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Ça non

Mes hommages. Vous êtes-vous régalés devant la spectaculaire vue d’horreur Ça? Vous savez, ce film halloweenesque champêtre mettant en vedette Gripsou (Pennywise, de son prénom original, un prénom qui, à n’en pas douter, ne pouvait être traduit que par «Gripsou»), le clown cabriolant qui se nourrit de tes peurs et qui ne déteste pas te déchiqueter l’avant-bras avec ses petites dents taquines en se faisant aller les sourcils dans un trou de canal? Mais bien sûr, que vous savez.

C’est qu’il y a toujours eu ce petit quelque chose, avec les clowns. Le charme discret du petit pipi dans la culotte, du clown qui se sort des ballounes de la fosse nasale à ta fête de quatre ans et des «je vais peut-être vérifier s’il n’y a pas un meurtrier coiffé d’une étonnante perruque sous mon lit». Dans une tombola comme dans une ruelle du bas de la ville, le clown captive. Mais il terrifie davantage. L’an dernier, on assistait, tant aux États-Unis qu’ici, à la naissance (ou du moins à la médiatisation) d’un mouvement de clowns badins et solitaires qui aimaient bien semer la terreur dans leur petite ville en se promenant avec une chainsaw sur le bord de l’autoroute ou en jaillissant d’un buisson, chaînes de fonte brandies en direction d’une petite dame qui faisait le plein. Des moments circassiens d’une qualité inouïe, il va sans dire.

Mais avec Ça qui fait crépiter le cœur et la panse des cinéphiles les plus avertis, voilà que circulent maintenant sur les réseaux sociaux des vidéos de fanfarons qui, au nom de la risette, du septième art et de la cliquette, ont
réanimé le cadavre de la blague en se costumant, cette fois, comme Gripsou. Et le plan est fort réjouissant : accrocher un ballon rouge dans un endroit inusité, comme un ascenseur, une cabine téléphonique ou un car à vidanges garni de vers blancs, selon la disponibilité du décor, puis attendre patiemment sa proie en se célébrant la finesse du crayon contour des lèvres. Au premier petit couple qui a le malheur de passer par-là, jaillir en hurlant métallique en sa direction et les pourchasser jusqu’à ce qu’un des deux partenaires se sacre dans le caniveau ou mieux, tel que vu hier, que le gentil garçon sous l’emprise de ce doux sentiment qu’est la peur de mourir déchiqueté par un être maléfique se jette dans les bras de sa blonde en lui arrachant carrément sa robe de sur le dos avant de filer à toutes jambes par l’escalier le plus près. Pure folie! Moments cocasses hautement familiaux à savourer en dégustant des fèves au beurre.

Quel plaisir, exactement, dois-je ressentir à la vue de gens terrorisés par un ticaille qui cherche un sens à son suit arlequin? Oui, un jeune homme a eu plus peur que sa blonde. Oui, cet autre bougre est tombé à la renverse en expulsant un jeyser de frayeur dans ses Levi’s. On a gagné! On a gagné. Astheure, peut-on se remettre au canasta? J’aimerais ça, être capable de dormir, ce soir.

La bise.

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