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Oscars: le combat des films

Huit œuvres sont en lice pour l’Oscar du meilleur film de l’année, ultime récompense qui sera remise ce dimanche au Dolby Theater. Mais laquelle mérite le plus la statuette? Huit journalistes cinéphiles de Métro ont tiré à la courte paille pour trouver quel long métrage ils devraient défendre sur ce site.

Certains sont tombés sur un film qu’ils ont véritablement adoré. D’autres, sur une œuvre qui leur a, euh, un peu moins plu. Voici néanmoins leur plaidoyer passionné pour «leur» film. Celui qui, bien sûr, repartira couronné! Allez-y, la bande, débattez!

American Sniper

American Sniper

American Sniper, un film de guerre dirigé par Clint Eastwood, a toutes les chances de séduire les vieux hommes blancs que sont les membres de l’Académie. C’est tiré d’une histoire vraie, celle de Chris Kyle, le tireur d’élite ayant causé le plus de morts de l’histoire de l’Armée américaine. Et il y a aussi Bradley Cooper – mais ça, c’est une autre catégorie… On peut ne pas partager les valeurs qu’on voit à l’écran – on a reproché au film d’être raciste et de glorifier un tueur –, mais ça n’en fait pas un mauvais film pour autant. Ça serait beaucoup trop simple. Surtout s’il illustre la réalité du terrain. La guerre, c’est moche, mais Eastwood a créé un film qui n’est ni tout noir ni tout blanc. Et si American Sniper a ses défauts et colporte des clichés (notamment sur les Irakiens, qualifiés de «sauvages» par Kyle, qui regrette de ne pas en avoir tué davantage – yish), il rend compte aussi de l’autre côté de la médaille de cette armée si chère aux Américains: le stress post-traumatique chez les soldats et les effets des combats sur les personnes qu’ils sont (et sur leurs proches).
Andréanne Chevalier

Birdman-Michael-Keaton-Edward-Norton

Birdman

Birdman est le genre de film dont on ressort avec le sentiment d’être un peu plus intelligent, et ça, c’est la raison pour laquelle l’Académie lui attribuera l’Oscar du meilleur film. Lorsque vous réalisez le but et les moyens utilisés par Alejandro González Iñárritu pour faire passer son message (mais quel est ce message?!), vous sautez à pieds joints dans l’Art avec un grand A. Ce film est bien plus qu’un immense plan-séquence à la musique parfaitement placée et à la distribution d’acteurs rêvée! Qui n’a pas envie de revoir Michael Keaton, le meilleur Batman de tous les temps? Qui ne veut pas voir un Edward Norton en caricature de lui-même (il paraît qu’il est absolument abject sur les tournages!)? Qui ne veut pas voir Emma Stone, Zach Galifianakis et Naomi Watts dans de complets contre-emplois? Une satire de l’univers du show-business et de ses acteurs qui n’est ni hypocrite ni baveuse. Intelligent, on vous dit.
Chloé Freslon

Grand Budapest Hotel

The Grand Budapest Hotel

J’ai moins d’espace que mes chers collègues pour défendre mon film, à cause de la longueur de son titre. Soit! GBH (vous permettrez l’abréviation) est tellement génialissime qu’il n’a besoin que de peu de mots pour être défendu. Car, voyez-vous, il s’agit du chef-d’œuvre du talentueux et créatif Wes Anderson. Déjà, il mérite tous les prix récompensant l’esthétisme (décor, costumes, direction photo, etc.) tant chaque plan est un tableau impeccablement construit. Mais la grande beauté de ce film réside dans son scénario, qui, pour la première fois dans la filmographie du cinéaste, ancre son univers complètement décalé dans le monde réel, et pas n’importe lequel: celui sombre et cruel des années 1930, sur fond de montée du nazisme et d’arrivée de la guerre. C’est là que se trouve le chef-d’œuvre: des personnages «andersonnesques» qui luttent pour préserver l’élégance de leur univers face à la barbarie du monde extérieur.
Marie-Lise Rousseau

boyhood

Boyhood

Les détracteurs de Boyhood soutiennent que si ce n’était pas de son fameux tournage sur 12 ans, Richard Linklater aurait concocté là un film bien banal. Mais n’est-ce pas le cas de toutes les histoires auxquelles on enlèverait la petite touche qui les rend uniques? Et n’est-ce pas la marque d’un vrai talent que d’être capable de prendre une idée aussi simple et en apparence ennuyante que «suivre le quotidien d’un garçon de l’enfance à l’âge adulte» et d’en faire une œuvre véritablement captivante? Beaucoup plus difficile de capter la beauté du temps qui passe que de faire un film inspirant en se basant sur une histoire grandiose qui existait déjà, comme plusieurs des biopics en compétition cette année, non? Et puis, oui, il faut bien le dire, le concept du film en soi, le fait d’avoir réussi à faire quelque chose qui se tient en filmant sur 12 ans, sans que personne le laisse tomber, sans que le jeu des (tous excellents) comédiens devienne moins bon avec le temps, ça relève de l’exploit et ça mérite amplement que l’Académie le souligne.
Jessica Émond-Ferrat

THE IMITATION GAME

The Imitation Game

Vous regardez cette sélection avec huit photos de types, et la première chose que vous vous demandez, c’est mais où sont les filles? Bonne question. Ensuite: mais qui va gagner? Ah! Ça, c’est facile! The Imitation Game. Pourquoi? Parce que ce film CRIE: «Salut, j’existe pour venir chercher l’Oscar!» Parce que, en plus, il est fait par des Anglais, mais il est teeeeeellement hollywoodien. Parce qu’Alan Turing, le vrai, celui sur lequel est basé ce «biopic», était un être fascinant et complexe, un mathématicien brillant qui assumait complètement son homosexualité (ce qui aurait pu être oh my, so shocking! pour l’Académie conservatrice), mais on le dépeint ici comme un homme asocial, renfermé, qui a langui toute sa vie pour son amour platonique d’enfance (ce qui aura le tour de plaire, oh my! So sad!, à ladite Académie). Parce que les codes que le Alan à l’écran brise ont été simplifiés façon Sudoku niveau 2. Parce qu’il appelle, hon, comme c’est cute, sa machine Christopher (!). O.K., d’accord. Parce que Benedict. (Pardon de t’avoir si mal défendu, Imitation Game, mais t’es vraiment un film très, très irritant.)
Natalia Wysocka

Whiplash

Whiplash

Gagner les Oscars en réalisant un film patriotique (American Sniper), un film attendrissant (Boyhood) ou la biographie filmée d’un génie (The Theory of Everything ou The Imitation Game), y a vraiment rien là! Gagner en tournant un long métrage sur la batterie, ça, c’est du sport! D’autant plus que le réalisateur Damien Chazelle (le Xavier Dolan états-unien) n’a pas lésiné sur la musique, qui occupe 51% des 107 minutes du film. La dernière séquence consiste même en un solo de plusieurs minutes (Oui, Monsieur!), qui est presque aussi captivant que la fameuse scène de la douche d’Hitchcock! Whiplash gagnera les prix du meilleur mixage sonore, du meilleur second rôle (le prof tyrannique incarné par J.K. Simmons), du meilleur montage, ça n’est même pas négociable! Et si Whiplash ne remporte pas l’Oscar du meilleur film, j’espère bien que Terence Fletcher (le prof tyrannique) montera sur scène, tel un Kanye West, pour hurler une de ses répliques blessantes: «Est-ce tout ce que tu as pour moi, espèce de youpin inutile?! Faut pas se surprendre que ta mère t’ait abandonné!!»
Mathias Marchal

Selma

Selma

Il suffit de regarder trois des quatre derniers lauréats pour considérer Selma comme le candidat idéal. The King’s Speech (2011), Argo (2013), Twelve Years A Slave (2014)… des longs métrages sur un personnage et/ou un événement historiques. À des degrés différents, les films de ce genre dégagent une puissance qui amène le téléspectateur à se dire: «Wow, ça s’est vraiment passé.» Selma – du nom de la ville de l’Alabama où des citoyens ont marché pacifiquement et courageusement pour la défense des droits civiques des Noirs aux États-Unis – en est un exemple frappant. On pense à cette scène où un jeune homme noir (Jimmie Lee Jackson) est abattu de sang-froid par un policier dans un café dans lequel il s’était réfugié avec sa mère et son grand-père. Selma est une chronique de l’Histoire (signalons l’excellente prestation de David Oyelowo dans la peau de Martin Luther King) qui résonne encore au XXIe siècle. Cinquante ans plus tard et dans la foulée des événements de Ferguson – où un jeune Noir a été tué par un policier blanc –, un Oscar serait symbolique. Selma récolterait alors ce que le refrain de la chanson inspirante du film répète en chœur: Glory.
Baptiste Barbe

The Theory of Everything

The Theory of Everything

Bienvenue dans la seule critique que vous avez besoin de lire dans cet article. Pas que mes illustres collègues n’aient rien d’intéressant à dire à propos de leur film (quoique…), mais il n’y a qu’une réponse possible à la question «Qui devrait gagner l’Oscar du meilleur film?», et c’est The Theory of Everything. Le long métrage de James Marsh est bien plus qu’un simple biopic sur la vie de Stephen Hawking. Oui, on suit le parcours du scientifique, la tragédie de voir un homme intelligent, à l’imagination sans borne, devenir peu à peu prisonnier de son corps. Mais la recherche de l’équation universelle, de la réconciliation de la théorie quantique des champs et de la relativité générale demeure à l’arrière-plan. C’est plutôt la relation franche, touchante et compliquée entre Hawking et son épouse de l’époque, Jane, qui est au cœur du film. L’histoire racontée est puissante. Les performances le sont encore plus. Felicity Jones (Jane) nous garde dans son coin, peu importe la situation. Eddie Redmayne (Hawking) est excellent dès le départ et devient sublime au fur et à mesure que le film avance.
Mathieu Horth Gagné

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