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Controverse autour du chef de cabinet de Harper

Photo: Adrian Wyld/La Presse Canadienne

OTTAWA – Le chef de cabinet du premier ministre Stephen Harper, Nigel Wright, a-t-il profité de son poste pour favoriser les intérêts financiers d’amis travaillant pour la minière canadienne Barrick Gold ?

La commissaire fédérale à l’éthique, Mary Dawson, prévoit rencontrer M. Wright depuis qu’il a été révélé que le chef de cabinet a été approché à deux reprises en mai dernier par Barrick (TSX:ABX), la plus importante entreprise aurifère de la planète.

M. Wright connaît le fondateur et président du conseil d’administration de Barrick, Peter Munk, depuis des années. Il est aussi un ami intime du fils de M. Munk, Anthony. M. Wright serait le parrain du fils d’Anthony Munk, et les deux hommes ont travaillé ensemble chez Onex (TSX:OCX), le géant des fonds de capital-investissement que M. Wright a quitté pour accepter le poste de chef de cabinet de M. Harper.

M. Wright a aussi été membre du conseil d’administration de la fondation Aurea, créée par Peter Munk et sa femme en 2006. Il a quitté ce poste peu de temps avant de se joindre au cabinet de M. Harper en novembre 2010.

Dans un article publié en avril 2011 par le magazine The Walrus, Peter Munk ne tarit pas d’éloges pour son ami. «Nigel Wright appartient à la poignée de gens que j’ai rencontrés en qui j’ai une entière confiance, dit M. Munk. Il compte parmi ces rares personnes à qui on peut demander sans problème une opinion, ou avec qui on peut discuter de dossiers complexes.»

Des documents remis par Barrick au commissaire au lobbyisme révèlent qu’un représentant non identifié de la compagnie a communiqué avec M. Wright le 14 mai pour discuter de commerce et de relations internationales. Barrick a communiqué avec M. Wright de nouveau neuf jours plus tard, sur le même sujet.

Ces échanges entre Barrick et M. Wright ont eu lieu peu de temps après que le premier ministre Harper ait bloqué, lors du sommet des Amériques en avril, une résolution concernant les revendications de l’Argentine sur les îles Falkland (Malouines). À ce moment, le quotidien Globe and Mail écrivait que la présidente argentine, Cristina Fernandez, avait été tellement outrée par la position canadienne qu’elle avait claqué la porte de la rencontre.

Barrick est propriétaire d’une mine en Argentine et s’apprête à exploiter, dans la controverse, une mine à ciel ouvert le long de la frontière entre le Chili et l’Argentine.

Le député néo-démocrate Charlie Angus affirme que des minières canadiennes peinent à obtenir des permis d’exploitation en Argentine depuis la prise de position de M. Harper.

«On m’a dit que les entreprises canadiennes ont soudainement beaucoup plus de difficultés à obtenir des permis, qu’il y a eu des répercussions immédiates contre les intérêts miniers canadiens, a-t-il dit. On ne sait pas ce qui s’est dit lors de la rencontre (avec Wright). Mais on connaît les intérêts de Barrick. Il y a une raison évidente pour la rencontre (…) Ils veulent des permis pour une mine très controversée et ils n’ont pas besoin d’un premier ministre qui fait des vagues.»

Le NPD pourrait loger une plainte formelle auprès du bureau du commissaire à l’éthique, a dit M. Angus, avant d’ajouter que M. Wright aurait dû s’abstenir de toute discussion avec Barrick, peu importe le sujet, compte tenu de ses liens avec la famille Munk.

«Il entretient des relations personnelles très étroites, ils ont un intérêt financier énorme, et il est le conseiller principal du premier ministre. Il doit se récuser. C’est ce que demande la Loi sur les conflits d’intérêts.»

Le bureau de la commissaire à l’éthique semblait ne pas avoir entendu parler de l’affaire avant d’être relancé par La Presse Canadienne. La porte-parole Margot Booth a promis d’effectuer un suivi avec M. Wright. Pour sa part, le directeur des communications de M. Harper, Andrew MacDougall, s’est contenté de répondre que M. Wright n’a participé à aucune discussion ayant trait à Barrick Gold.

Ni M. MacDougall ni le porte-parole de Barrick, Andy Lloyd, n’ont voulu dévoiler le contenu précis des discussions entre la minière et M. Wright. M. Lloyd s’est contenté de dire que ces échanges ont eu lieu en tout respect des règles.

La commissaire fédérale à l’éthique avait conseillé à M. Wright d’ériger «un pare-feu» contre les conflits d’intérêts quand il s’est joint à M. Harper, pour s’assurer qu’il ne participerait à aucune discussion ayant trait à Onex ou ses filiales, ou même à des discussions portant sur des politiques qui pourraient avoir des répercussions sur Onex.

La question est maintenant de savoir si M. Wright aurait dû se retirer des discussions portant sur Barrick. M. Angus rappelle que M. Harper, quand il était dans l’opposition, dénonçait haut et fort le copinage au sein du cabinet du premier ministre.

«C’était toujours de savoir qui on connaissait au cabinet du premier ministre, et M. Harper avait promis de changer ça. Pourtant, à chaque fois qu’il y a des questions d’éthique, (les conservateurs) font comme si de rien n’était», a dénoncé le député néo-démocrate.

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