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Sources journalistiques: La Cour suprême entendra Marie-Maude Denis

Photo: ICI Radio-Canada

OTTAWA — La journaliste Marie-Maude Denis de Radio-Canada n’aura pas à témoigner, du moins pour l’instant, au procès de Marc-Yvan Côté, l’ex-vice-président de la firme de génie Roche. La Cour suprême a accepté jeudi d’entendre sa cause.

Mme Denis s’était tournée vers le plus haut tribunal du pays pour contester l’obligation de révéler ses sources. Un premier test juridique qui permettra de déterminer la portée de la Loi sur la protection des sources journalistiques adoptée par Ottawa en octobre.

«C’est très positif que la Cour suprême traite cette question-là avec toute l’importance qu’elle mérite, a commenté son avocat, Christian Leblanc, en entrevue. C’est donc en soi très positif pour la liberté d’expression et le droit du public à l’information au Canada.»

Un jugement de la Cour supérieure rendu en mars avait contraint Mme Denis à témoigner au procès de l’ex-vice-première ministre Nathalie Normandeau, de Marc-Yvan Côté et de quatre coaccusés.

Le tribunal lui avait ordonné de livrer des renseignements au sujet de deux de ses reportages: «Anguille sous Roche» du 12 avril 2012 et «Ratures et Ruptures» du 10 décembre 2015.

Ce témoignage a été demandé dans le cadre de la requête des accusés pour arrêt des procédures en raison de fuites médiatiques. Ils disent vouloir entendre Marie-Maude Denis afin de déterminer si ces fuites ont été orchestrées par de hauts dirigeants de l’Unité permanente anticorruption (UPAC).

«Ça a été admis par toutes les parties d’entrée de jeu, le seul but de son témoignage est de découvrir ses sources», a affirmé Me Leblanc.

«De notre point de vue, ce ne sont certainement pas des faits qui nécessitent que l’on fasse entorse à un principe protégé très important qui est la protection des sources journalistiques confidentielles», a-t-il ajouté.

La journaliste de l’émission «Enquête» avait porté la cause devant la Cour d’appel du Québec, qui avait déterminé en avril qu’elle n’avait pas la compétence pour entendre cet appel. L’avocat de Mme Denis a également demandé à la Cour suprême de se pencher sur cette question.

Le plus haut tribunal du pays a indiqué jeudi qu’il accordait un traitement accéléré à l’appel de Marie-Maude Denis. Le calendrier de l’automne étant déjà rempli, l’audience risque d’avoir lieu seulement en 2019. Le délai moyen entre l’autorisation d’un appel et l’audition à la cour est d’environ sept mois.

L’importance de la confidentialité des sources
La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) entend intervenir avec d’autres médias lors de l’audience.

«Les conséquences juridiques et journalistiques sont trop importantes pour qu’on puisse laisser le jugement précédent tenir», a indiqué son président, Stéphane Giroux.

«Imaginez un scénario où, demain matin, les journalistes ne peuvent plus promettre cette confidentialité-là parce que les tribunaux peuvent la faire lever, a-t-il continué. Il n’y a plus personne qui va vouloir parler à un journaliste, il n’y a plus personne qui va vouloir lancer des alertes, il n’y a plus personne qui va vouloir rien dénoncer de l’intérieur. Le coeur du débat est là.»

Mme Normandeau, son ex-chef de cabinet Bruno Lortie, l’ex-vice-président de Roche Marc-Yvan Côté, Mario W. Martel et France Michaud, de Roche, ainsi que l’ancien maire de Gaspé François Roussy, ont été arrêtés par l’UPAC en mars 2016 dans le cadre d’une enquête portant sur l’octroi de financement politique en échange de contrats publics.

Leur procès, qui devait commencer le 9 avril, a été suspendu pour une durée indéterminée, en raison des multiples requêtes présentées par les accusés.

Au moment d’écrire ces lignes, l’avocat de Marc-Yvan Côté n’avait pas rappelé La Presse canadienne.

M. Côté et quatre coaccusés — à l’exception de Nathalie Normandeau — demandent la récusation du juge André Perreault qui devait présider le procès. Cette demande est liée à la décision du juge Perreault de ne pas entendre, avant le début du procès criminel, la requête des accusés en arrêt des procédures pour cause de fuites médiatiques.

Mme Normandeau, qui voulait que tout procède comme prévu, demande un procès séparé.

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