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Ingénieurs et constructeurs réclament plus de souplesse

QUÉBEC – La représentante d’un regroupement de firmes de génie-conseil a plaidé lundi pour la clémence du gouvernement envers un de ses membres qui s’est reconnu coupable d’infractions à la loi électorale.

Le groupe Axor avait plaidé coupable, en 2010, à une quarantaine d’infractions relatives à des dons totalisant 150 000 $ à trois partis partis politiques.

Le gouvernement Marois a déposé la semaine dernière un projet de loi, son premier, qui vise à écarter des appels d’offres publics les entreprises reconnues coupables de certains délits, notamment en matière de financement des partis politiques.

Après avoir été entendue en commission parlementaire, la présidente de l’Association des ingénieurs-conseils du Québec (AICQ), Johanne Desrochers, a déclaré lors d’un point de presse que le gouvernement devrait faire preuve de clémence envers les entreprises qui, comme Axor, reconnaissent leur culpabilité.

Mme Desrochers a affirmé que si elle est adoptée dans sa version actuelle, la Loi sur l’intégrité en matière de contrats publics écarterait Axor, ce qui compromettrait des emplois.

«L’entreprise au complet serait touchée, serait bannie des contrats publics, a-t-elle dit. En plaidant coupable, en prenant des mesures qui s’imposent, en démontrant la volonté de vraiment apporter un changement de comportement, est-ce qu’on a intérêt à penser aux emplois, à la contribution réelle d’une entreprise?»

Selon Mme Desrochers, la loi devrait prévoir des façons de réhabiliter une entreprise, par des mesures correctives, pour éviter que toute la compagnie paie pour les erreurs de quelques éléments.

Le projet de loi 1 prévoit une série d’infractions, allant du Code criminel à la Loi sur l’impôt, qui empêcheraient une entreprise d’obtenir des contrats publics.

L’Autorité des marchés financiers (AMF) s’appuierait sur les antécédents des cinq dernières années des entreprises et de leurs dirigeants avant de décider si elle leur émet une autorisation renouvelable d’une durée de trois ans pour accéder aux marchés publics.

Aux journalistes, Mme Desrochers a déclaré que la Loi sur l’intégrité en matière de contrats publics pourrait entraîner la fermeture d’entreprises. «Ça pourrait avoir cet impact, effectivement, a-t-elle dit. C’est dans cet esprit-là qu’on souhaite que ce soit plus clair, moins subjectif, qu’il y ait des mesures correctives qui puissent être apportées.»

Devant la commission parlementaire qui étudie le projet de loi 1, Mme Desrochers a dénoncé le manque d’objectivité du texte législatif, qui obligerait les entreprises à prouver leur intégrité pour accéder aux contrats publics.

L’AICQ craint notamment les dérives qui pourraient survenir si l’AMF ne dispose pas de balises plus précises dans l’application de la notion de «confiance du public», qui lui permettrait de refuser ou révoquer une autorisation.

Le regroupement souhaite aussi des précisions pour les entreprises, ou leurs dirigeants, qui sont l’objet d’accusations, ce qui leur retirerait aussi le droit de répondre aux appels d’offres publics.

Mme Desrochers a mis le gouvernement en garde contre la tentation de précipiter l’adoption de cette loi sur la base de perceptions véhiculées devant la commission sur la construction présidée par France Charbonneau.

«Il nous apparaît que le contexte de crise actuel ne pousse pas l’État à mettre des entreprises et des emplois à risque sur la seule base de perceptions exacerbées par les révélations entendues quotidiennement», a-t-elle dit aux députés.

Le président du Conseil du trésor, Stéphane Bédard, s’est défendu d’avoir agi dans la précipitation, s’appuyant sur les allégations qui circulent depuis environ trois ans et les récents témoignages devant la commission Charbonneau. «Ça nous fait douter d’à peu près tout ce qui a pu se faire pendant un certain temps», a-t-il dit.

L’Association des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec (ACRGTQ) a estimé que le retrait d’une autorisation d’accès aux contrats publics serait une mesure aussi sévère que «la peine de mort» pour ses membres.

La directrice générale, Gisèle Bourque, a rappelé que les entreprises qui oeuvrent dans le secteur génie civil et voirie de l’industrie de la construction ont pour seuls et principaux clients les ministères et organismes publics.

Mme Bourque a affirmé que le projet de loi devrait mieux encadrer l’émission d’une autorisation afin d’éviter de pénaliser injustement ses membres qui sont honnêtes.

«L’ACRGTQ estime que la mise en place de ce système d’autorisation par l’AMF est probablement une des mesures les plus sévères que le gouvernement du Québec pouvait imposer à notre industrie, a-t-elle dit. Ainsi, retirer à une entreprise de notre secteur une autorisation de faire affaire avec l’État pour une période de cinq ans consiste en rien de moins que la peine de mort pour cette entreprise.»

Mme Bourque a aussi prié le gouvernement de nuancer sa démarche, en suggérant d’attendre les conclusions de la commission Charbonneau avant de légiférer.

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