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«La Dump» et la place de la marionnette dans la culture populaire

Maude Morissette, réalisatrice de «La Dump». Photo: Gracieuseté Ariane Martineau

Malgré leur riche histoire artistique, les pantins et les marionnettes semblent avoir disparu de la culture populaire actuelle. Allant à l’encontre de cette tendance avec sa populaire série humoristique La Dump, la décorée réalisatrice Maude Morissette remet l’art marionnettique au goût du jour.

La Dump, qui mêle art numérique avec ses animations en pixel art et art de la marionnette avec ses «marionnettes laides», est une série humoristique engagée qui raconte les aventures d’une famille qui a été chassée des États-Unis pour s’établir dans les égouts de Montréal. Si le format rappelle les habituelles sitcoms familiales animées à la Les Simpsons et Family Guy, l’utilisation de marionnettes détonne.

Diplômée de l’école de l’humour, c’est avec des amis, il y a neuf ans, que Maude Morissette a commencé à filmer des sketchs avec des marionnettes pour partager humoristiquement sa vision du monde. Le format déshumanisé et loufoque des marionnettes lui permet «de dire et faire» ce qu’elle veut. «Quand je veux faire une critique sociale, si ça vient d’un humain, c’est plus difficile. Quand ça vient des marionnettes, c’est plus facile à accepter», partage-t-elle.

Ses marionnettes, qui disent parfois «des affaires épouvantables», illustrent comiquement la banalisation des horreurs que l’on entend dans le discours public. De manière à interpréter un même enjeu de plusieurs angles, les personnages de la famille de La Dump vont avoir différentes perspectives. Barbe, le père et fils illégitime de Donald Trump, est habituellement plus idiot, tandis que son fils de huit ans, «c’est un génie. Il ramène un peu de logique et de bon sens là-dedans», dit-elle.

Malgré ces vertus de ce médium artistique, «les marionnettes au Québec, c’est un mur qui est difficile à défaire», révèle Maude Morissette, l’une des rares artistes castelières à avoir percé dans la culture populaire au Québec. «J’ai frappé des murs, les gens n’aiment pas les marionnettes. Pour eux, c’est laid, c’est bizarre», renchérit-elle.

De l’appréhension qui crée des murs

«Partout dans le monde, surtout en Europe, c’est normal les marionnettes, ça fait partie de la culture. Y’en ont vu partout, c’est pas nécessairement pour enfants. Ils sont à l’aise avec ça, c’est pas une barrière», explique celle qui a d’ailleurs remporté le prix de la réalisatrice de l’année en Allemagne pour sa série.

Pour tenter d’abaisser ces murs qui se sont érigés ici, elle cherche à dédramatiser le médium en le rendant plus accessible et reconnaissable pour le grand public. « J’essaie de faire un décor où on va moins sentir que c’est de la marionnette», dit-elle en guise d’exemple. «Ce qui a aussi aidé, c’est que j’ai de l’autodérision sur mes marionnettes. Je dis aux gens: « eille, si t’aimes pas les marionnettes, écoute ça, tu vas être correct. C’est des marionnettes laides, ça va être drôle »». Une technique qui permet de se plonger dans son univers avec moins d’appréhension mal placée.

Si l’approche de Maude Morissette a un côté assez expérimental pour faire de La Dump une œuvre qui est originale à plus d’un égard, l’art de la marionnette au Québec demeure toutefois plutôt traditionnel. Par exemple, au Festival de Casteliers, qui avait lieu en mars, les performances de marionnettes et de pantins étaient présentées sur scène. De plus, l’expérimentation ne passait que très peu par l’intermédialité, contrairement à La Dump et son pixel art.

Photo: Gracieuseté Jelly Bean Media

L’approche de Maude Morissette étant moins facile à encadrer par les codes usuels de la marionnette, la réalisatrice ne s’est pas fait inviter au Festival de Casteliers ni au populaire Festival international de la marionnette du Saguenay (FIAMS), malgré son succès artistique qui redonne sa popularité à l’art de la marionnette.

Une troisième saison de La Dump est toujours dans les plans, partage l’humoriste. Comme ça prend «un an à un an et demi» pour réaliser une saison et que l’encre n’a toujours pas commencé à couler, il faudra prendre son mal en patience. En attendant, les premières saisons de La Dump peuvent être appréciées sur le site web de l’émission.

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