35 ans après la disparition de son fils, elle se bat toujours
Sébastien Métivier est disparu le 1er novembre 1984 dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Trente-cinq ans plus tard, sa mère Christiane Sirois cherche toujours des réponses et consacre son temps à aider des familles ayant vécu des drames semblables avec son oeuvre de charité Les amis de Sébastien Métivier.
Christiane Sirois se rappelle encore de cette journée où trois enfants sont disparus le même jour à Montréal. Sébastien Métivier avait huit ans et a été vu pour la dernière fois en début de soirée sur la rue Adam. Son ami Wilton Lubin, 12 ans, disparu en même temps, a été retrouvé mort un mois plus tard dans le fleuve Saint-Laurent, près de l’île Charron.
Quelques heures plus tôt, Maurice Viens, quatre ans, a lui aussi été enlevé dans le quartier Centre-Sud. La police de Montréal a retrouvé son corps cinq jours plus tard, à Saint-Antoine-sur-le-Richelieu.
« Les enfants avaient vu l’annonce d’enlèvement du petit Maurice Viens, se souvient madame Sirois. Sébastien a dit : lui, il est mort. À huit ans, t’es conscient du danger, c’est pourquoi je pense que c’était quelqu’un qu’ils connaissaient [qui les a enlevés]. » Aujourd’hui, Sébastien Métivier manque toujours à l’appel.
Des victimes non reconnues par le système
La femme considère que pour survivre à ce drame, il faut simplement respecter la mémoire des enfants. « Il faut faire des démarches, ne pas oublier et de rappeler aux gens qu’il y a eu des erreurs dans les dossiers pour ne plus que ça se répète, dit-elle. J’ai rien à perdre, je l’ai déjà perdu ce que j’avais à perdre. »
« Depuis 35 ans, je survis. C’est comme un handicapé qui vit avec son handicap, moi je suis handicapé de mon enfant » – Christiane Sirois
Ce qui a rendu cette traversé du désert encore plus difficile, c’est de ne jamais avoir pu bénéficier du statut de victime d’acte criminel. « On m’a dit : c’est pas vous la victime, c’est Sébastien », se désole Christiane Sirois. La loi sur l’indemnisation aux victimes d’actes criminels du Québec (IVAC) accorde des services aux familles de personnes assassinées, comme le droit à des soins psychologiques, mais pas à celles des personnes disparues.
Une disparition n’est pas considérée en soi comme un acte criminel, indique la directrice générale de l’Association des Familles de Personnes Assassinées ou Disparues (AFPAD) Nancy Roy. Pour bénéficier de la loi IVAC, il faut avoir été victime d’un acte criminel. « Le gouvernement ne comprend pas la profondeur de la destruction collatérale que ça peut apporter psychologiquement chez un être humain une perte semblable », explique-t-elle.
Avec Les amis de Sébastien Métivier, Christiane tente de compenser cette « faille du système » qu’elle juge injuste. « C’est comme punir quelqu’un par son ignorance, ajoute-t-elle. Les parents d’enfants disparus n’ont pas choisi que leurs enfants soient enlevés. »
L’AFPAD réclame la mise à jour de la loi sur l’IVAC qui date des années 1970 et qui n’a jamais eu de refonte, comme l’a promis la ministre de la justice du Québec, Sonia Lebel. « Tant et aussi longtemps qu’on ne reconnaîtra pas ces parents comme des victimes ou même des proches de victimes, il y aura des inégalités », pense Nancy Roy.
Autant d’années après, Christiane Sirois garde espoir de connaître la vérité et de faire changer les choses. « J’ai espoir que nos représentants au gouvernement vont ouvrir leurs cœurs de parents. Je veux qu’ils comprennent que ce qu’on vit, on ne l’a pas cherché », souligne-t-elle.
Soirée bénéfice pour Les amis de Sébastien Métivier
Christiane Sirois a créé l’œuvre de charité Les amis de Sébastien Métivier qui vient en aide aux familles d’enfants disparues. Le 1er novembre au Carrefour familial d’Hochelaga à 17h se tiendra une soirée spectacle au bénéfice de l’organisation présentant des numéros de chants, de magie et une pièce de théâtre écrite par Christiane. Il est possible de se procurer des billets au coût de 20$ par téléphone au 438-382-3744, en ligne sur le site sebastienmetivier.org ou à l’entrée le jour même en réservant tout de même une place. |