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Sophie Deraspe, héroïne des prix Iris

Sophie Deraspe
Le film «Antigone» de Sophie Deraspe a triomphé lors de la remise des prix Iris Photo: Collaboration spéciale

Antigone de Sophie Deraspe s’est mérité les grands honneurs hier soir lors d’une remise des prix Iris atypique qui a par moments eu des airs de discussion Zoom cacophonique, pandémie oblige.

L’équipe d’Antigone repart avec six prestigieuses statuettes, dont celles du Meilleur film, de la Meilleure réalisation et du Meilleur scénario à Sophie Deraspe, ainsi que celle de la Révélation de l’année pour Nahéma Ricci, qui crève l’écran dans le rôle-titre.

«Merci à ma mère et merci à ma grand-mère, qui m’ont donné le privilège de rêver devenir actrice un jour», a dit la jeune lauréate.

La réalisatrice a établi des parallèles entre la tragédie «deux fois millénaire» qu’elle a adaptée, qui porte sur «une jeune héroïne qui se bat contre l’injustice du système», et cette même injustice mise de l’avant par le mouvement mondial contre les brutalités policières, qui a lieu dans la foulée du meurtre de George Floyd. «C’est quelque chose qui nous concerne tous», a-t-elle dit.

Adaptation moderne de la tragédie grecque de Sophocle, Antigone met en scène une adolescente d’origine kabyle qui, armée de ses convictions et d’une force de caractère sans pareil, se dresse seule face à l’injustice subie par son frère. Le scénario s’inspire de l’affaire Villanueva.

«C’est une histoire d’empathie, de solidarité et d’amour», a déclaré Sophie Deraspe lors de son premier discours de remerciement.

En tête des nominations de la soirée, le très beau film Il pleuvait des oiseaux de Louise Archambault a été sacré du Prix du public, en plus de récolter les deux Iris d’interprétation pour un premier rôle, décernés respectivement à Andrée Lachapelle (à titre posthume) et à Gilbert Sicotte, tous deux bouleversants dans les rôles de Marie-Desneige et de Charlie.

L’acteur a d’ailleurs remercié sa «belle et tendre partenaire de jeu» en ondes.

«C’est encourageant: on s’en va vers une autre ère où les portes sont ouvertes pour nos jeunes, afin qu’ils puissent faire ce qu’ils veulent. C’est possible.» Alanis Obomsawin, récipiendaire de l’Iris Hommage, au sujet des progrès dans les relations entre autochtones et allochtones

La fille d’Andrée Lachapelle, Nathalie Gadouas, s’est dite émue:  «Je pense que maman serait absolument ravie et heureuse d’avoir remporté ce prix.» Avec raison, elle a mentionné que ce rôle a permis à sa mère de «finir sa carrière en beauté».

D’abord omis de la sélection pour l’Iris du Film s’étant le plus illustré à l’extérieur du Québec, Matthias & Maxime a finalement été vainqueur dans cette catégorie. Le film de Xavier Dolan, qui était en sélection officielle à Cannes l’an dernier, s’est également mérité un prix d’interprétation, décerné à Micheline Bernard, ainsi que l’Iris de la Meilleure musique originale, signée par le pianiste Jean-Michel Blais.

Ce dernier a remercié le compositeur Schubert, «une grosse inspiration».

Le vingtième siècle, long métrage éclaté et atypique de Matthew Rankin portant sur l’ascension du premier ministre canadien Mackenzie King, s’est quant à lui mérité la plupart des prix techniques, notamment pour sa direction artistique, ses costumes, ses maquillages et ses coiffures.

Rappelons que cette édition des prix Iris était historique, non seulement en raison du contexte inédit de son déroulement, mais aussi grâce à l’importante représentation des femmes cinéastes parmi les nommés.

Les joies du direct

Ce gala est le premier du Québec à se tenir en pleine pandémie de la COVID-19. L’équipe de Québec Cinéma a réussi à créer un événement sympathique et rythmé, malgré plusieurs problèmes de son durant la première partie. On osera même écrire que la cérémonie était plus plaisante que ses éditions précédentes.

La remise de prix s’est déroulée en deux temps. En premier lieu, un «gala sur le sofa» animé par Élise Guilbault, Guillaume Lambert et Mani Soleymanlou (qui s’est «réinventé» en animateur de gala) s’est tenu en ligne dans une ambiance bon enfant. Vingt-quatre prix y ont été remis.

Comme il fallait s’y attendre, des problèmes techniques ont ponctué cette diffusion en direct, dont un fâcheux en tout début de soirée, alors qu’on entendait l’équipe en régie parler par-dessus le discours d’ouverture de Ségolène Roederer portant sur le très sérieux enjeu de la diversité sur nos écrans.

À ce sujet, la directrice de Québec Cinéma s’est engagée à «poursuivre le travail» afin que les personnes afrodescendantes soient mieux représentées.

Durant cette partie, on a souvent eu l’impression de prendre part à une discussion Zoom étourdissante, avec des gens qui se coupent la parole involontairement et plusieurs décalages sonores.

À cet égard, on salue Micheline Bernard, première lauréate de la soirée, qui n’a pu faire ses remerciements qu’à la fin du premier segment.

«Je pense que Infoman a du stock pour au moins trois saisons!» a blagué Guillaume Lambert plus tard dans la soirée. Heureusement, le trio d’animateurs a compensé avec sa répartie et son autodérision.

Ce même trio nous a aussi offert le moment le plus touchant de la soirée par leurs hommages sentis aux disparus de l’année. Chacun a partagé des souvenirs personnels vécus avec Monique Mercure, Claude Lemieux, Michelle Rossignol et Andrée Lachapelle.

Autre grand moment: la présence de la prolifique documentariste abénakise Alanis Obomsawin, récipiendaire de l’Iris Hommage, qui a été décrite avec justesse par Mani Soleymanlou comme une «femme de parole, de cœur et d’action».

L’inspirante réalisatrice qui, depuis le début de sa carrière, braque sa caméra sur les injustices vécues par les peuples autochtones a salué les progrès accomplis à cet égard.

On a également apprécié sa discussion tout sourire avec l’animateur Jean-Philippe Wauthier dans la deuxième partie du gala, tenue lors du talk-show Bonsoir, bonsoir! sur Ici Radio-Canada Télé, dans une facture nettement plus soignée que la portion web.

L’animateur était accompagné de Christine Beaulieu et de Paul Houde pour remettre les quatre derniers prix de la soirée, dont celui du Meilleur film.

Fidèle à lui-même, celui-ci a présenté quelques amusantes statistiques sur le cinéma québécois sous forme de quiz. Et il a peut-être  même convaincu le cinéaste Jean-Marc Vallée de lui donner un rôle dans C.R.A.Z.Y. 2!


Et les gagnants sont:

  • Meilleur film Antigone (Sophie Deraspe)
  • Meilleure réalisation Sophie Deraspe (Antigone)
  • Meilleur scénario Sophie Deraspe (Antigone)
  • Meilleure interprétation féminine Andrée Lachapelle (Il pleuvait des oiseaux)
  • Meilleure interprétation masculine Gilbert Sicotte (Il pleuvait des oiseaux)
  • Meilleure interprétation féminine (rôle de soutien)  Micheline Bernard (Matthias & Maxime)
  • Meilleure interprétation masculine (rôle de soutien) Sergio Castellitto (Mafia Inc.)
  • Révélation de l’année Nahéma Ricci (Antigone)
  • Meilleur premier film Sympathie pour le diable (Guillaume de Fontenay)
  • Meilleure direction photo  Yves Bélanger (14 jours 12 nuits)
  • Meilleure musique originale Jean-Michel Blais (Matthias & Maxime)
  • Meilleur film documentaire Xalco (Hind Benchekroun et Sami Mercier)
  • Meilleur court métrage (fiction) Juste toi et moi (Sandrine Brodeur-Desrosiers)
  • Meilleur court métrage (animation) Physique de la tristesse (Theodore Ushev)
  • Film s’étant le plus illustré à l’extérieur du Québec Matthias & Maxime (Xavier Dolan)
  • Prix du public Il pleuvait des oiseaux (Louise Archambault)
  • Prix Hommage Alanis Obomsawin

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