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Un voyage pour soutenir les troupes a mal tourné

Jonathan Vance. Photo: Adrian Wyld/La Presse canadienne

OTTAWA — Le chef d’état-major de la défense est à repenser tout le concept des tournées militaires destinées à galvaniser les troupes à l’étranger, alors qu’une enquête interne révèle l’étendue des problèmes rencontrés lors d’un voyage en Lettonie en 2017, qui a culminé avec une accusation d’agression sexuelle portée contre un ancien joueur de la Ligue nationale de hockey (LNH).

Le général Jonathan Vance a refusé de qualifier ce voyage en Lettonie de «fête débridée», mais il a admis que le programme «Équipe Canada» avait été entaché de manière irréparable et qu’il devait être réexaminé.

Ces voyages visant à soutenir le moral des troupes ont été suspendus lorsque la police militaire a accusé l’ancien joueur de la LNH Dave Williams d’avoir agressé sexuellement une agente de bord lors d’une mission en Lettonie en décembre 2017. «Tiger» Williams a nié tout acte répréhensible et sa cause devrait être entendue l’année prochaine.

Le rapport de l’enquête interne, publié jeudi, ne traite pas de ces allégations, qui relèvent de la police militaire. Il se penche plutôt sur la conduite générale du voyage, dont le but précis était de livrer du matériel de hockey en Lettonie et de jouer des matchs amicaux avec les soldats. Le Canada compte actuellement environ 500 militaires dans ce pays et dirige un groupe de combat de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) aux portes de la Russie.

L’enquête tend à confirmer que les voyages d’«Équipe Canada» ressemblent davantage à une fête qu’à une mission militaire, certains passagers du vol buvant jusqu’à l’ivresse, alors que d’autres mettent au défi le personnel de cabine de jouer une partie de bras de fer. Les membres d’équipage, eux, ne semblent pas trop savoir comment réagir et ferment plutôt les yeux sur les excès d’alcool et les autres infractions aux règles du transport aérien.

Sous l’effet de la pression exercée par les supérieurs militaires sur le personnel de bord, ces passagers auraient bénéficié d’un traitement de faveur exceptionnel, selon le rapport d’enquête. Cette pression sur les agents de bord résultait en partie de plaintes concernant leurs performances sur de précédents vols militaires, notamment leur «lenteur à servir les boissons», ainsi que d’instructions contradictoires et confuses sur la manière de gérer leurs passagers «VIP».

Les invités du général ?
Les membres de l’équipage de cabine ont également hésité à affronter des passagers qui se conduisaient mal parce que le voyage avait été organisé par le bureau du général Vance, et les agents de bord estimaient que ces passagers étaient les invités spéciaux du chef d’état-major.

De fait, ces passagers très spéciaux ont évité les contrôles de sécurité à Ottawa, ont été autorisés à emporter dans l’avion des bouteilles d’alcool déjà ouvertes et du tabac à chiquer, et ont pigé eux-mêmes dans les glacières de boissons alcoolisées placées dans les allées défrayées par le personnel du général Vance, qui s’était cotisé.

Le rapport d’enquête conclut que le comportement de certains passagers n’était pas propice à un environnement de travail respectueux et dénué de harcèlement. Par ailleurs, l’équipage de cabine n’est pas intervenu en raison de la pression exercée pour fournir un service exceptionnel aux missions «VIP».

L’alcool sera dorénavant interdit durant ces voyages et leur organisation ne sera plus confiée au bureau du général Vance. Les règles et règlements de l’armée de l’air concernant le transport des «personnalités» seront renforcés et le personnel de cabine sera habilité à intervenir auprès des passagers turbulents.

«Les équipages ne doivent pas être plongés dans le doute ou se sentir impuissants», a indiqué M. Vance, qui «ne souscrira jamais à un comportement inapproprié».

Même si certains s’interrogent sur la nécessité de telles tournées, M. Vance soutient qu’elles constituent un bon moyen d’amener un peu de Canada à ces militaires loin de chez eux, mais aussi d’exposer l’armée à d’éminents Canadiens. «Nous devons être en mesure d’attirer à nouveau ces personnalités. Et pour les impliquer, il faut qu’elles sachent que c’est fini, que nous avons réglé le problème: nous sommes une organisation honorable, nous allons le faire honorablement à l’avenir, et elles ne seront pas associées à un spectacle dégradant.»

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