Linda Gauthier: une femme admirable pour son militantisme
La cofondatrice et présidente du Regroupement des activistes pour l’inclusion au Québec (RAPLIQ), Linda Gauthier, est l’une des 10 lauréates du prix Femmes de Valeur de L’Oréal Paris. Le 8 mars, l’une de ces 10 Canadiennes sera nommée lauréate nationale de ce programme soulignant les réalisations de dirigeantes d’organismes à but non lucratif.
C’est à l’âge de 36 ans, alors qu’elle pratiquait la danse de compétition, que Linda Gauthier a appris qu’elle était atteinte d’une maladie incurable, la sclérose en plaques. En six mois, Mme Gauthier a dû utiliser la marchette, puis la canne, le déambulatoire, le fauteuil manuel et finalement le fauteuil motorisé. «On dirait que j’ai laissé le libre cours des choses du moment que j’ai eu un diagnostic, et ça fait en sorte que je suis devenue handicapée en peu de temps», confie-t-elle.
Rapidement, Mme Gauthier a été confrontée à des problèmes d’accessibilité. Elle aimait se rendre dans ses restaurants préférés avant son diagnostic, mais cela est devenu compliqué, voire impossible, d’entrer dans ces établissements. «Je constatais que je ne pouvais pas toujours aller où j’avais envie d’aller, des endroits que j’avais fréquentés quand j’étais ambulante, et que maintenant je ne pouvais plus y aller», témoigne la femme de 64 ans.
Les frustrations du quotidien comme personne à mobilité réduite l’ont incitée à cofonder, en 2009, le RAPLIQ. Cet organisme panquébécois appuie et accompagne les personnes en situation de handicap.
Victoires
Mme Gauthier se souvient de sa première victoire avec le RAPLIQ. Dans un Pharmaprix, au début des années 2010, elle ne pouvait pas payer avec une machine Interac puisque celle-ci était fixée au comptoir. «J’étais à une caisse et j’ai demandé si je pouvais tenir la machine dans mes mains, car à bout de bras, tout le monde pouvait voir ce que je pitonnais sur la machine», relate-t-elle. Pour la militante, il s’agit d’un pouvoir d’achat, celui de payer électroniquement, qui lui était enlevé. «Par défaut, c’est de la discrimination», dit-elle.
Finalement, la Commission des droits de la personne lui a donné gain de cause. Tous les magasins Pharmaprix du Québec ont dû avoir une machine Interac mobile. Mme Gauthier estime que cela a donné l’exemple à d’autres commerces de la province.
Depuis 12 ans, la présidente du RAPLIQ se dévoue totalement à la cause de l’accessibilité universelle. Mme Gauthier évalue qu’elle a investi plus de 10 000 heures de bénévolat dans son organisme. Elle ne le regrette pas, puisque cela a permis aux personnes à mobilité réduite de jouir de plusieurs victoires.
Par exemple, toutes les succursales de la Société des alcools du Québec (SAQ) sont devenues accessibles universellement. De plus, plusieurs magasins Dollarama qui n’étaient pas accessibles le sont désormais. Un gain majeur pour les personnes handicapées qui sont souvent en situation financière précaire.
Récemment, Linda Gauthier a collaboré avec les maisons d’hébergement fréquentées par les victimes de violences conjugales. Sur les 110 maisons des deux principaux regroupements du Québec, seulement 30 maisons sont accessibles, et elles ne le sont pas pour tout type de mobilité réduite. Par exemple, les salles de bain ou la rampe d’accès au bâtiment ne sont pas toujours adaptées aux personnes en fauteuil motorisé.
Le plus grand souhait de la militante est que la Ville de Montréal impose l’accessibilité universelle aux commerces. Par exemple, lorsqu’un nouveau propriétaire acquiert un local, il devrait s’assurer de fournir un accès universel, sans quoi il ne pourrait obtenir son permis d’activité. «En ne le faisant pas, la Ville cautionne la discrimination sur le handicap», estime Mme Gauthier.
La militante mentionne que la Ville de Victoriaville a déjà commencé à imposer un processus de la sorte. «Ça fonctionne bien, car les commerçants sont motivés à avoir leur permis d’opération», affirme-t-elle.
Les lauréates des prix Femmes de Valeur de L’Oréal Paris seront célébrées le 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale des femmes.