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Un Amalgame très concret

Les membres de L’Amalgame: John Ouain, Carey Size, Gary Légaré, Catboot et Vendou. Aux frontières du concret sera disponible vendredi. Le lancement aura lieu le 19 avril au Ministère (4521, boulevard St-Laurent). Photo: Josie Desmarais/Métro
Benoit Valois-Nadeau - Métro

Armés d’un son béton, les membres de L’Amalgame ont bien l’intention de percer avec leur nouvel album, Aux frontières du concret.

«Craquer le concret»: la formule revient comme un mantra dans ce troisième album riche en références géologiques.

Une figure de style qui repose sur la polysémie du mot concrete (qui veut dire à la fois béton et concret dans la langue de Shakespeare), mais aussi sur la volonté du groupe d’offrir un son bien lourd.

«Avec ce titre, on voulait souligner le paradoxe entre la liberté qu’on se donne dans la création et le produit brut qu’on peaufine pour en faire quelque chose de consommable pour l’amateur de rap keb et de musique en général, explique Vendou, rencontré avec trois autres membres du groupe dans une chic pizzeria de Rosemont, berceau du groupe. La démarche derrière ça, la distribution, la mise en marché, l’équipe qui t’entoure, ça c’est très concret.»

«On n’est pas là juste pour fracasser des speakers. Il y a une recherche musicale très poussée derrière.» – Catboot, membre de L’Amalgame, souligne le travail des beatmakers présents sur Aux frontières du concret, notamment Kodakludo, QuietMike et Rousseau.

Concrètes, les paroles de L’Amalgame le sont aussi. Dans un parler qu’ils qualifient de «vernaculaire», les cinq rappeurs multiplient les références montréalaises dans un franglais bien assumé.

«Il peut y avoir des élans lyriques dans le rap, mais je pense qu’on est tous d’accord pour dire qu’il faut s’exprimer comme on parle dans la vie, ce que certains rappeurs échappent, explique Catboot. C’est important pour nous de garder des expressions populaires et d’être proches de la façon dont on parle dans la vie de tous les jours. Ce n’est pas quelque chose de nouveau pour nous. On n’a jamais essayé de travestir nos textes pour une crisse de cenne.»

Réalisé après une pause d’un an du groupe, Aux frontières du concret est bercé par l’influence du trap américain (Concret, Correction), mais contient aussi quelques pièces plus planantes comme Verre ou LPSBEMTQLPT (La pierre se brise en même temps que la pluie tombe), pièce sur… l’érosion.

«C’est très inspiré de la musique américaine contemporaine, le son trap d’Atlanta, mais très jazzy aussi, avec une touche soul, illustre Catboot. C’est très urbain, mais le jazz n’est pas loin.»

L’humour et les doubles sens non plus ne sont jamais loin pour le quintette, qui a notamment dédié une pièce, Pas sortable (Bleu cool), aux vertus du Gatorade bleu, antidote parfait aux lendemains de veille difficiles.

«On est tous des personnes qui aiment rire. On part sur des délires, alors c’est sûr que ça se reflète dans nos textes», précise John Ouain.

«Je suis all in là-dessus. Je trouve que ça décomplexe le rap et l’image du rappeur, postule Catboot, qui souligne l’apport d’Eminem et d’Alaclair Ensemble dans le domaine. Avoir de l’humour, c’est l’une des plus grandes qualités d’un auteur. Parce que la ligne entre être un rappeur très drôle et avoir l’air d’un cave est très fine.»

Le groupe s’éloigne aussi de l’image datée du rappeur macho qui se proclame le meilleur au monde.

«Je préfère miauler qu’être un mâle alpha», proclament-ils sur Berceuse.

«Je pense qu’on est en phase avec notre époque au niveau des paroles et de notre univers musical, estime Vendou. Avant, le rap, c’était beaucoup: “Je veux être le meilleur du game.” Maintenant, les gens qui vont réussir ne veulent plus être dans le game, ils veulent bâtir leur style propre. De plus en plus, le rap et la pop se mélangent, et le rap n’est plus nécessairement une jungle.»

Le rap demeure tout de même un milieu très compétitif pour ceux qui désirent vivre de leur art, ce qui est envisageable pour les membres de l’Amalgame si Aux frontières du concret connaît le succès escompté.

Comme ils le chantent sur Perron, les efforts investis vont finir par payer.

«L’artiste, c’est ce qu’il veut, vivre de sa musique, recevoir des chèques directement dans sa boîte à malle sur son perron, admet John Ouain. On a travaillé beaucoup et on est confiants, qu’on a un produit intéressant. L’album va sonner comme une tonne de briques.»

Au service de la reine
Les gars de L’Amalgame font partie de La Fourmillière, nébuleuse regroupant une vingtaine de rappeurs et de producteurs montréalais, dont Fouki et LaF, gagnants des dernières Francouvertes.

Les membres de cette grande famille baignent dans le même univers musical, collaborent et partagent leurs beats, ce qui donne une certaine unité à tous les projets issus de ce grand collectif. «Certaines personnes voient ça comme un supergroup, mais c’est super naturel, précise Catboot. À la base, c’est vraiment une grosse gang de chums. Des chums qui ont commencé la musique au même moment et qui, en ce moment, émerge en même temps. Comme dans une fourmillière, on est tous au service de la reine: le bon rap.»

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