Petite reine laurentienne
Howard Lee est propriétaire du magasin de vente et de réparation de vélos le Cycles St-Laurent. Alors que la pandémie a entraîné un engouement pour la petite reine, l’industrie fait face à d’importantes pénuries des pièces durant la dernière année. À l’échelle de Montréal, le manque de mécaniciens qualifiés pour l’entretien se fait aussi ressentir.
Quelle est votre histoire dans le monde du vélo?
J’ai commencé à travailler dans la mécanique de vélo quand j’étais au secondaire quatre, dans un magasin à Saint-Laurent qui n’existe plus. J’ai rejoint le Cycles St-Laurent à 19 ans.
Après cinq ans, j’obtiens un emploi chez le fabricant de pièces japonais Shimano, qui avait des bureaux à Montréal. Je les ai suivis lorsqu’ils ont déménagé à Peterborough, avant de les quitter pour retourner à Montréal et retrouver ma famille.
J’ai terminé mes études en comptabilité et j’ai commencé à travailler pour la firme Arthur Andersen (maintenant Deloitte Touche Tohmatsu).
En 1998, le propriétaire du Cycles St-Laurent m’appelle et me propose d’acheter le magasin. J’ai pris le plongeon, et me voici le quatrième successeur depuis 23 ans.
Comment le Cycles Saint-Laurent a-t-il pu perdurer aussi longtemps?
Le Cycles St-Laurent existe depuis 1966, au même endroit sur la rue Du Collège. Ce magasin est comme le Décarie Hot Dogs : c’est un monument que tout le monde connaît. Je crois que la présence au même emplacement aide beaucoup à la pérennité.
Comment les affaires ont-elles progressé durant cette dernière année?
La crise sanitaire a été extrêmement bénéfique pour l’industrie du vélo. Plus de personnes ont commencé à pédaler ou ont repris le vélo. En revanche cette année, on rencontre fréquemment des ruptures de stock, qui ne risquent pas de disparaître avant 2023.
On a reçu que la moitié des vélos de notre inventaire régulier. De ce que j’entends des manufacturiers, ce sont les pièces qui manquent pour compléter les vélos. Nous avons même des cycles qui arrivent avec des composants autres que ceux des fiches techniques.
Il y a un modèle pour lequel nous avons constaté une baisse de qualité. Les leviers de vitesse n’étaient pas du Shimano, mais du Microshift. Nous avons malgré cela acquitté le même prix.
Vous ne jurez que par Shimano?
Shimano est le fournisseur dominant de l’industrie, suivi juste après de SRAM. La plupart des mécaniciens préfèrent le premier, car il est plus facile de travailler avec ces pièces.
Je compare Shimano à Google ou Facebook. Travailler avec eux était une belle expérience. Si j’étais resté un peu plus de temps avec eux, j’aurais eu l’opportunité de visiter leurs installations au Japon.
Le ministère de l’Éducation a approuvé en août un nouveau programme en mécanique de vélos. Qu’en pensez-vous?
Plus il y a d’offres publiques pour enseigner les ficelles, plus les ateliers seront heureux. À Montréal, le bassin de personnes dans le domaine est très restreint.
Pour recruter, je me tourne vers ma clientèle. Mon équipe, ce sont des réguliers qui achetaient des pièces et outils pour faire eux-mêmes leur entretien.
Il n’y a pas un système d’éducation d’envergure autour du vélo. J’ai appris uniquement en faisant, idem pour mes employés. On se forme au fur et à mesure que les produits arrivent.
D’ailleurs, on se familiarise depuis trois ans aux bicyclettes électriques. Nous sommes chanceux de ne pas avoir encore fait face à un problème irréparable. Le plus dur qu’on a eu à faire jusqu’à présent est le changement d’un moteur au complet.
À quoi ressemble le futur du Cycles St-Laurent?
J’ai 53 ans, il me reste quelques années. C’est un travail physique, et les vélos deviennent de plus en plus lourds. J’espère continuer jusqu’à la soixantaine, le seuil de 55 ans est trop tôt.
Il viendra un temps ou je vendrai le magasin. Le profil idéal serait un employé de longue date, qui connaît nos fournisseurs et nos clients.