Cannabis: la Santé publique demande un meilleur encadrement des produits comestibles
Dans un mémoire publié lundi, les Directions régionales de la santé publique (DRSP) de la province plaident pour un «meilleur encadrement» des produits comestibles du cannabis. Malgré tout, elles saluent le règlement qui vise à interdire la prolifération de friandises au cannabis dès cette année.
Après la légalisation du cannabis l’automne dernier, le gouvernement canadien souhaite permettre dès le 17 octobre la vente des produits comestibles au cannabis. Par exemple, du chocolat, des bonbons et même des boissons gazeuses. Québec a répondu à ce pan de la loi à la fin du mois de juillet en prohibant la mise en circulation de tout produit «attrayant pour les mineurs». Les produits «à usage topique», comme les crèmes avec des extraits de CBD, seront elles aussi interdites.
Dans leur rapport paru lundi, l’ensemble des directeurs de la Santé publique de la province émettent «certaines réserves quant à l’application du règlement» adopté par Québec. «On estime que ce n’est pas suffisamment précis, la façon dont c’est libellé dans le projet de règlement», observe le directeur de santé publique pour la région de Laval, Jean-Pierre Trépanier.
En plus de demander l’interdiction explicite de boissons sucrées à base de cannabis, les DRSP déplorent l’absence d’une entité indépendante capable de se prononcer sur la question.
Diversification du marché
«Les DRSP sont d’avis que la diversification des produits permet à l’industrie de rejoindre de nouveaux consommateurs et, par conséquent, de promouvoir l’usage du cannabis», peut-on lire dans le mémoire de 9 pages.
Cette diversification pourrait devenir dommageable pour les mineurs, constate le document.
«Ils peuvent être facilement confondus avec des aliments courants, ajoute-t-on. Cela pose un risque de consommation accidentelle.» Le mémoire rappelle d’ailleurs que l’État du Colorado a dû «resserrer sa loi» pour éviter une augmentation des cas d’intoxications.
«Ce n’est pas parce que c’est légal que c’est bon pour la santé. Donc on ne devrait pas chercher à créer des nouveaux marchés pour augmenter le nombre de consommateurs» – Dr Jean-Pierre Trépanier, directeur régional de la santé publique pour la région de Laval
Recommandations
Pour éviter que le gouvernement soit confronté à des cas-surprises, les DRSP souhaitent que Québec adopte la ligne dure.
«Il est primordial d’éviter les zones d’incertitude tant dans l’interprétation que dans l’application du règlement. Dans cette optique, nous proposons d’interdire tous les produits dérivés du cannabis, à l’exception de ceux explicitement autorisés par le règlement», lit-on dans le mémoire.
Les représentants de la Santé publique poussent du même coup le ministère de la Santé à «utiliser des critères précis pour définir les produits comestibles». L’interdiction «des boissons sucrées contenant du cannabis» devra elle aussi être menée à terme, plaident-ils.
«Quand il y a des produits attrayants pour les mineurs, ça augmente la consommation, constate Jean-Pierre Trépanier. On l’a vu avec des petits cigares, et c’est vrai pour les boissons sucrées. Il y a eu des cas d’intoxication qui ont même occasionné des décès.»
«On ne veut surtout pas que ça se présente à nouveau», ajoute-t-il.
Ils réclament aussi la création d’une nouvelle instance au sein du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Celle-ci serait chargée d’autoriser les nouveaux produits.
Règlement controversé
Plusieurs institutions se sont faites entendre depuis la confirmation du règlement sur le cannabis comestible. L’Institut nationale de la Santé publique du Québec (INSPQ) craint entre autres «une initiative précipitée».
L’Association québécoise de l’industrie du cannabis (AQIC) dénonce pour sa part une «attitude paternaliste» de la part du MSSS.