De grandes femmes à Petite-Vallée
Klô Pelgag, Marie-Pierre Arthur, Safia Nolin et d’autres talentueuses artistes ont livré des performances mémorables aux premiers jours de la 38e édition du Festival en chanson de Petite-Vallée, dans le décor enchanteur de la Gaspésie.
«On est chanceux d’avoir un festival après un an et demi de marde», a résumé sans détour et avec justesse le directeur du festival, Alan Côté, en guise de mot d’ouverture.
Comme la plupart des événements culturels annulés à l’été 2020, le Festival en chanson de Petite-Vallée effectue son grand retour cette année avec une riche programmation répartie sur une dizaine de jours.
Bonne nouvelle en prime: Québec a annoncé une aide financière de 10 M$ pour la reconstruction du Théâtre de la Vieille Forge, emporté par les flammes en 2017. Le nouvel espace culturel devrait être opérationnel en 2024.
La première fin de semaine frisquette du festival a été rythmée au son de la musique pop, rock et folk d’artistes féminines aux voix enlevantes ainsi que par une performance du tonnerre d’Antoine Corriveau en préouverture (voir encadré).
Royale Klô Pelgag
En grande forme, Klô Pelgag a sans contredit livré le spectacle le plus grandiose de ce premier week-end. La tête d’affiche du festival nageait sur scène comme un poisson dans l’eau, toujours en pleine possession de sa voix devant une foule entièrement conquise qui s’est levée (avec masque) pour danser sur les enlevantes Mélamine et Rémora.
Avec ses musiciens et ses formidables choristes en gilet de sauvetage nommées Les grands-mères à broil, elle a interprété plusieurs titres de son plus récent album, Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, nommé sur la longue liste du prix Polaris.
«Si j’avais l’occasion d’être un bel homme, je serais Guy Jodoin.»
Klô Pelgag sur scène
La chanteuse s’est éclatée lors de cette performance très énergique, jouant tantôt du piano, tantôt de la guitare, le tout en sautant, en dansant et en mangeant des bourgots entre deux chansons – on est en Gaspésie après tout, sa région natale.
Irrésistible Marie-Pierre Arthur
La barre était haute après cette perfo décapante. Fort heureusement, Marie-Pierre Arthur et ses musiciens l’ont relevée haut la main en fin de soirée avec un spectacle rock irrésistible aux accents d’électro.
La bassiste et ses musiciens ont commencé avec quelques chansons aux synthétiseurs dansants, dont Dans tes rêves et Tiens-moi mon cœur, tirées de son plus récent album Des feux pour voir.
La native de Grande-Vallée (village voisin de Petite-Vallée) n’a pas caché son plaisir d’être de retour sur scène et sa joie de vivre était contagieuse. «C’est le fun d’entendre du monde crieeeeer!» s’est-elle réjouie sur scène.
On a retenu notre souffle lorsque sa basse lui a glissé des mains. Heureusement, plus de peur que de mal. Généreuse, la musicienne a aussi invité ses nièces sur scène le temps de quelques chansons. «On va finir le cœur plein de joie», a-t-elle ensuite annoncé. Chose promise, chose due.
Heureux retour de Safia Nolin
La veille, il a fait bon de renouer avec la voix en or de Safia Nolin. Après une année pour le moins mouvementée, l’autrice-compositrice-interprète est de retour sur scène avec l’intention de consacrer toute son énergie à sa musique.
Malgré sa nervosité palpable, elle a livré un solide spectacle aux accents de rock reprenant plusieurs chansons de son album Dans le noir avec de nouveaux arrangements. Elle a aussi présenté de nouvelles compositions seule à la guitare.
Avec autodérision, elle s’est adressée à quelques reprises au public, mais moins qu’à son habitude, a-t-elle reconnu. «Des affaires, j’en dis en masse, vous pouvez les lire sur Internet», a-t-elle déclaré, suscitant des éclats de rire dans la salle.
Seul bémol: la chanteuse a mis fin à sa performance après une courte heure sur scène. On en aurait pris plus.
Les grands-mères en solo
Plus tôt vendredi, nous avons eu l’occasion de découvrir l’ampleur du talent des trois choristes de Klô Pelgag. Laurence-Anne, qui a fait paraître son premier album, Musivision, en avril dernier, a particulièrement impressionné avec sa pop onirique envoûtante et sa voix vaporeuse.
Juste après, N NAO, qui l’accompagnait aux claviers, présentait au Bar de la mer ses douces chansons folk «qui s’écoutent bien en prenant une marche en forêt ou pour faire une sieste», selon elle. Malgré une performance qui a pris du temps à prendre son envol, on a beaucoup apprécié la présence de l’artiste.
Mention spéciale au spectateur qui a répliqué tout bonnement à la chanteuse, qui demandait pourquoi tout le monde était si sérieux après sa récitation d’un poème sur une nymphe : «Ben… Quand on parle de nymphe!»
En matinée, on a eu l’occasion de découvrir le folk mélodieux de Lysandre, qui était aux claviers de N NAO par après – vous suivez? En formule déjeuner, la chanteuse a livré un spectacle minimaliste au piano accompagnée d’une guitariste. Charmante, elle a conquis le public avec ses jolies chansons et sa reprise de J’ai planté un chêne de Gilles Vigneault.
Puissant Antoine Corriveau
En préouverture du festival, Antoine Corriveau a brisé la glace tout en rock et en poésie. «J’ai jamais été sûr qu’Alan m’aimait», a-t-il blagué au sujet de la case horaire de son spectacle, qui s’est tenu la veille de l’ouverture officielle des festivités de Petite-Vallée. Le grand manitou du festival l’a rassuré en fin de performance en lui criant qu’il «a bien commencé ça». On seconde. En plus de nous présenter son alter ego Luc, l’auteur-compositeur-interprète a joué avec fougue plusieurs chansons de Pissenlit, son acclamé dernier album. On a eu des frissons lors de son interprétation de Les sangs mélangés en duo avec Erika Angell, puissante chanson tristement de circonstance en ce soir du 1er juillet dans laquelle il reprend les mots de l’écrivain Éric Plamondon : «On a tous du sang indien/Si c’est pas dans les veines/C’est sur les mains.»
Métro a séjourné en Gaspésie à l’invitation du Festival en chanson de Petite-Vallée, qui se poursuit jusqu’au 10 juillet.