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«La Maison-Bleue»: le Québec comme une république de banane

Fugueuse

Comment un Québec souverain évoluerait-il en Amérique si, en 1995, les gens avaient voté pour une séparation d’avec le Canada?

La réponse proposée par La Maison-Bleue, la nouvelle comédie de Radio-Canada offerte sur l’Extra d’ICI Tou.tv, c’est que nous serions figés dans le temps avec la même réputation qu’à l’époque du premier Elvis Gratton de Pierre Falardeau. C’est-à-dire que le Québec, aux yeux du monde, est une république de bananes.

Supposément, ça, c’est drôle en 2020. Pourtant, la prémisse de La Maison-Bleue pourrait être amusante.

Guy Nadon à la tête d’une nation québécoise aux prises avec une crise identitaire, c’est fertile. Tout comme l’ensemble des comédiens qui l’entourent. Sur papier, on pourrait passer un bon moment. Cependant, entre les mains de Ricardo Trogi, le projet se dirige droit dans le fossé à une vitesse vertigineuse.

Dès les premiers instants, le ton est clair – nous avons droit à une comédie pure et dure, sans nuance. On mise sur des gags, des références, des clins d’œil, et on remplit l’image au maximum.

Ainsi, toutes les pièces ont un cadre, une décoration, une mention ou un détail pour vous faire sourire devant l’ingéniosité de ce Québec uchronique. On ne dépasse jamais le simple placardage, cela dit, et l’ensemble ne dépasse pas non plus le niveau d’une bonne petite capsule de 30 secondes qu’on glisserait comme une publicité au cours d’une émission plus étoffée, par exemple.

La Maison-Bleue: «fable humoristique»

C’est d’ailleurs l’essentiel de mon impression devant La Maison-Bleue. Malgré la qualité de la production, le temps, l’effort et la distribution, ça sonne creux et bancal, pour ne pas dire cheap. Ne manquent que les rires en conserve pour véritablement se croire en 1993, à l’époque des décors en carton et des perruques exagérées.

Malgré la qualité de la production, le temps, l’effort et la distribution, ça sonne creux et bancal, pour ne pas dire cheap.

Radio-Canada nous mentionne que La Maison-Bleue est une «fable humoristique sur les hauts et les bas du pouvoir». Cette phrase servait à nous présenter cette nouveauté avant sa mise en ondes. Selon cette approche, La petite vie serait une prise de position écoresponsable sur la réduction des déchets domestiques.

La Maison-Bleue est une coquille vide esthétiquement riche et adroitement jouée. C’est difficile de croire qu’avec autant de talent et d’expertise autour de la table, ce genre de production dépasse à peine le stade d’une idée lancée en réunion de production.

Sauf qu’on met peut-être le doigt sur un réel problème. Si le Québec se targue d’être le berceau de l’humour en Amérique avec sa puissante industrie, son école et l’écosystème construit autour des humoristes, comment se fait-il que l’humour télévisuel pour le grand public se contente encore d’épuiser des codes vieux de 30 ans alors que, partout ailleurs, on ose sortir des sentiers battus avec des succès quantifiables et retentissants?

C’est à la limite honteux, pour un diffuseur, de se présenter devant son auditoire avec une production aussi peu inspirée et inspirante.

Oui, il y aura quelques sourires, provoqués presque accidentellement, mais on pourrait faire tellement mieux que ça.

Suffirait de sortir un peu des vieilles pantoufles tricotées quelque part en 1990 quand le jeune Claude Meunier poussait les portes des diffuseurs avec son veston «peau de vache».

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