborer une stratégie nationale sur l’énergie pour réconcilier sa position sur les changements climatiques avec les projets énergétiques.

L’évaluation de ces projets se ferait en deux temps. D’abord, une première consultation permettrait de déterminer leur conformité avec cette stratégie.

Ensuite, l’Agence d’évaluation environnementale et la nouvelle Commission canadienne sur le transport de l’énergie procéderaient à l’évaluation environnementale et technique.

Cette commission devrait tenir de vastes consultations qui tiendraient compte des connaissances autochtones. Ses membres n’auraient plus l’obligation de résider à Calgary comme c’est le cas présentement pour l’ONÉ, ce qui alimente la perception que l’organisme est trop proche de l’industrie pétrolière.

Parallèlement, le comité d’experts recommande la création de l’Agence canadienne de l’information sur l’énergie, dont le rôle serait de fournir des données au gouvernement et au public.

«Ce que nous avons entendu, c’est que plusieurs personnes ont la perception que ces données sont biaisées parce qu’elles sont orientées vers les combustibles fossiles et que jamais dans les études il n’y aurait d’information sur les changements climatiques», a souligné Hélène Lauzon.

Le comité d’experts souligne qu’il n’existe pas à l’heure actuelle d’organisme central d’information sur l’énergie.

«Nous souhaitons que l’ensemble de nos recommandations soient prises en compte parce que si on veut rétablir la confiance du public, améliorer la transparence, s’assurer de l’indépendance des commissaires, accroître la sécurité de la population, elles sont toutes intimement reliées», a fait valoir Mme Lauzon.

Éliminer l’ONÉ?

Le ministre Carr ne s’est pas engagé à respecter l’ensemble des 26 recommandations du comité, affirmant qu’il aurait à faire «des choix difficiles».

«Je n’ai pas vu de recommandations (sur l’élimination de l’ONÉ) d’aucun des comités d’experts», a-t-il dit.

En avril, un autre comité d’experts mandaté par la ministre fédérale de l’Environnement, Catherine McKenna, pour restaurer la confiance du public recommandait de retirer les évaluations environnementales de l’ONÉ.

«Dans une situation comme celle-ci, il faut étudier les pratiques exemplaires ici et ailleurs», a-t-il ajouté, en remerciant le comité d’experts pour ses judicieux conseils.

La chef du Parti vert, Elizabeth May, est en désaccord avec l’interprétation du ministre.

«Vous pouvez dire que le comité d’experts recommande de conserver l’ONÉ en changeant complètement son nom, en le déménageant à Ottawa et en apportant des améliorations à son mandat», a-t-elle ironisé, tout en saluant les recommandations.

«C’est un rapport étoffé qui a tenu compte des commentaires des Canadiens partout au pays et qui vise à la fois à restaurer la confiance du public et de l’industrie dans le processus d’évaluation des projets», a-t-elle dit.

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Thomas Mulcair, estime que le rapport est un pas dans la bonne direction, particulièrement en ce qui a trait à la consultation des peuples autochtones et à la prise en compte des changements climatiques.

«C’est très clair qu’on veut mettre fin au système actuel, et il fallait y mettre fin parce que le public n’avait plus confiance», a-t-il affirmé, se disant préoccupé par l’interprétation que le ministre Carr a fait du rapport.

En 2012, le gouvernement Harper avait confié les évaluations environnementales des projets d’oléoduc et de gazoduc à l’ONÉ. L’organisme gouvernemental doit étudier le projet d’oléoduc Énergie Est.

Greenpeace demande au gouvernement de carrément retirer l’évaluation du projet Énergie Est des mains de l’ONÉ.

«Ce rapport confirme qu’il y a une crise de confiance envers l’ONÉ et qu’elle ne pourra pas être résolue par les changements mineurs qui ont été apportés à l’évaluation du projet Énergie Est», a souligné le porte-parole de l’organisation écologiste, Patrick Bonin.

«Le gouvernement Trudeau favorise les pétrolières et va à l’encontre de l’intérêt du public quand il laisse à l’ONÉ la responsabilité d’évaluer Énergie Est alors que l’organisme n’a plus de crédibilité et n’a plus la confiance de la population.»

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