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Toronto prédit que 2019 sera moins violente

Christopher Katsarov / La Presse Canadienne Photo: Christopher Katsarov / La Presse Canadienne

TORONTO — Une année 2018 particulièrement violente à Toronto, marquée par une recrudescence des crimes commis avec des armes à feu, a mené la police torontoise à saisir un nombre anormalement élevé d’armes de poing dans les rues de la ville, a déclaré, jeudi, le chef de police Mark Saunders.

Selon M. Saunders, les policiers ont déjà confisqué 514 armes de poing en 2018, soit 222 de plus qu’en 2017, et le nombre d’homicides par arme à feu a augmenté de près de 30 pour cent. Tout cela alors qu’il reste encore quelques jours avant le Nouvel An.

Les armes proviennent de diverses sources, a précisé le chef, effectuant ainsi un changement de ton par rapport aux déclarations antérieures de son service qui laissaient entendre que la majorité des crimes étaient commis avec des armes achetées sur le territoire de la ville.

La hausse de la violence armée demeure la principale priorité à l’approche de 2019, a réitéré M. Saunders en dressant le bilan d’une année record pour le nombre d’homicides commis à Toronto, qui s’élève présentement à 95. Une année durant laquelle la communauté torontoise a été ébranlée par deux attentats ayant fait de nombreuses victimes.

«Chaque jour, on voit plus d’armes à feu, a affirmé le chef Saunders lors d’une conférence de presse de fin d’année. Donc, c’est l’un des aspects dont on doit tenir compte. Le deuxième élément concerne ce qui motive les gens à utiliser une arme à feu pour résoudre leurs problèmes.»

Mark Saunders n’a pas fourni d’analyse détaillée de la provenance des armes à feu, mais il a souligné qu’un nombre croissant de celles-ci sont fabriquées à partir d’imprimantes tridimensionnelles. Il a aussi répété que des armes enregistrées localement ont servi dans de nombreux crimes.

Par le passé, le chef Saunders et des officiers supérieurs de l’unité des armes à feu et des groupes criminels avaient affirmé que les armes à feu achetées au Canada étaient maintenant plus susceptibles de servir à commettre un crime que celles achetées aux États-Unis.

Plus tôt cette année, le détective Rob Di Danieli, un spécialiste des armes à feu et des groupes criminalisés, avait rapporté qu’environ la moitié des armes utilisées pour commettre un crime au pays provenaient du Canada. Selon M. Di Danieli, la tendance aurait commencé à basculer en 2012.

Des données internes de la police, obtenues par La Presse canadienne grâce à la Loi sur l’accès à l’information, brossent toutefois un portrait différent.

Alors que le nombre d’armes utilisées pour commettre des crimes a chuté entre 2007 et 2017, les armes importées des États-Unis ont été plus souvent impliquées dans les crimes que les armes achetées au Canada durant 8 des 11 dernières années. Les armes canadiennes ont servi plus fréquemment à commettre des crimes que les armes américaines seulement en 2010 et en 2015, alors que les deux types d’armes sont à égalité pour l’année 2016.

Ces données n’incluent pas de détails sur le nombre d’armes provenant de pays autres que les États-Unis ni sur le nombre d’armes dont l’origine n’a pas pu être établie.

Confronté à cette apparente contradiction, un porte-parole de la police de Toronto a répondu qu’au cours des cinq dernières années, le nombre d’enquêtes, d’arrestations et de condamnations contre des gens qui avaient légalement acheté des armes à feu au Canada puis les avaient détournées ou revendues à des fins lucratives s’était considérablement accru.

«La majorité des armes à feu impliquées dans un crime, qui sont des armes de poing saisies par le service de police de Toronto, arrivent des États-Unis, écrit Kevin Masterman dans un courriel envoyé à La Presse canadienne. La majorité des armes longues impliquées dans un crime, y compris les fusils de chasse à canon scié, sont d’origine canadienne.»

Lors de la conférence de presse de jeudi, Mark Saunders a dit moins se soucier d’identifier la provenance des armes à feu que de mettre le doigt sur les raisons qui poussent les gens à les utiliser, attribuant le sommet de violence armée aux activités des gangs de rue.

«Si quelqu’un veut une arme à feu, il va en avoir une, a-t-il reconnu. Il y a plus de façons d’y avoir accès que jamais auparavant. C’est donc un aspect du problème. Transformer cette motivation ou appréhender ceux qui sont déterminés, je crois qu’il s’agit là d’une préoccupation prioritaire dans l’environnement actuel.»

Reconnaissant que l’année 2018 a été particulièrement difficile à Toronto, M. Saunders a toutefois estimé que des événements hautement médiatisés avaient contribué à faire mal paraître son corps policier.

De vastes ressources ont été consacrées à l’enquête sur le présumé tueur en série Bruce McArthur, accusé d’avoir assassiné huit hommes liés à la communauté gaie de Toronto sur une période de sept ans.

Deux attaques meurtrières ont aussi bouleversé les Torontois. En avril, le suspect Alek Minassian aurait renversé de nombreux piétons sur la rue Yonge à bord d’une fourgonnette louée, tuant 10 personnes. Trois mois plus tard, un homme armé a ouvert le feu dans le quartier Greektown, tirant sur des piétons et des clients de restaurants. Il a fait deux morts avant de retourner l’arme contre lui.

Ces événements ont miné le sentiment de sécurité du public, a admis le chef de police.

«C’est une chose quand vous jouez avec les armes à feu. C’en est une autre lorsque vous regardez par-dessus votre épaule en marchant dans la rue ou que vous êtes assis dans un restaurant, a-t-il indiqué. Le public a vraiment été traumatisé par ces deux tueries de masse survenues l’une après l’autre et ce sentiment est toujours présent.»

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