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Excuses du Pape: «On nous a souvent dit qu’on n’était rien»

Messe Papale Sainte-Anne-de-Beaupré
Des centaines de milliers d'autochtones et d'allochtones se sont amassés dès 5h30 pour assister à la messe donnée par le pape devant la cathédrale Sainte-Anne-de-Beaupré. Photo: Éric Martel/Journal Métro

Des centaines d’autochtones et d’allochtones se sont amassés devant la basilique de Sainte-Anne-de-Beaupré pour assister à une messe papale historique. Entre rires et larmes, les membres des Premières Nations présents se disent prêts à pardonner à l’Église, mais se souviennent de leurs maux. Certains ont accepté de faire part à Métro de leurs réactions face aux excuses du pape.

La journée est particulièrement émotive pour une ancienne pensionnaire, Mamiamskum. Accompagnée de son mari, elle se remémore douloureusement les quelques années passées dans différents pensionnats qu’elle a été forcée de fréquenter dès l’âge de quatre ans.

C’était horrible. Les professeurs nous donnaient des coups de bâtons et de clés. La nourriture était immonde et on nous forçait à nous couper les cheveux très courts.

Mamiamskum

Lorsque ses parents ont réussi à l’extirper de cet enfer, Mamiamskum ne parlait plus sa langue maternelle: on l’avait forcée à l’oublier au profit du français. «Je ne pouvais plus parler à mes parents. Je me souviens qu’ils pleuraient.»

De meilleurs jours

Mais Mamiamskum ne baigne pas dans la rancune, bien au contraire. «Je suis tellement contente de voir tout le monde réuni, et surtout de voir le pape prendre le temps de s’excuser à nous. Je pense qu’il est honnête.»

Mamiamskum et son conjoint, Pierre Dominique. Crédit photo: Éric Martel/Journal Métro.

Elle et son mari, Pierre Dominique, sont croyants. Ce dernier a assisté au passage du pape Jean-Paul II au Québec, en 1984. «Si l’on veut être pardonné, il faut pardonner, affirme M. Dominique, natif de Schefferville, à près de 1000 km de Québec. Je crois aux excuses et au pardon de l’Église.»

En mémoire

Carrie Dedam a franchi les huit heures de route qui séparent son Nouveau-Brunswick natal de Sainte-Anne-de-Beaupré. Assister à la messe représentait un devoir pour elle. Elle l’a fait en hommage à un ami de la famille, pensionnaire à Shubenacadie, en Nouvelle-Écosse, de 4 à 16 ans. «Il a été dans les pensionnats tellement longtemps qu’il en a perdu sa langue et sa culture. Il n’a jamais été capable de réintégrer sa communauté», raconte avec émotion Mme Dedam, qui est également issue des Premières Nations.

Mme Dedam a choisi de venir avec le portrait de son ami, décédé il y a six ans. «Je suis certaine qu’il aurait voulu être ici pour être en paix avec son passé», estime-t-elle.

Carrie Dedam avec le portrait de son ami, ancien pensionnaire décédé. Crédit photo: Éric Martel/Journal Métro.

Elle se dit somme toute satisfaite des excuses prononcées par le pape.

Je trouve ça bien, même si ce n’est pas assez. Je trouve regrettable qu’il ne fasse pas mention des violences sexuelles imposées aux pensionnaires; c’est pourtant très important.

Carrie Dedam

Vent de jeunesse

La messe historique attire des spectateurs de tous les âges. Jeremiah Savoie, 14 ans, a insisté pour parcourir sept heures de route avec ses grands-parents, afin d’assister à l’évènement.

Certains membres de sa famille ont vécu l’horreur dans les pensionnats, raconte-t-il. «On me raconte des histoires de gens frappés, tenus dans des cages, forcés à se mettre la main sur le poêle, confie-t-il. Rien ne pourra pardonner ce qui s’est passé: des enfants sont morts, quand même.»

Pour lui, la présence du pape s’avère tout de même un bon pas vers la réconciliation.

Le pardon est important pour nous, parce qu’on nous a souvent dit qu’on n’était rien, qu’on n’était pas comme les autres humains. Un jour, j’aimerais qu’on comprenne qu’on est des personnes normales.

Jeremiah Savoie

Les membres des Premières Nations et des pèlerins se sont rassemblés devant la basilique de Sainte-Anne-de-Beaupré dès 5h30. Environ 10 000 places étaient disponibles, mais seulement 1600 à l’intérieur. La majorité d’entre elles étaient réservées aux membres des Premières Nations.

Des centaines de policiers de la Sûreté du Québec ont été déployés pour l’occasion, ainsi que de nombreux agents de la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

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