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Une dernière lettre pour M. Garneau

Cher M. Garneau,

La dernière fois que j’ai écrit une lettre, c’était il y a plusieurs années. Elle était destinée à M. Béliveau. À mon grand étonnement, j’avais reçu une réponse quelques semaines plus tard. Deux belles pages manuscrites que je conserve précieusement. Aujourd’hui, je vais me servir de cette chronique pour vous faire parvenir ces quelques mots. Sauf que, cette fois-ci, je sais bien qu’il n’y aura pas de réponse. C’est tout pardonné…

La vie est drôlement faite. Et son contraire aussi. Samedi soir, quelques mois à peine après avoir traversé un épisode très éprouvant qui l’a mené aux portes de l’éternité, Jean Béliveau était présent au Centre Bell pour l’ouverture de la saison des Canadiens. Et dimanche matin, j’apprenais que vous, qui étiez jusqu’à tout récemment très actif, n’y seriez plus. Ni au Centre Bell, ni aux Jeux olympiques, ni aux compétitions de patinage artistique, là où il faisait si bon vous entendre. Je m’ennuie déjà.

À la mi-août, au lendemain des Jeux de Londres, j’avais partagé aux lecteurs du journal Métro toute l’admiration que j’éprouvais pour vous. Et je souhaitais – on le souhaitait tous – vous retrouver à Sotchi pour les Jeux d’hiver de 2014. Cinq mois plus tard, on est là, une fois de plus réunis sur cette même page, sachant que ça n’arrivera pas. Perspective déstabilisante s’il en est une. Des Jeux à la télé sans Richard Garneau, personne ne sait à quoi ça peut ressembler.

Il y avait votre présence à l’écran, bien sûr, mais, au-delà de l’image, il y avait aussi votre voix. Cette voix qui pouvait me garder assis bien sagement dans le salon un dimanche après-midi à regarder la finale du Balai d’Argent au curling. Du curling, pour un p’tit gars de huit ou neuf ans, fallait le faire… Sinon, ça pouvait être du cyclisme, du golf ou même du ski de fond. Des sports pas très télévisuels, on en conviendra, mais que vous rendiez subitement fort intéressants. Parce qu’il n’y avait que vous pour faire ça. Et votre propos, bien entendu. Et, j’ose le répéter, votre voix. Cette voix unique qui restera enfouie dans ma mémoire longtemps…

Heureusement qu’il y a la mémoire du son. Ferré a beau chanter que, «avec le temps, va, tout s’en va», j’espère que votre voix,

M. Garneau, elle ne s’en ira pas. Mais je le sais qu’elle ne s’en ira pas, j’en ai la preuve. Chaque fois que je lis les noms de Paavo Nurmi, de Bob Beamon ou de Emil Zatopek, dans ma tête, c’est votre voix que j’entends les prononcer. Même chose pour les Alberto Juantorena, Valeri Borzov et Lasse Virén.  Trois athlètes qui sont passés dans notre ville et dans nos vies à l’été de 1976, mais qui y sont restés d’une certaine manière, presque 40 ans plus tard. Ça, c’est beaucoup grâce à vous.

Au revoir M. Garneau. Vous avez été bien brillant, vous savez. Dans tout ce que vous avez entrepris. Et sachez que ce fut un privilège, pour nous, de vous entendre pendant toutes ces années. Sans vous, peu importe où on l’allumera, la vasque olympique n’aura plus jamais le même éclat pour moi. Je vous admirais
à ce point-là.

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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