C-18: la Loi sur les nouvelles en ligne défavorise les médias locaux
LETTRE OUVERTE – Sans amendement, le projet de loi C-18 profitera de manière disproportionnée aux grandes entreprises de presse et exclura plusieurs nouveaux médias numériques et médias indépendants.
Le Journal Métro est signataire de cette lettre ouverte.
Lorsque le gouvernement libéral a annoncé son intention de soutenir l’industrie canadienne de l’information, les raisons avancées étaient de soutenir le journalisme local, de soutenir l’innovation dans le domaine de l’information et d’assurer la diversité dans ce secteur d’activité. Le projet de loi C-18, la Loi sur les nouvelles en ligne, actuellement examiné par le Parlement, ne garantit rien de tout cela.
Quatre changements importants sont nécessaires si le Canada veut avoir le journalisme dynamique dont les citoyens ont besoin pour vivre dans une démocratie en santé.
Nous sommes une coalition de médias canadiens indépendants qui font pression pour que des amendements soient apportés au projet de loi C-18, de sorte que ce dernier tienne sa promesse de renforcer le journalisme canadien. Nous représentons une centaine de médias desservant des communautés de partout au Canada et employant près de 1000 journalistes.
Ensemble, nos lecteurs et auditeurs se comptent par millions
Beaucoup d’entre nous ont risqué leur capital personnel, collecté des fonds auprès de leurs communautés et construit des salles de rédaction à partir de rien afin de pouvoir informer des publics mal desservis, souvent à l’échelle locale.
Collectivement, nous sommes des médias numériques, des médias locaux, des médias francophones, des médias anglophones et des médias dirigés par des personnes racisées. Reconstruisant l’écosystème de l’information, nous comptons parmi les organisations médiatiques les plus novatrices au Canada.
La Loi sur les nouvelles en ligne représente une occasion unique d’accélérer cette innovation et ce progrès.
Nous nous sommes réunis pour réclamer que le projet de loi C-18 fasse preuve d’une équité élémentaire.
La pièce maîtresse de ce projet de loi est un modèle de financement obligeant les grandes plateformes Web comme Facebook et Google à compenser les organismes de presse canadiens pour la publication de leur contenu sur ces plateformes. Malheureusement, dans sa forme actuelle, C-18 ne consacre pas précisément le financement au soutien du travail essentiel des journalistes. Il manque également de mécanismes de transparence rigoureux et, surtout, risque de laisser de côté les petits et moyens médias indépendants.
Avant même d’être déposé, ce projet de loi a fait des gagnants et des perdants dans l’industrie de la presse. Une série d’ententes secrètes ont été scellées entre les grandes plateformes technologiques et les plus grands journaux du Canada, ainsi qu’une poignée de plus petits médias. Une conséquence involontaire, mais probable du projet de loi C-18 tel qu’il est actuellement structuré, sera de renforcer ces inégalités et ce secret, ce qui ne fera que miner davantage la confiance déjà ébranlée du public envers le journalisme.
Soyons clairs: nous sommes favorables aux objectifs déclarés du projet de loi C-18. Et il n’est pas trop tard pour que ce projet de loi réponde aux besoins de l’écosystème canadien de l’information. Nous demandons qu’il intègre les modifications suivantes:
Formule de financement transparente et équitable
Une formule de financement universelle doit être appliquée de manière uniforme à toutes les organisations de presse admissibles. Cette formule de financement doit être divulguée, et le public doit savoir quels organismes de presse reçoivent de l’argent des plateformes technologiques.
Soutien aux journalistes
La contribution versée par les grandes plateformes technologiques devrait être basée sur un pourcentage des dépenses relatives au contenu ou sur le nombre de journalistes ou de pigistes travaillant pour une organisation.
Inclusion
Le projet de loi C-18 exclut actuellement des dizaines de médias innovateurs importants en exigeant des seuils d’employés que la plupart des organismes de presse n’atteignent pas avant leur troisième ou quatrième année d’activité. Les critères d’inclusion devraient être indépendants de la taille et du format des organismes de presse.
Pas d’échappatoire
Le projet de loi C-18 comprend actuellement des critères vagues et mal définis permettant des «ordonnances d’exemption» qui pourraient permettre aux grandes plateformes technologiques de se dégager, ce qui favoriserait quelques grandes organisations de presse et exclurait des centaines de petites salles de presse tout à fait légitimes.
Dans le contexte actuel de crise générale de l’information, nos organisations représentent une lueur d’espoir et prouvent qu’il existe un avenir pour un écosystème de l’information dynamique et inclusif au Canada.
Le projet de loi C-18 s’inspire du News Media Bargaining Code de l’Australie, mais il ne doit pas répéter les erreurs de cette initiative législative. En effet, en Australie, 90% des revenus négociés sont allés aux trois plus grandes entreprises médiatiques.
C’est pourquoi nous encourageons le gouvernement à revoir et à améliorer le projet de loi C-18.
En tant que petits et moyens médias, en tant que médias indépendants, nous considérons que ce projet de loi est trop important pour être bâclé. C-18 aura une influence considérable sur l’avenir du journalisme et de l’information au Canada.
Assurons-nous de bien faire les choses.
La liste des signataires est écourtés pour présenter seulement les éditeurs:
Arsenal Media
Canadaland
Constellation Media Society
Discourse Community Publishing
Indiegraf
Metro Media
Narcity Media
Neomedia
Overstory Media Group
Politics Today
The Peak
Village Media
francoischarron.com
Harbinger Media
IndigiNews
insideWaterloo
La Converse
MuslimLink.ca
OakvilleNews.org
PressProgress
rabble.ca
Sun Peaks Independent News
Taproot Edmonton
The Breach
The Flatlander
The Green Line
The Hoser
The Line
The Local
The Resolve
The Rover
The Sprawl
The Tyee
The Wren
Vocal Fry Studios