Rue Saint-Dominique: «Nous vivons un véritable enfer»
En tapant l’adresse 3621, rue Saint-Dominique dans le service de navigation virtuelle Google Street View, l’internaute tombe sur l’image de ce qui semble être une ruelle obstruée par un arbre. Mais les apparences sont parfois trompeuses. Il s’agit plutôt d’une entrée menant à un immeuble à logements, coincé entre deux bâtisses et le mythique Café Campus de la rue Prince-Arthur Est. La confusion découlant de cette planification urbaine douteuse fait vivre «un véritable enfer» aux locataires de l’immeuble depuis quelques années.
«Tous les jours, devant notre appartement, nous retrouvons des gens qui viennent se cacher de l’œil public pour faire leurs besoins, avoir des relations [sexuelles] ou consommer de la drogue, raconte un des deux locataires rencontrés par Métro, qui n’ont pas voulu être identifiés. Loin de la voie publique et avec peu de luminosité, notre entrée de maison est l’endroit idéal pour ces activités.»
L’emplacement de l’immeuble exacerberait en fait des problèmes d’insalubrité et de sécurité «généralisés» et «malheureusement propres au quartier» du Plateau-Mont-Royal.
«La rue Saint-Dominique est devenue le dépotoir des restaurants, des passants et un endroit idéal pour les activités illégales, poursuit le résident. La nuit, à la sortie des bars, les gens se retrouvent sur les rues résidentielles parallèles à Saint-Laurent pour finir leur soirée. Retrouver du vomi, des seringues, de l’urine, des selles, des itinérants ou des individus flâner devant sa porte d’entrée est devenu la vie de tous les jours pour les habitants de la rue Saint-Dominique.»
Introductions illégales
Craignant pour leur sécurité, des locataires auraient même pris l’habitude de se «barricader» la nuit pour empêcher des personnes intoxiquées de s’introduire illégalement dans leur appartement.
«Un jour, mon voisin d’en haut était sur son balcon. C’était l’été. Un jeune est entré dans son appartement, s’est assis sur le divan, a pris la télécommande et a commencé à regarder la télévision. Il était soûl», raconte une autre résidente.
Cette dernière soutient également qu’elle aurait maintes fois essayé de régler le problème en demandant aux flâneurs de quitter les lieux, en vain devant une affluence trop importante.
«Ils n’arrêtent pas de rentrer et ils urinent partout. Qu’est-ce que je vais faire? M’installer sur une chaise devant ma porte le samedi pour qu’ils me voient et n’entrent pas?», s’interroge-t-elle.
À plusieurs reprises, les occupants de l’immeuble ont été confrontés à des individus adossés sur leur porte et qui, malgré leurs demandes, refusaient de quitter les lieux. Certains auraient même vandalisé les lieux avec de la peinture et arraché une lampe extérieure en guise de représailles. D’autres choisissent plutôt de cogner aux portes des logements aux petites heures du matin.
À la suite de ces événements, une caméra de surveillance et quelques lumières ont été installées à l’initiative des locataires. Une chaîne a également été accrochée à deux poteaux situés de part et d’autre du passage menant à l’immeuble afin d’empêcher les intrus de s’y engager, sans succès.
«Les gens s’en foutent, ils décrochent la chaîne et entrent quand même», souligne le locataire.
«Ma petite amie est terrorisée à l’idée d’avoir à confronter ces personnes en rentrant à la maison seule tard la nuit, ajoute-t-il. Cette situation nous perturbe grandement et elle est une source constante de stress pour nous tous», indique le même locataire.
Installer une clôture?
«Les problèmes pourraient être réglés par une clôture et beaucoup plus de lumière», soutient le locataire.
«Nous avons discuté avec le Café Campus, car plusieurs de ces personnes proviennent de leur établissement. L’administrateur s’est montré coopératif, il a même voulu payer pour l’installation d’une clôture pour éviter que ces personnes viennent devant notre appartement», poursuit-il.
Le hic? Ladite entrée menant au 3621, rue Saint-Dominique est un droit de passage accordé aux locataires par le propriétaire de cette portion de terrain, la Société des vétérans polonais de guerre. Ainsi, «toute solution doit passer par leur administration», précise le résident.
«Le président [de la Société des vétérans polonais de guerre] a clairement mentionné que ce n’était pas son problème. Il refusait de nous écouter ou même de nous parler. Ils nous mettent constamment des bâtons dans les roues afin que le projet ne se concrétise pas. Cela fait plus de huit mois que nous attendons la construction de la clôture ou l’installation de lumières additionnelles», déplore-t-il.
Au moment de la publication de cet article, la Société des vétérans polonais de guerre n’avait pas répondu aux demandes d’entrevue de Métro.
«Ça va se faire avant l’hiver, c’est sûr»
Le coordonnateur du Café Campus, Jean-François Beaudoin, a promis que la clôture serait installée avant l’hiver, lors d’une entrevue téléphonique.
Jean-François Beaudoin a assuré que le Café Campus, locataire de la Société des vétérans polonais de guerre, collaborait au mieux de sa capacité et du contexte.
«La vie de nuit a toujours apporté ses petits problèmes. On veut les régler. Le projet est en cours. En revanche, il y a un manque de main-d’œuvre. On a de la difficulté à trouver du monde pour effectuer des travaux. Les entrepreneurs cherchent des contrats près de chez eux et c’est difficile de les faire venir à Montréal pour une clôture de huit pieds sur huit pieds», affirme le coordonnateur.