Changements climatiques: la facture n’en finit plus de grimper au Canada
Il y a 50 ans, les coûts annuels des changements climatiques et des catastrophes naturelles se chiffraient à quelques dizaines de millions de dollars au Canada. Aujourd’hui, on parle de milliards de dollars. Les conséquences sont nombreuses, à commencer sur les communautés autochtones.
Un nouveau rapport de l’Institut canadien pour des choix climatiques montre que les coûts liés aux changements climatiques sont énormes et ne cessent d’augmenter au Canada.
«C’est terrifiant», réagit Me Sabaa Khan, directrice générale de la Fondation David Suzuki au Québec et l’Atlantique.
«Cette étude le dit bien: on ne voit encore que la pointe de l’iceberg. Les risques financiers posés par les changements climatiques sont plus grands qu’on ne le pensait.» – Me Sabaa Khan, Fondation David Suzuki
Si le gouvernement ne fait rien, les pertes catastrophiques dues aux catastrophes climatiques pourraient augmenter de manière «insoutenable», prévient le rapport.
Des constats qui ne surprennent pas Patrick Bonin, Porte-parole & Responsable de la campagne Climat-Énergie chez Greenpeace Canada.
«À la fin des années 90, Environnement Canada et le Bureau d’Assurance du Canada présentaient déjà ce genre de prévisions», déplore-t-il, en entrevue avec Métro.
Une facture qui grimpe
Inondations, tempêtes et feux de forêt. Les changements climatiques n’auront jamais coûté aussi cher au Canada, selon l’Institut. Pire: depuis le début de la décennie, le nombre de catastrophes (et donc leurs coûts) a doublé par rapport aux trois décennies précédentes.
«La science est claire: si on ne réduit pas les émissions de GES, on s’en va vers de plus grandes catastrophes climatiques et on ne pourra pas s’adapter.» – Patrick Bonin, Greenpeace
Le rapport lui donne d’ailleurs raison: dans le futur, la facture grossit encore.
Par exemple, pour les 33 collectivités des Territoires du Nord-Ouest, on estime qu’au cours des 75 prochaines années, les coûts engendrés par la fonte du pergélisol devraient s’élever à 1,3 milliard de dollars. Soit environ 25% du PIB territorial actuel.
Les Autochtones, premiers touchés
Ces changements climatiques affectent de plus en plus la prospérité et le bien-être des communautés autochtones, note le rapport.
Ainsi, bon nombre d’entre elles ont rapporté des effets négatifs de la dégradation des écosystèmes, des changements dans la fréquence des feux de forêt, de la fonte du pergélisol et des inondations sur leur mode de vie.
C’est aussi ce que souligne le Lancet Countdown sur la santé et les changements climatiques, qui vient de publier lui aussi un rapport sur le même sujet.
«Pour les communautés inuites, métisses et des Premières Nations, la crise climatique actuelle est perçue et vécue comme une intensification des changements environnementaux imposés par une logique coloniale qui perdure», peut-on y lire.
Pour M. Bonin, il est clair que les premiers touchés par la crise sont les plus vulnérables, dont les Premières Nations. Mais également, à terme, la crise touchera aussi les personnes âgées, les enfants, et les populations à faible revenu.
Alors que faire?
Selon l’Institut, tous les ordres de gouvernement devraient en premier lieu augmenter le niveau de financement des mesures d’adaptation aux changements climatiques.
Pour Me Khan, les gouvernements et institutions ne devraient même prendre aucune décision «sans considérer l’impact de l’inaction climatique sur les finances publiques» et sur celles des ménages, dit-elle.
«Si nous ne laissons pas (…) la protection de l’environnement nous guider dans nos investissements, nos enfants n’auront jamais la même qualité de vie que nous.» –Me Sabaa Khan, Fondation David Suzuki
Du côté du Lancet Countdown, on préconise de renforcer la résilience du système de santé. D’abord, face aux changements climatiques mais aussi face aux autres menaces actuelles et à venir pour la santé.
Le ministre dit offrir des «sommes records»
Interrogé par Métro, le cabinet du ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoît Charette, nous renvoie vers son Plan pour une économie verte.
Celui-ci «accorde des sommes records pour l’urgence climatique, notamment pour la lutte aux inondations, aux îlots de chaleur et à l’érosion côtière», dit-il.
Finalement, le cabinet ajoute que «pour la première fois», le PEV réserve des sommes pour la lutte aux changements climatiques «visant spécifiquement les communautés autochtones».
Pour M. Bonin, ce n’est pas «une question d’investissements» mais bien de «courage politique».
Il déplore notamment l’absence de mesures coercitives à l’encontre des plus gros pollueurs. Quant à l’instauration d’objectifs suffisants en matière de diminution des GES, le Plan «échoue lamentablement», ajoute-t-il.