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Jouets intelligents: la vie privée des enfants à risque

Photo: YouTube

MONTRÉAL — Enfants sous écoute? Les jouets intelligents connectés à l’internet peuvent être fascinants, mais ils ne sont pas sans risques, avertit Option consommateurs à l’approche du temps des Fêtes.

L’organisme voué à la protection des consommateurs vient de réaliser un rapport de recherche, dévoilé mardi, intitulé «Enfants sous écoute: la protection de la vie privée dans l’environnement des jouets intelligents».

On parle ici de différents types de jouets, comme des peluches interactives ou de petits robots. Certains répondent aux questions, effectuent des mouvements sur commande, et invitent les enfants à leur parler. Ils possèdent alors micros, caméras et divers autres capteurs, qui servent à bonifier leurs fonctionnalités et l’interactivité avec les enfants. On peut les faire fonctionner entre autres à l’aide de téléphones intelligents ou de tablettes. Il y en aurait au moins 300 en vente au Canada actuellement, qui sont qualifiés «d’intelligents» ou de «connectés» par leurs fabricants, selon un recensement fragmentaire réalisé par les auteurs de l’étude.

Le chien-robot Chip réagit à son nom, le robot-camion Cozmo reconnaît les visages et la petite créature Furby n’en finit plus de s’animer, roucouler et bavarder.

Certains jouets intelligents sont même capables de se souvenir de ce que l’enfant leur a dit et de s’y adapter; cela leur permet de lui donner des réponses qui correspondent à son profil, à ses intérêts et à son âge, est-il relevé dans le rapport.

Mise en garde
Mais pour faire tout cela, ils recueillent bien des données: pour certains le son de la voix et les paroles des tout-petits et pour d’autres, les images qu’ils captent. Certains font même de la géolocalisation.

C’est là que le bât blesse. Option consommateurs estime que la vie privée des enfants qui utilisent ces jouets est mal protégée.

Non seulement ceux qui achètent ces jouets sont mal informés sur ce que qui est recueilli, mais ils ne savent pas ce que le fabricant fait de ces informations. Et puis, ces données peuvent être détournées et piratées, ajoute l’organisme.

«Les politiques de confidentialité des fabricants décrivent en des termes vagues l’utilisation et la communication des données captées par ces appareils. Elles n’excluent pas l’utilisation de ces données à des fins commerciales et elles en autorisent un large partage», peut-on lire dans le rapport.

«Ce n’est pas clair comment les données sont utilisées», a d’ailleurs fait valoir en conférence de presse mardi matin à Montréal Alexandre Plourde, avocat chez Option consommateurs.

Et puis, qui a accès à ces données et qui les conserve? se demande-t-il.

Des failles de sécurité importantes ont été décelées sur plusieurs jouets ces dernières années. Au point où l’Allemagne a même invité les parents à ne pas acheter — puis à détruire — les poupées intelligentes «mon amie Cayla». Les vulnérabilités de la poupée pourraient donner l’occasion à un pirate d’utiliser son microphone pour parler à distance avec l’enfant, avertit Me Plourde.

En 2015, des pirates ont pu accéder aux renseignements personnels de plus de 316 000 enfants canadiens hébergés sur les serveurs de l’entreprise VTech, qui fabrique des tablettes pour enfant. On comptait parmi les renseignements personnels détournés des noms, des dates d’anniversaire, des photos, des enregistrements de la voix et des messages texte, indique le rapport.

Option consommateurs recommande donc aux parents de bien s’informer avant d’acheter. Ou même de choisir autre chose à placer sous le sapin: leur étude ayant aussi révélé que plusieurs enfants ayant participé à l’étude se sont lassés rapidement de ces jouets, les jugeant répétitifs.

Mais certains des enfants participants se confiaient à leurs jouets, a souligné Me Plourde.

«Dans quelques rares cas, des enfants se sont particulièrement attachés à leur jouet. Ils lui ont raconté des secrets et ont entretenu une forme de relation avec celui-ci. Pour un enfant, Cozmo est devenu le « centre de son univers ». Il s’en occupait du matin au soir, le traitait comme un humain, lui parlait et s’inquiétait qu’il n’ait pas assez de nourriture ou qu’il s’ennuie. La relation est devenue si prenante que les parents n’ont eu d’autre choix que de désactiver les notifications émises par le jouet afin que l’enfant ne soit pas constamment interpellé par celui-ci», est-il relaté dans le rapport.

Option consommateurs formule des recommandations et souhaite que les gouvernements fédéral et provinciaux adaptent les lois au monde numérique, exigent la tenue de tests sur les jouets avant leur mise en marché et se donnent des pouvoirs de retrait si l’un d’entre eux soulève trop d’inquiétudes. Le Commissaire à la vie privée du Canada réclame d’ailleurs plus de pouvoirs depuis des années.

«Le cadre juridique est insuffisant pour s’assurer que les jouets intelligents en vente au Canada ne présentent pas de danger pour les consommateurs en matière de sécurité informatique», constate Alexandre Plourde.

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