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Lettre au Ministère de l’Enseignement supérieur: pour une amélioration du contexte d’études

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Associations étudiantes, syndicats, étudiant.es, professeur.es et chargé.es de cours signataires - Collaboration spéciale

Madame la ministre Danielle McCann,

La santé mentale des étudiant.es au niveau collégial et universitaire, ainsi que celles de leurs professeur.es, chargé.es de cours et du personnel de soutien, a grandement été mise à l’épreuve durant ces derniers mois.

Il est chose courante d’entendre des histoires à travers toutes ces rencontres en visioconférence d’étudiant.es qui quittent leur programme en raison des conditions malsaines engendrées par ce contexte d’exception.

Plusieurs mesures ont été mises en place afin de mieux soutenir les étudiant.es et le personnel enseignant. Toutefois, celles-ci ne suffisent pas à rendre cette situation acceptable. Redoubler d’efforts pendant une période indéterminée qui perdure depuis bientôt un an, c’est demander aux étudiant.es et au corps professoral de porter la pandémie à bout de bras et cela a des effets désastreux sur la persévérance scolaire, la rétention des professeur.es et chargé.es de cours ainsi que sur le support moral et psychologique.

En effet, lorsque les étudiant.es sont sondé.es sur les conditions d’étude et les répercussions de ce trimestre sur celleux-ci, on constate qu’énormément d’entre elleux éprouvent des difficultés diverses, que ce soit au niveau de leur santé mentale, de leur scolarisation ou des ressources requises pour poursuivre leurs études de façon efficace.

C’est d’ailleurs ce que démontrent les résultats du Sondage interfacultaire de l’UQAM (voir Annexe I), qui a circulé au cours de la période du 24 septembre au 23 octobre 2020 auprès des étudiant.es des différentes facultés de l’UQAM (ADEESE-UQAM et AFESH-UQAM, 2020). Pendant cette période,1868 étudiant.es uqamien.nes ont répondu au sondage pour partager leur appréciation de cette session à distance. Dans celui-ci, plus de la moitié des étudiant.es (56,4%) affirmaient que leur charge de travail avait augmenté comparativement aux sessions en présentiel qu’illes avaient vécues. De plus, plus du tiers (36,4%) des répondant.es affirmaient ne pas avoir aisément accès aux ressources nécessaires pour étudier.

Toutefois, les résultats les plus consternants concernent les principales difficultés rencontrées par les étudiant.es de l’UQAM et qui, à notre avis, se généralisent à l’ensemble des établissements postsecondaires du Québec. En effet, 81,8% des répondant.es ont mentionné avoir des difficultés de concentration en lien avec le passage à l’apprentissage en ligne, 66,1% ont affirmé vivre des difficultés liées à l’isolement et près de la moitié des étudiant.es (autour de 45%) ont répondu avoir des difficultés d’organisation, de persévérance et d’assiduité. Finalement, 21,3% ont affirmé ne pas se sentir bien outillé.es pour réussir cette session.

Il importe donc d’augmenter les mesures de soutien aux étudiant.es ainsi qu’aux professeur.es et aux chargé.es de cours afin qu’illes puissent bénéficier d’un encadrement adéquat ou en assurer un. Au cours des dernières semaines, de nombreuses solutions ont été envisagées par les actrices et acteurs impliqué.es dans ces enjeux, afin d’éviter qu’on ne se dirige vers une détérioration majeure de la santé mentale des étudiant.es. Nombreuses et nombreux sont nos collègues qui se dirigent vers un épuisement professionnel, car illes travaillent à contre-courant pour tenter d’adapter le mieux possible la situation à cette réalité difficile. Toutefois, par faute de ressources, principalement monétaires, la grande majorité de ces solutions n’ont pu être adoptées et mises en application par les administrations collégiales et universitaires. Un changement s’impose.

Il nous semble primordial que le Gouvernement du Québec et le Ministère de l’Enseignement supérieur augmentent davantage et de toute urgence le financement des cégeps et universités, afin de minimiser les impacts sur la santé mentale des étudiant.es, ainsi que sur l’ensemble du personnel enseignant. Aussi, il importe que la mise en place des mesures de soutien soient mieux adaptées à cette situation d’exception qui ne fait qu’agrandir les inégalités déjà existantes dans le contexte d’enseignement supérieur car, jusqu’à maintenant, trop d’institutions d’enseignement supérieur ont investi les sommes dans des infrastructures technopédagogiques davantage que dans les ressources humaines et l’organisation de l’enseignement afin de pallier les effets pervers de la distanciation.

CONSIDÉRANT la nature exceptionnelle du contexte actuel de pandémie et les impacts de celui-ci tant sur la communauté étudiante, le personnel enseignant que sur l’ensemble des travailleur.euse.s des universités et des cégeps;

CONSIDÉRANT les travaux et publications qui signalent le risque de problèmes de santé mentale suscités par la pandémie, dans la population étudiante (Blanchard, Poirier-Veilleux et Markon, 2020);

CONSIDÉRANT les travaux et publications qui signalent le risque élevé d’épuisement professionnel suscité par la pandémie, du fait de la surcharge de travail que celle-ci entraîne pour les professeur.es, chargé.es de cours, auxiliaires d’enseignement et du personnel de soutien (Maiorana, 2020);

CONSIDÉRANT le manque de ressources fournies au personnel enseignant afin d’assurer un enseignement et un accompagnement de qualité aux étudiant.es;

CONSIDÉRANT la Pétition pour préserver la qualité de l’enseignement universitaire et la réussite étudiante qui appelle, notamment, à une réduction de la taille des groupes cours

CONSIDÉRANT que les cours à distance, tel que le visionnement de cours en synchrone ou asynchrone demandent une plus grande charge cognitive aux étudiant.es, engendrant du même coup des problèmes de concentration;

CONSIDÉRANT qu’une très grande proportion d’étudiant.es affirment avoir des problèmes d’organisation, d’assiduité et d’isolement reliés à cette session à distance;

CONSIDÉRANT qu’une proportion considérable d’étudiant.es affirment ne pas se sentir outillé.es pour réussir leur session;

CONSIDÉRANT qu’une proportion considérable d’étudiant.es affirment ne pas avoir aisément accès aux ressources nécessaires pour étudier à distance;

CONSIDÉRANT qu’une majorité d’étudiant.es affirme que la charge de travail a augmenté comparativement aux sessions d’études qui se déroulaient en présentiel;

CONSIDÉRANT que dans bien des cas, les mesures de soutien et d’adaptation pour les étudiant.es présentant un handicap ou des difficultés d’adaptation ou d’apprentissages n’ont pas été bonifiées malgré le contexte d’étude qui s’est complexifié;

CONSIDÉRANT que la santé mentale devrait être considérée comme un réel problème de santé et qu’il est donc un enjeu de santé publique;

CONSIDÉRANT que les universités et les cégeps affirment ne pas avoir les ressources financières nécessaires pour apporter de nouvelles mesures de soutien aux étudiant.es et au personnel enseignant;

CONSIDÉRANT le nombre d’heures astronomique investi par l’ensemble de la communauté étudiante, enseignante et du personnel de soutien dans la recherche de solutions pour améliorer le contexte d’étude actuel;

Nous demandons à la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann :

Que son ministère octroie des financements supplémentaires spécifiques à l’amélioration des conditions d’étude collégiale et universitaire, notamment en ce qui a trait aux services psychosociaux et aux mesures d’aide à la réussite offerts aux populations étudiantes;

Que son ministère oriente ses actions dans une optique de plus grande implication des associations étudiantes et de la communauté académique dans l’élaboration des mesures d’urgence;

Que son ministère reconnaisse que l’enseignement en ligne accentue les inégalités et peut nuire à la participation équitable et au traitement juste et inclusif de tous.tes les étudiant.es, et qu’il travaille avec la communauté étudiante pour mieux encadrer ses pratiques;

Que son ministère instaure une ligne directrice basée sur un principe de redevabilité, transparence, consultation et participation active des étudiant.es et du personnel enseignant et de soutien pour déterminer les priorités budgétaires des universités et collèges.

Ainsi, le financement reçu par les administrations universitaires et collégiales sera attribué en fonction des recommandations faites par la communauté étudiante et académique par l’entremise d’instances respectant un principe de parité (50/50) entre les membres de l’administration et les membres de la communauté étudiante et académique

Cordialement,

Associations étudiantes et syndicats signataires

Association des étudiantes et étudiants de la faculté des sciences de l’éducation de
l’UQAM (ADEESE-UQAM)
Association étudiante des cycles supérieurs en science politique de l’Université de
Montréal (AECSSPUM)
Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM)
Association étudiante du cégep de St-Félicien (AECSF)
Association étudiante du Cégep de Sherbrooke (AÉCS)
Syndicat des étudiant-e-s employé-e-s de l’UQAM (SÉTUE)
Association générale des étudiants de l’Université du Québec à Trois-Rivières (AGEUQTR)
Société générale des étudiantes et étudiants du collège de Maisonneuve
(SOGÉÉCOM)
Association générale étudiante du campus de Rimouski (AGECAR)
Association étudiante du cégep de Saint-Laurent (AECSL)

Étudiant.es, professeur.es et chargé.es de cours

1. Pierre-Laurent Beauchamp, 2e année, baccalauréat en enseignement en adaptation scolaire et sociale, UQAM
2. Stéphanie Thibodeau, maitrise en éducation, UQAM
3. Jeanne Morissette, baccalauréat en enseignement en adaptation scolaire et sociale, UQAM
4. Aurélie Paquet, certificat en éducation à la petite enfance, UQAM
5. Élizabeth Duboc, maîtrise en sciences de la gestion en responsabilité sociale et environnementale, UQAM
6. Mariama Dioum, candidate à la maîtrise en science politique, UQAM
7. Isabelle Poulin, baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire, UQAM
8. Mélianne Bricault-Quintal, candidate à la maîtrise en science politique,UQAM
9. Simon-Pierre Mercille, maîtrise en éducation, UQAM
10.Gabrielle Brochu-Bélanger, baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire, UQAM
11.Liliane Dubé, baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire, UQAM
12. Alexandra Dupuy, candidate à la maitrise en linguistique, UQAM
13.Ricardo Peñafiel, Professeur associé au département de Science politique de l’UQAM et Vice-président, Relations intersyndicales, du SPPEUQAM (Syndicat des professeures et professeurs enseignants de l’UQAM / FNEEQ-CSN)
14.Benoît Allard, maîtrise en science politique, UQAM
15.Nicolas Gilbert, DEC en sciences humaines, Cégep de Saint-Félicien
16.Hugo Forget, DEC en sciences naturelles, Cégep de Sherbrooke
17.Mathieu Li-Goyette, doctorant en littérature comparée, chargé de cours, Université de Montréal
18.Marilou Dubois, Double DEC en littérature et sciences humaines, Cégep de Saint-Laurent
19.Pierre-Étienne Phaneuf, technique en environnement, hygiène et sécurité au travail, Cégep de Saint-Laurent
20.Eve Pouliot, professeure au Département des sciences humaines et sociales, UQAC

Annexe 1

 

Résultats du sondage interfacultaire
Analyse réalisée par l’Association des étudiantes et des étudiants de la Faculté des sciences de l’Éducation de l’UQAM (ADEESE-UQAM) et l’Association Facultaire Étudiante des Sciences Humaines de l’UQAM (AFESH-UQAM)

 13 novembre 2020

 

Introduction

Au cours de la période du 24 septembre au 23 octobre, les différentes associations étudiantes de l’UQAM ont fait circuler un sondage concernant l’appréciation des étudiant.es de la session à distance présentement en cours. Pendant cette période 1868 étudiant.es de l’UQAM ont répondu au sondage Interfacultaire. Parmi celleux-ci, 687 (36,8%) étudient dans la faculté des Sciences Humaines, 335 (17,9%) dans la faculté des Sciences, 391 (20,9%) dans la faculté des Sciences de l’Éducation et 293 (15,7%) dans la faculté de science politique et de droit. Les étudiant.es provenant des autres facultés et les étudiant.es libres n’ont représenté que 8,7% des répondant.es au sondage. Les informations qui seront présentées par la suite représenteront davantage les quatre premières facultés mentionnées. Parmi les répondant.es au sondage 33,1% ont affirmé que leur rentrée en ligne s’est passée mal ou très mal, ce qui est près du tiers des étudiant.es.

 

Les ententes d’évaluation

  • En ce qui concerne les ententes d’évaluations, 32,5% des répondant.es ont affirmé avoir signé l’entièreté de leurs ententes d’évaluations sans même avoir négocié et seulement 15,8% affirment avoir négocié leurs ententes dans l’entièreté de leurs cours.
  • Parmi celleux qui n’ont pas négocié leurs ententes d’évaluation dans certains ou l’entièreté de leurs cours, près de la moitié (46,8%) affirment que ça en aurait été autrement si les négociations s’étaient faites en présentiel.
  • Parmi celleux qui ont négocié leurs ententes d’évaluations, 55,5% affirment avoir eu moins d’agentivité dans les négociations que lors d’une session en présentiel. Ex.: difficulté dans le partage de parole en ligne, moins grande participation en classe, proposition d’un sondage sur zoom à deux réponses “oui/non” sans place à la discussion, impossibilité d’avoir une discussion sans le ou la professeure/chargée de cours, aucune discussion informelle avec ses camarades de classe permettant de partager son opinion et de faire valoir certains points sur les modalités d’évaluations, etc.

 

La charge de travail

  • Lorsque nous avons demandé aux étudiant.es si leur charge de travail avait augmenté comparativement aux sessions en présentiel qu’illes ont vécues, 56,4 % ont affirmé que oui. Ex.: Beaucoup plus de lectures, de travaux et de charge de travail concernant la présence au cours, visionnements de capsules vidéos  en asynchrone à l’extérieur du temps de classe, demande cognitive beaucoup plus grande à faire tout en ligne avec une charge de travail augmentée et/ou similaire, manque de temps pour s’adapter à toutes les nouvelles plateformes en ligne requises pour les cours, etc.

 

Les difficultés de la session à distance

  • Parmi les répondant.es, plus du tiers (36,4%) affirmaient ne pas avoir aisément accès aux ressources nécessaires pour étudier. Ex.: manque d’espace de travail propice à la maison, accès complexifié aux documents d’études en ligne/de la bibliothèque/de la coop-uqam, connexion internet difficile en raison des colocations engendrant parfois des frais supplémentaires, vie familiale très difficile à concilier avec les études à la maison, etc.
  • Lorsque nous avons sondé les étudiant.es sur les principales difficultés qu’illes rencontrent en lien avec le passage à une session en ligne, la concentration fut mentionnée le plus fréquemment à 81,8% (1528 étudiant.es). L’isolement vient en seconde place avec 66,1% (1234 étudiant.es). Près de la moitié des étudiant.es (autour du 45%) ont répondu avoir des difficultés d’organisation, de persévérance et d’assiduité.
  • Sur les 1868 répondant.es au sondage, 21,3% ont affirmé ne pas se sentir bien outillés pour réussir cette session. 31,5% ont répondu ne pas savoir. Cette aussi forte proportion peut s’expliquer par les dates de circulation du sondage qui se sont faites avant la mi-session. Il pourrait donc y avoir une proportion bien plus grande d’étudiant.es ne se sentant pas outillés pour réussir leur session en date d’aujourd’hui.

 

Il nous semble important de faire un retour sur les difficultés de concentration engendrées par cette session à distance. 81,8% représentent une proportion considérable de l’ensemble des étudiant.es ayant répondu à ce sondage. N’oublions pas que 33,1 % avaient répondu que leur rentrée en ligne s’était mal ou très mal déroulée. Cette difficulté de concentration ne représente pas quelques étudiant.es pour qui cette session à distance est plus difficile, mais presque l’entièreté des étudiant.es, que leur rentrée se soit bien ou mal déroulée.

 

Pistes de solutions proposées par les étudiant.es

  • Mention S/É, diminuer la charge de travail habituellement demandée pour les cours afin qu’elle soit adaptée à la réalité en ligne, diminution du temps de cours (3h à 2h, par exemple), davantage de rétroaction et de plages horaires pour poser des questions offertes par les professeur.es, diminution du nombre d’étudiant.es par cours surtout pour les séminaires comme ceux à la maîtrise.

 

Session à distance V.S. session en présentiel

  • Seulement 18,7% des répondant.es ont affirmé préférer les cours en ligne plutôt qu’en présentiel. Une forte majorité (62,7%) ont affirmé préférer les cours en présentiel.

 

Les enjeux à prioriser

  • Lorsque nous avons demandé quels enjeux l’UQAM devrait prioriser dans cette session à distance, la santé mentale est ressortie le plus fréquemment. Les conditions des étudiant.es internationaux.ales, les parents-étudiants et une plus grande flexibilité sont ressortis aussi très fréquemment.

 

Le Service d’accueil et de soutien aux étudiants en situation de handicap (SASESH)

  • 8,9% des répondant.es ont affirmé bénéficier des services du SASESH. Parmi celleux-ci 42,6% ont affirmé ne pas être satisfait.es des mesures mises en place par l’UQAM pour les accommoder dans cette session à distance. La principale critique: aucune accommodation supplémentaire accordée, malgré le contexte d’étude beaucoup plus difficile qu’à l’habitude. Illes souhaitent avoir une prolongation des dates de remises pour les travaux, diminuer la taille des examens qui sont beaucoup plus longs qu’à l’habitude, plus de flexibilité et de compréhension des professeur.es

 

Le rôle des associations étudiantes

  • Dans cette session à distance, 69,1% des répondant.es au sondage considèrent que la priorité des associations étudiantes de l’UQAM doit être de soutenir et défendre les droits des personnes étudiantes.

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