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G7: La Malbaie se prépare à accueillir le monde

The home of Rosaire Tremblay, which is inside the red zone security perimeter for the upcoming G7 summit, is seen Thursday, April 26, 2018 in La Malbaie, Que.THE CANADIAN PRESS/Ryan Remiorz Photo: THE CANADIAN PRESS
Giuseppe Valiante, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

LA MALBAIE, Qc — Les résidants de la région de Charlevoix sont prompts à vanter les beautés de leur paysage escarpé sur la rive du fleuve Saint-Laurent, sculpté par la chute d’une météorite il y a des centaines de millions d’années.

Les municipalités de La Malbaie et de Baie-Saint-Paul se sont développées à l’intérieur du cratère, entourées de montagnes et bordées par le fleuve où l’eau douce se mêle à l’eau salée de l’Atlantique. Un point de rencontre fort prisé par les bélugas.

C’est ce cratère idyllique que le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a choisi pour recevoir les dirigeants des grandes puissances de la planète pour le sommet annuel des pays du G7.

Les leaders du Canada, du Royaume-Uni, de l’Italie, de la France, de l’Allemagne, des États-Unis et du Japon vont se réunir durant deux jours, les 8 et 9 juin, pour le 44e sommet du G7. Ils sont attendus au célèbre Manoir Richelieu, un hôtel érigé il y a 120 ans et qui surplombe les eaux du fleuve.

Rosaire Tremblay habite une maison de trois étages, peinte de blanc et de rouge, située tout juste au pied de la falaise sur laquelle s’élève le Manoir Richelieu. À un mois de l’événement, la résidence de M. Tremblay est déjà encerclée par une clôture de sécurité en métal érigée par le gouvernement fédéral.

Surnommée «la maison la plus sécurisée du monde» par certains médias, la demeure de Rosaire Tremblay se trouve à l’intérieur du périmètre de sécurité identifié comme la «zone rouge». Une zone qui s’étend autour du manoir et de son terrain de golf sous contrôle exclusif de la Gendarmerie royale du Canada et des autres services de sécurité.

«Sur mon terrain, il est supposé y avoir un policier devant la clôture à tous les 20 pieds», décrit Rosaire Tremblay en entrevue, attablé dans sa salle à manger.

Des inconvénients et des avantages

Pour un homme dont la propriété est pratiquement «occupée» par le gouvernement fédéral, il garde une humeur enjouée.

«Tous les journalistes qui viennent me voir veulent que je critique la clôture», dit-il. L’homme de 63 ans, père de trois enfants, est toutefois bien disposé à vivre avec les inconvénients temporaires du grillage en échange d’avantages durables. «C’est un détail pour ce que ça rapporte», insiste-t-il.

À titre d’exemple, les services de sécurité ont coupé des arbres qui lui cachaient la vue du fleuve. Le gouvernement va ensuite léguer un réseau internet à haute vitesse auquel la région n’aurait probablement jamais eu accès.

«Je n’avais pas le droit de toucher aux arbres, maintenant je peux voir l’eau depuis ma cuisine», se réjouit M. Tremblay.

L’homme était beaucoup plus volubile au sujet des canards qui viennent se reproduire dans un marais sur sa propriété qu’au sujet du sommet.

Quelques mètres plus loin sur la même rue, Keven Dufour s’affairait à repeindre les cadres extérieurs des fenêtres de son casse-croûte avec l’aide de Jessica Pelletier, qui possède le restaurant d’en face.

Son commerce de deux étages, couleur saumon, se trouve tout près du chemin de fer.

«Les avis sont partagés. Nous, on est emballés, mais il y a plusieurs personnes qui ne le sont pas. Je pense que c’est quelque chose qu’on vit une fois dans sa vie. D’autres gens trouvent que ça coûte trop cher», explique M. Dufour.

«Ça coûterait cher ailleurs aussi, alors aussi bien en profiter nous-mêmes», ajoute Jessica Pelletier.

Ottawa a prévu des dépenses de 600 millions $ pour les événements reliés au G7 tout au long de l’année 2018.

Sur la même rue, quelques kilomètres plus loin, Béatrice Ouellet exploite une boutique de lingerie féminine.

Elle dit ne pas s’inquiéter de la tenue du sommet, mais elle révèle que plusieurs de ses connaissances ont choisi de fermer boutique et de quitter la région pour la durée de l’événement.

La dame de 63 ans s’inquiète plus du manque d’emplois dans la région que des inconvénients de la visite des grands leaders de la planète.

«Ce qui nous touche ici, c’est le chômage. La période est trop longue. À partir de février, il y a des gens qui n’ont plus de chômage jusqu’au mois de mai», déplore Mme Ouellet.

Des résidants anxieux

Audrey Gagnon, 34 ans, est propriétaire d’un bistro déjeuner-dîner depuis un an sur l’artère principale de La Malbaie.

La jeune femme native de la Côte-Nord dit appréhender un peu l’arrivée du G7.

«Moi, personnellement, je trouve ça angoissant parce que je viens d’une région encore plus petite qu’ici. En venant ici, je ne pensais pas vivre quelque chose comme ça», confie-t-elle.

Selon Audrey Gagnon, une bonne partie de la population plus âgée vit beaucoup d’anxiété. «Il y a des gens qui ne sortiront simplement pas de chez eux», rapporte la femme d’affaires en citant les craintes de manifestations, de grabuge et de circulation intense.

La restauratrice glisse elle aussi que l’emploi représente un problème plus important que le G7, en parlant d’un phénomène des «deux extrêmes». «L’hiver, c’est tranquille, donc il y a une pénurie d’emploi. L’été, ça roule tellement qu’il y a une pénurie d’employés», observe-t-elle.

De retour chez Rosaire Gagnon, à «la maison la plus sécurisée du monde», l’homme qui aime observer les baleines croit que le G7 pourrait changer considérablement le visage de La Malbaie.

D’ici 2020, le Club Med prévoit ouvrir un centre de villégiature de luxe pour accueillir les skieurs à la station Le Massif, située entre Québec et La Malbaie.

Ce projet de grande envergure, estimé à 130 millions $, vise à attirer une clientèle de touristes européens dans la région. Un achalandage qui pourrait permettre de soutenir des emplois à l’année et ainsi endiguer l’exode des jeunes travailleurs.

«On a un million de touristes, de mai à octobre. Les jeunes travaillent et les salaires sont bons de mai à octobre. Ensuite, ils ont le chômage jusqu’en mars et après, plus rien. Zéro.»

Selon Rosaire Gagnon, le futur Club Med, qui va profiter de la visibilité mondiale du sommet du G7, devrait permettre de combler le manque d’emploi lié à la baisse d’achalandage en attirant une clientèle à l’année.

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